Albert Camus disait, – alors qu’il subissait les attaques les plus ignobles de la part des « zintellectuels » germano-pratins, en raison de son refus de s’associer aux éloges du régime soviétique stalinien, qui, – pour les « penseurs » de cette époque , parmi lesquels Jean-Paul Sartre, représentait l’aboutissement de l’idéal socialiste -, que « Paris est une jungle et les fauves y sont miteux »….C’est un sujet que j’ai déjà évoqué dans de précédents billets. Cf :
https://berdepas.wordpress.com/2010/07/20/paris-est-une-jungle-et-les-fauves-sont-miteux/
Il faut dire que le futur Prix Nobel, était alors profondément atteint, moralement, par les attaques qu’il subissait, alors que venait de paraître « l’Homme Révolté », attaques venant d’une intelligentsia parisienne qui le soupçonnait de vouloir troubler les certitudes de ceux pour qui « les lendemains qui chantent » nourrissaient les espoirs d’un peuple de gauche séduit par le communisme en tant qu’aboutissement de l’idéal socialiste….
Je me passionnais déjà, à cette époque, pour ces débats qui allaient bien au-delà des confrontations littéraires car ils reflétaient, pour moi, l’état de délabrement de ce qui est devenu, peu à peu , la « pensée correcte » de notre époque.
Ceux qui s’opposaient alors à Camus n’avaient pas de mots assez durs pour qualifier celui qui refusait de hurler avec les loups.
Les mêmes, après avoir soutenu Staline, se distingueront dans la défense du Maoisme, avant d’applaudir à l’entrée de Pol Pot à Pnom Pen et à la victoire du Vietnam du Nord sur celui du Sud.
C’est l’époque de mes jeunes années, alors que le Parti Communiste et les idées qu’il transportait avec lui dans ses bagages, régnait sur les Lettres Françaises sur lesquelles pesait, déjà !!!, une forme de « terrorisme intellectuel » sournois.
Je crois me souvenir de l’épigraphe que Camus avait choisi pour son « Ni victimes ni bourreaux » paru en octobre 1946, empruntée à Pascal : « L’Inquisition et la Société sont les deux fléaux de la vérité. »
C’est l’époque où il était, déjà, de bon ton, dans les milieux intellectuels parisiens, de dénoncer « l’impérialisme américain » et le « colonialisme français », afin de détourner les regards de « l’Empire soviétique » dont il faudra attendre les révélations sur le Goulag, puis l’ascension de Gorbatchev et la chute du mur de Berlin, pour assister à l’effondrement de cet empire, ramenant la Russie dans les frontières héritées de l’époque des Tzars….
Je me permets ce petit retour en arrière pour raviver les mémoires de ceux qui n’étaient pas encore nés à cette époque, et pour montrer que la Gauche n’a jamais été en retard d’une « erreur »…. et que la déroute de ses idées a commencé il y a bien longtemps.
Cette Gauche-là a toujours été du côté de ceux qui tentaient d’affaiblir la France . Elle a été du côté des « porteurs de valises », légitimant ainsi le terrorisme aveugle du FLN et allant jusqu’à prendre les armes contre notre armée, en Algérie …
La « parenthèse gaulliste » l’a réduite , pendant un temps, à un silence relatif : elle a dû se contenter du combat contre « le coup d’Etat permanent », puis, contre les Institutions de la Vème République qui heurtaient son « idéal démocratique »et contrariait le résidu des nostalgiques de la IVème République privés du déficit d’autorité de l’Etat qui lui avait permis de prospérer….
La pseudo-révolution de Mai 1968, et la « chienlit » qui en résulta offrira à la Gauche, l’occasion de revenir sur le devant de la scène.
Sous l’influence d’une génération de « philosophes » d’inspiration marxiste tels que Herbert Marcuse et son « Homme unidimensionnel », ou de Louis Althusser figure de proue de l’Ecole Normale Supérieure de la Rue d’Ulm, toute une génération nouvelle d’intellectuels d’inspiration marxiste-léniniste va émerger.
Une partie de cette jeunesse, saisie de fascination pour les Che Guevara, Fidel Castro, Ho chi Minh, ou Mao Tse Toung, s’enflamme au sein de petits groupes parmi lesquels, anarchistes, ou situationnistes se laissent emporter par un invraisemblable délire utopique qui donnera naissance au mouvement libertaire ou inspiré par divers groupuscules maoïstes, trotskistes ou libertaires anti-léninistes….
De ce magma émergeront des personnages devenus des icônes de la gauche de la Gauche, tels que Serge July ou Daniel Cohn-Bendit sans parler des innombrables sous-marins qui par la suite ont noyauté les Partis de la mouvance gauchiste et que l’on retrouve aujourd’hui, dans les médias, dans la Haute Administration , jusque dans l’Education Nationale….
C’est l’époque du combat de nos « zintellectuels » issus de cette mouvance, en faveur de la libération sexuelle, pour la société des loisirs , pour le refus de toute autorité verticale. Ardents défenseurs d’un relativisme absolu, d’une pseudo-tolérance (il est interdit d’interdire), partisans de la dissolution de la cellule familiale, de la protection des minorités au nom des « droits de l’Autre », évoluant aux limites extrêmes de l’aveuglement… Ces idées inspirent encore, aujourd’hui quelques socialopithèques attardés, englués dans leur surprenant déni des réalités aux quelles les générations actuelles sont confrontées.
C’est à l’effritement, – pour ne pas parler d’effondrement -, de l’influence démesurée de ce microcosme intellectuel que nous assistons aujourd’hui. C’est ce qui explique le mieux, le profond désarroi de « la pensée de Gauche », dont le contenu n’est plus en phase avec notre époque. L’épisode du départ de Mme Taubira n’est qu’un avatar de cet effritement.
Sébastien Le Fol écrivait récemment dans un article blasphématoire paru dans « Le Point » que le philosophe Alain Badiou, qui fut, lui aussi un « ancien thuriféraire de Pol Pot et des Khmers rouges », et qui « pérennise la tradition de l’intellectuel aveuglé par l’idéologie et le totalitarisme » mériterait d’être écouté et lu « comme on regarde sidéré une image d’Epinal ». Sa vision du monde, qui inspire encore bien des agités de la gauche de la Gauche, selon Sébastien Le Fol, « relève d’un manichéisme archaïque : il hait l’Occident et son « libéralisme ».
Tout ce petit monde assiste, impuissant, à la « ringardisation » de ses idées qui, au fil du temps, se sont fracassées contre le mur de verre de la réalité d’un monde qui échappe à leurs rêves les plus fous.
Habitué à ce que ses idées soient l’objet d’un respect médiatique unanime car ne souffrant pas la moindre contestation, il ne sait plus débattre avec ceux qui ne les partagent pas. Il ne sait plus que recourir à l’invective, voire à l’insulte, et au mépris arrogant de tous ceux qui concourent à l’émergence d’un courant d’idées étouffé jusqu’ici, et qu’il qualifie de « néo-réactionnaire », en raison de « l’impertinence » de la critique qu’il développe sur leur conception d’une société libertaire, métissée, abreuvée de discours de repentance ( une notion que ces « zintellectuels » n’ont jamais songé à s’appliquer à eux-mêmes), une société dans laquelle les minorités les plus bruyantes font la Loi.
La repentance !!! Nos « zintellectuels »adorent ce concept dont ils accablent à coup d’accusations ceux qui n’ont jamais adhéré à leur perception de l’Histoire post-coloniale ni à leur « tiers-mondisme » refoulé. Un concept qu’ils feraient d’appliquer à eux-mêmes. Car on ne voit poindre dans leurs discours, aucune autocritique pour leurs « erreurs » historiques, aucun retour sur soi, ni aucune interrogation sur les cause d’un tel déclin de leurs idées, devenues, à leur tour « nauséabondes »….
Leur conception d’une « société nouvelle »dans laquelle le peuple français serait condamné à se dissoudre, est sèchement rejetée par les nouvelles générations de Français, convaincues de ce que la « société des loisirs » n’est pas pour demain, et de ce que, – devant la menace qui se profile contre son identité, son histoire, ses traditions, sa culture, son mode de vie -, les temps ne sont plus aux fadaises et aux rêveries utopiques, mais au retour au réalisme pragmatique, à l’esprit de résistance, et au refus du déni de réalité.
Il eût été inconcevable, il y a encore peu d’années, de voir le succès éditorial d’un pamphlet s’attaquant à la déconstruction de l’œuvre de Foucault, ce « saint philosophe » dont les « néo-réacs » dénoncent la « nocivité sociétale ». Foucault qui fut l’un des Grands Prêtres de la pensée gauchisante et qui prêcha « le refus des assignations sexuelles, les études de genre, la politisation du corps, la revanche des minorités, la déconstruction de la notion de déviance ».
Autant de concepts violemment combattus aujourd’hui par la « pensée réactionnaire ».
Le Monde publiait , il y a quelques jours, un article percutant du « philosophe » Daniel Lindberg:
Ce « philosophe », dont le visage exprime le mépris arrogant qui caractérise son espèce, avait déjà fait scandale, il y a quelques années en publiant « Enquête sur les nouveaux réactionnaires » ( Seuil, 2002 ), dans lequel il « dénonçait » l’émergence d’un groupe d’intellectuels, venus pour la plupart de l’extrême gauche, en train de « virer sa cuti » au nom de la « découverte du réel », et qui s’ éveillant avec une « gueule de bois post-utopique, s’attaquait aux poncifs de la société libertaire , ouverte et égalitaire, allant jusqu’à « défendre l’idée d’une guerre de civilisations qui opposerait l’Occident et- déjà- l’Islam.
Ce livre, prémonitoire n’avait vraisemblablement pas prévu qu’Alain Finkielkraut, ancien maoiste, devenu l’une de cibles préférées de l’intelligentsia gauchisante, serait accueilli – aujourd’hui même- avec les honneurs, à l’Académie Française !!!
On sait quel degré de détestation les thuriféraires de la Gauche archaïque vouent à Finkielkraut, ou à Michel Onfray. Ils n’ont pas de mots assez méprisants pour qualifier des écrivains à succès tels que Zemmour ou Houellebecq qui n’hésitent pas à tourner en dérision leurs pulsions utopiques.
Tout cela nous révèle le profond désarroi d’une génération de faux prophètes, qui, à travers une vision de la société à laquelle nous étions censés aspirer, projetaient leur problèmes personnels d’identité, leur incapacité à s’adapter à un monde dont la cruelle logique de compétition leur échappe, et qui voit, en France, comme partout en Europe, émerger une génération qui rejette les utopies au nom de l’affrontement au réel.
C’est ce que la Gauche, en perte de repères, redoutait le plus : la « droitisation de la société » qu’elle attribue à la dégradation de notre situation économique et à un chômage devenu endémique.
Son aveuglement l’empêche de voir que le courant de droitisation s’étend à toute l’Europe, y compris dans les pays où le réalisme économique l’a emporté sur l’utopisme, et qui ont, au prix de douloureux sacrifices que la Gauche française est incapable de concevoir, réussi à redresser leur situation jusqu’à frôler le plein emploi….
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Lorsque la perte de repère s’étend à la Gauche qui gouverne, et qui, sans se l’avouer ne voit d’autre issue à son salut, que d’aller piétiner les plates-bandes de la Droite, alors le désarroi du « peuple de Gauche » est à son comble….
« Si la gauche a encore l’air de mieux tenir le coup, c’est que ses principes fondamentaux et sentimentaux cadrent plus étroitement avec le programme hyperfestif; mais elle aussi s’affole : elle sait bien que sans la droite, sans l’ersatz de droite qui la fait exister en tant qu’ersatz de gauche, elle n’est plus grand-chose; et que la rupture d’équilibre peut être dramatique également pour elle. Va-t-elle même encore être longtemps « la gauche » sans son vieux complice de bonneteau? Elle a déjà tout oublié de son essence négatrice, jadis basée sur des hostilités de classes, au profit d’une inflation de morale et de vertuisme sans précédent. Elle a remplacé le matérialisme dialectique par la pratique du bien et substitué à la dictature du prolétariat le terrorisme des « valeurs ». Philippe Muray : « Après l’Histoire ».
Il fut un temps où le mot d’ordre était de « ne pas désespérer Billancourt ». Billancourt a disparu, du moins dans ce qu’a pu représenter cet euphémisme.
Aujourd’hui, c’est tout le peuple de Gauche qui est désespéré, alors que son élite intellectuelle ne sait plus sur quelle planète elle habite….
On comprend pourquoi Mme Taubira est partie sans laisser d’adresse, et sans rien révéler de ses « noirs » desseins !!!