
TANTAE NE ANIMIS COELESTIBUS IRAE !
(Tant de ressentiment peut-il entrer dans l’âme des dieux !) …
Le NouvelObs, vient de sortir un numéro qui consacre plusieurs articles aux relations passionnelles qu’entretiennent depuis un demi-siècle, la France et l’Algérie.
Nous sommes habitués, depuis cinquante ans aux approximations journalistiques, qui se sont contentées de nous asséner – tout en servant la soupe aux Bouteflika et consorts – les mêmes contre-vérités, les mêmes mensonges par omission, les mêmes analyses aux prétentions à la fois morales et « objectives » s’appuyant sur les « travaux » d’historiens « militants » formés à la langue de bois et aux manipulations dialectiques qui véhiculent habituellement les poncifs de la « pensée marxiste ».
Beaucoup de ceux qui, pendant des années, se sont efforcés de conditionner une opinion crédule, ont vécu la tragédie algérienne « sous le maillot » communiste ou trotskyste, ou se sont illustrés parmi ceux qui furent, après la déroute des Pieds Noirs, les « idiots utiles » connus de ceux qui sont restés bien informés, sous le vocable de Pieds-Rouges….( J’ai déjà traité de ce sujet dans un précédent billet).
La surprise, mais en est-ce bien une ??? c’est de trouver dans un même numéro, une « sélection » de témoignages de civils européens ou musulmans, de soldats français, de combattants algériens ayant appartenu aux deux camps, – celui de la révolte et celui de la France – , ainsi qu’un article rédigé par un écrivain et journaliste algérien de talent, Slimane Zeghidour, qui en deux pages évoque, avec un souci manifeste de pondération, les sentiments actuels du peuple algérien, tant à l’égard de leur passé colonial, que vis à vis de la France d’aujourd’hui.
Ce genre d’ articles peut contribuer à une réelle « réconciliation des mémoires ».
Car ces mémoires ont été triturées, manipulées, instrumentalisées, tant du côté algérien où le mensonge d’Etat est une pratique constante des Gouvernements depuis l’indépendance de ce pays, que du côté français, où la falsification de la vérité a été mise au service des idéologies éreintées par l’Histoire ( la vraie), et utilisée pour faire oublier les responsabilités de ceux qui ont, sans vergogne,, essayé de se construire une image d’humanistes visionnaires, de « libérateurs », alors qu’ils n’ont été le plus souvent que des complices honteux d’entreprises que seule l’Histoire(la vraie) jugera….que dis-je ??? l’Histoire(la vraie), sous la plume des nouveaux historiens a déjà commencé son oeuvre.
L’article signé par Slimane Zeghidour mérite une lecture attentive.
Il relate avec des mots justes, l’état d’esprit du peuple algérien, en illustrant ses propos par des exemples significatifs.
Il nous démontre que les sentiments de ce peuple attachant n’ont rien à voir avec les clichés que l’on nous rabâche depuis des années, dans le but d’accabler la France, de la contraindre à une « repentance » qui est devenue obsessionnelle chez les dirigeants algériens en quête permanente d’alibi pour faire oublier les résultats déplorables de leur gouvernance.
Un martèlement qui a fini par imprégner les jeunes générations de Franco-Algériens issus de l’immigration, et à en faire de nouveaux rebelles, qui refusent avec arrogance de s’intégrer à une société française qui mijote dans le jus de son auto-détestation.
J’ai retrouvé, dans les exemples qu’il évoque, de nombreuses similitudes avec les images que ceux des Pieds Noirs qui sont retournés sur les traces de leur passé nous rapportent, souvent avec la larme au bord de l’oeil.
Slimane Zeghidour l’affirme : « Bien que le régime invoque en permanence les méfaits de la colonisation, la France n’est plus un épouvantail pour les jeunes générations ».
Certes.
Il montre également le décalage qui existe entre l’état d’esprit de la jeunesse algérienne d’aujourd’hui et celui de la jeunesse immigrée en France qui revendique agressivement ses racines algériennes et se comporte comme le fer de lance d’un combat contre la société d’un pays qui a accueilli leurs parents, même lorsque ces derniers ont fait partie des rebelles assassins de Français pendant la sale guerre, et qui ont parfois été mieux accueillis dans ce pays de cocagne que ceux qui avaient combattu aux côtés de la France.
A titre d’exemple, ce passage de l’article:
» Une guerre en a recouvert une autre. Rue Bouzrina-Ahmed, en face de la mosquée Ketchaoua, qui fut un haut lieu de la bataille d’Alger, une plaque de marbre rappelle un autre souvenir : « Ici a été retrouvé égorgé et mutilé Boubetra Reda, caporal-chef à l’Armée nationale populaire, le 14-10-1995 à 17 heures, martyr du devoir national et de la liberté par les terroristes islamistes. »
Conflit de générations, donc, dans lequel tournent à vide les slogans du parti unique sur les « valeurs du novembrisme » (allusion au 1er novembre 1954, début de la guerre d’indépendance) et autres « constantes de la nation», notions sacro-saintes que nul, de mémoire d’Algérien, n’a jamais tenté d’expliciter.
Le 19 juin dernier, des jeunes, ulcérés par l’incurie des autorités locales, ont même pris d’assaut la mairie d’El-Bouni, non loin d’Annaba. Ils ont arraché de son fronton l’emblème national, l’ont brûlé et ont brandi, devant les policiers antiémeutes accourus sur les lieux, un drapeau… français !
Comme en miroir, cinq jours plus tôt, en France, des supporters de foot beurs, déçus par la débâcle des «Verts» algériens face aux Slovènes, s’en étaient pris de la même façon au drapeau de la mairie de Villeneuve-Saint-Georges pour hisser à sa place l’étendard de l’Algérie.
Singuliers faits divers, dont l’un semble faire écho à l’autre »…….
Et un peu plus loin,
» Ces outrages au drapeau n’ont pas eu le même impact ici et « là-bas » : 1 euro symbolique ( !) de dommages et intérêts, plus 215 euros, soit le coût exact de l’étendard incendié, pour les supporters indélicats des « Verts » ; de deux à huit ans de prison assortis d’une amende d’un million de dinars, soit huit ans de smic, pour les mal-logés d’El-Bouni.
Mais, malgré la sévérité de la sanction judiciaire (ou à cause d’elle ?), nul en Algérie ne songerait à faire grief aux jeunes de leur antipatriotisme . Au contraire.
Beaucoup de sourdes protestations (à défaut de débat public) avaient déjà accueilli il y a un an le renvoi de quatre élèves du lycée Okba Ibn Affan de Bab el-Oued, à Alger, pour avoir hissé un drapeau français dans l’enceinte de l’établissement.
Un internaute avait alors défendu ces jeunes en mal de repères qui en viennent à préférer « l’injustice de l’ancien colonisateur à la mafia qui règne en Algérie depuis 1962. Si quelqu’un doit être traduit devant les tribunaux, ce doit être les membres de cette mafia, dotée d’un drapeau, d’une armée, d’une injustice » !
Et encore:
« Les Algériens, fourbus par un demi-siècle de parti unique et de mensonges «historiques », idéalisent leur passé.
Il faut les voir négocier à prix d’or affiches coloniales, cartes des tribus, manuels d’arabe dialectal… Voyez-les lambiner à travers ce bazar improvisé s’ étendant de la Grande Poste aux trottoirs de l’université d’Alger, «à la recherche du bon temps perdu», comme le dit, désabusé, M’Hamed, « marchand de biens culturels » – en fait de bouquins et périodiques d’antan. Une drôle de mode rétro fait florès : la limonade Hamoud Boualem, lancée dès 1871 par des « indigènes », et le bon vieux café Nizière ont repris leur place sur les tables d’où le FLN les avait bannis, ainsi que le camembert Saint-Augustin, le Caprice de Sidi Amar, le Brieau de Kabylie… qui, eux, sont des produits récents ! En rabattant sur ses yeux un chapeau de cow-boy à la John Wayne, M’Hamed conclut : «On croirait voir ressusciter une Algérie française sans Français. »
Cela montre bien que s’il existe, chez beaucoup de Pieds Noirs, une « nostalgérie », nostalgie d’un passé obscurci par les erreurs, les violences, les crimes, qui ont ensanglanté une cohabitation de 130 ans qui, pourtant, n’a pas toujours été sanglante, il subsiste une même nostalgie, chez beaucoup d’Algériens, ceux-là même qui accueillent les bras ouverts les bordées de Pieds Noirs qui revisitent ce pays, qui leur offrent l’hospitalité avec une émouvante chaleur humaine, et évoquent parfois leurs souvenirs de camaraderie au sein de l’équipe de foot du village, avec des larmes dans les yeux.
Cela montre aussi, qu’il existe des liens personnels très forts de chaque côté de la méditerranée, entre ceux qui ont un patrimoine commun de souvenirs, et ce, malgré le discours pervers d’une pseudo-intelligentsia, qui pour se donner bonne conscience et tenter de faire oublier ses trahisons, n’a cessé de culpabiliser la France et les Français de « là-bas », en joignant sa parole à celle des usurpateurs qui à travers le « Parti Unique », gouvernent un pays et un peuple qui méritaient mieux que cela.
L’avenir, et la réconciliation souhaitée des deux côtés, passent par ces liens là, tout autant, sinon plus que par les ambassades, ou par les ronds-de-jambes et la mièvrerie de ceux qui prétendent racheter par leurs minables courbettes que les Arabes méprisent, les fautes commises par la France et les Français dans ce magnifique pays.
L’objectivité de quelques écrivains algériens, comme Slimane Zeghidour, ou Boualem Sensal,Yasmina Khadra, Tahar Djaout ( assassiné par le FIS), et bien d’autres, ( la liste est de plus en plus longue), contribue à dépassionner les débats, et à « assainir » les mémoires.
J’en redemande !!!
PS. Traduction du titre: » intelligenti pauca » : »à qui sait comprendre peu de mots suffisent »….
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