
Dessin de Dilem, dessinateur algérien
Ceux qui naïvement, pensent que quelques gesticulations politiciennes bien orchestrées par les médias, suffiront à susciter l’apaisement dans les relations entre Français et Algériens, se trompent.
La condition première, pour construire les bases saines d’une réconciliation, entre l’Algérie et la France, c’est qu’enfin, alors que l’Algérie fête un demi-siècle d’indépendance, toute la vérité historique soit faite et soit dite de part et d’autre de la méditerrannée.
Car il est devenu inacceptable que les Gouvernements algériens successifs continuent d’entretenir, en instrumentalisant l’Histoire tragique de nos relations avec ce beau pays, un sentiment de haine revancharde vis à vis de la France, – sentiment qui n’est d’ailleurs pas partagé par tous les Algériens -, dans le seul but de détourner les esprits critiques, et il n’en manque pas en Algérie, de la dénonciation d’une gouvernance caractérisée par une corruption des élites, et par l’appauvrissement d’un peuple privé d’espoir et de liberté.
Il est inacceptable, côté algérien, que la plupart des jeunes ignorent tout de l’Histoire véritable de leur pays et qu’ils aient été convaincus que le destin de l’Algérie a basculé au moment de la colonisation et que ce pays n’est entré dans l’Histoire qu’en Juillet 1962.
Le quotidien El Watan organise à l’occasion du cinquantenaire de l’indépendance algérienne, une série de colloques passionnants, qui témoignent, enfin, d’un louable souci de faire émerger la Vérité.
Consulter à ce sujet:
http://www.elwatan.com//une/mattew-connelly-le-fln-a-lance-la-bataille-d-alger-pour-gagner-la-bataille-de-new-york-07-07-2012-177580_108.php
http://www.elwatan.com/actualite/sorties-de-guerre-une-sublime-consecration-et-un-passe-decompose-07-07-2012-177581_109.php
http://www.elwatan.com/actualite/le-fln-a-reinstaure-l-esprit-d-honneur-du-moussebel-07-07-2012-177582_109.php
Recevant chez moi, un couple de jeunes algériens en vacances en Espagne, j’ai été ahuri de découvrir qu’ils ignoraient tout du passé berbère de leur pays, et des 300 ans passés sous contrôle de l’Empire Ottoman, tout des activités barbaresques et esclavagistes de l’Algérie, à l’époque où ce pays n’avait pas encore de nom.
Découvrant ma bibliothèque, ils ont été « bluffés » par la profusion d’anciens ouvrages historiques dont ils ignoraient l’existence, et m’ont affirmé qu’il est difficile de se procurer, en Algérie, un ouvrage traitant de l’Histoire de ce pays avant la colonisation française: pour des gens qui avaient fait des études secondaires, ils ignoraient qui était Ibn Khaldoun, l’un des plus grands historiens du monde Arabe !!!
L’Histoire de la période coloniale a été instrumentalisée, tout comme celle des années de guerre, entre 1954 et 1962, et pas seulement par les Gouvernements algériens.
La vérité historique commence à peine à émerger en France, grâce au travail patient et discret de quelques jeunes chercheurs et de quelques universitaires, que nos médias ignorent superbement. Des historiens qui, n’ayant pas vécu cette période tragique de notre Histoire, sont dépouillés des « a-priori » idéologiques de leurs prédécesseurs, et sont aptes à porter sur elle un regard neutre, désengagé, et lucide car ils ont enfin accès à des documents jusqu’ici protégés par le secret…
Car, il faut le dire, de nombreux « intellectuels »marxistes français, et pas seulement des « porteurs de valises », avaient mis tous leurs espoirs sur l’indépendance algérienne, en rêvant faire de ce pays, après le « départ » des Français, un « laboratoire », et un « champ d’expérimentation » de leurs « fumeuses » théories marxistes-léninistes.
Ces « idiots utiles » comme les soviétiques eux-même les avaient surnommés, ont hélas partiellement réussi dans leur entreprise idéologique, en poussant les dirigeants algériens longtemps nourris au lait des pays sous contrôle soviétique, à la mise en oeuvre d’un modèle économique qui a conduit l’Algérie au bord du gouffre, celui-même dans lequel ont sombré la plupart des « pays de l’Est » avant la chute du mur de Berlin.
Beaucoup de « trotskystes » aujourd’hui « planqués » dans le paysage politique français, ont fait là-bas, leurs première armes d’agitateurs et d’apprentis révolutionnaires.« L’agité de la feuille » qu’est demeuré Edwy Plenel, créateur de Médiapart, en fit partie….
Soucieux, sans doute, de faire oublier leurs « exploits », ils contribuent à diffuser sur nos rapports avec l’Algérie une brume de contre-vérités, quand ce ne sont pas des mensonges, dont ils se servent, pour continuer à exister dans les débats sur la question algérienne.
A propos de « leurs exploits », je conseille la consultation de:
http://editionslibertalia.com/Algerie-les-annees-pieds-rouges.html
S’agissant de la période qui débute en 1954, et de la tragédie vécue par deux communautés qui jusque là cohabitaient tant bien que mal, – et dans mon souvenir personnel, plutôt bien-,les motivations ne manquent pas dans le personnel politique français, pour tenter d’instrumentaliser l’Histoire.
Les Socialistes, traînent derrière eux la culpabilité d’avoir , pendant trop longtemps, inspiré la politique coloniale de la France contestée alors par la Droite maurassiènne, politique menée au nom d’une prétendue « mission civilisatrice » dont il est facile de retrouver l’évocation dans les vieux manuels d’Histoire de notre « école laïque et républicaine ».
Les Gouverneurs Généraux de l’Algérie qui disposaient des pouvoirs les plus étendus, des pouvoirs de « pro-Consuls » de la République, étaient tous, de Yves Chataigneau à Robert Lacoste en passant par Marcel-Edmond Naegelen, des Socialistes. Il est difficile à ces mêmes socialistes, devant l’Histoire, de se retrancher derrière les pouvoirs et l’action rétrograde des dix mille « colons » d’Algérie, pour expliquer leur incapacité à impulser les réformes qui auraient pu changer le cours de l’Histoire.
Les mêmes Socialistes traînent également dérrière eux la responsabilité d’avoir déclaré la guerre à la rébellion. Ils ne peuvent, sans honte, se résoudre à assumer « l’oeuvre » de François Mitterrand, alors Ministre de l’Intérieur, pour qui « la France n’abandonnerait jamais l’Algérie », et fut l’ordonnateur des charrettes de guillotinés algériens qui pousseront le FLN à la vengeance, en engageant la bataille sur le terrain d’un terrorisme urbain en s’attaquant, aveuglément, avec des méthodes barbares aux populations civiles soumises au choc atroce des égorgements, à celui des bombes meurtrières, incitant l’armée française à une répression de plus en plus cruelle.
Ainsi s’est creusé, peu à peu, un fossé infranchissable entre les communautés, détruisant les affinités, les amitiés, les relations de fraternité qui existaient encore, entre de nombreux Algériens et Français.
Les Pieds Noirs n’oublieront jamais la honteuse manière dont ils ont été accueillis, au Port de Marseille, par le socialiste Gaston Deferre dont les mots sont gravés dans les mémoires de ceux qui ont vécu cette période. » Que les rats pas triés aillent au diable, et ne viennent surtout pas s’installer à Marseille »…
Les Gaullistes ont également cédé à la tentation de manipuler l’Histoire.
Ayant tout fait pour occulter le fait que « les massacres de Sétif » considérés par beaucoup comme le point de départ de la révolte algérienne, ont été commis sous le Gouvernement Provisoire de la République, présidé par le Général de Gaulle, entouré de Ministres Communistes, ils veulent faire oublier également, que le Général avait été appelé au pouvoir pour garder l’Algérie française, et qu’après avoir louvoyé pendant cinq ans, il a fini par octroyer aux Algériens une indépendance qu’ils avaient conquise bien plus sur le terrain diplomatique que sur le terrain militaire…..
Tous ces gens là ont de vrais problèmes avec la vérité historique. Ils ont tout fait pour « tirer la couverture de l’Histoire » à eux, en s’attribuant les beaux rôles et en chargeant la barque des Pieds-Noirs, boucs émissaires tout désignés…
Que l’indépendance de l’Algérie ait été une finalité inéluctable, cela ne fait aucun doute aujourd’hui.
Mais ce qui n’était pas inéluctable, ce sont les conditions dans lesquelles les Pieds Noirs ont dû quitter l’Algérie, et celles dans lesquelles, avec les quelques harkis qui ont pu échapper au massacre, ils ont été accueillis en France.
La touchante compassion médiatique qui entoure les immigrés clandestins d’aujourd’hui ne leur a pas été accordée à l’époque, et sur ce point l’OAS a bon dos….
Alors, avant de parler de réconciliation, il est indispensable de mettre fin à l’hémiplégie qui recouvre l’Histoire des relations entre ces deux nations.
Il faut mettre fin à une vision simpliste et caricaturale de la guerre d’Algérie, que les médias des deux bords de la Méditerranée ont contribué à diffuser.
Certes, il faut reconnaître que la torture a existé, mais comme une réponse barbare à des actes de barbarie, et que si les méthodes de l’armée françaises ont été parfois très brutales, tous les soldats français n’ont pas été des tortionnaires.
Il faut reconnaître qu’ il y avait dans l’Algérie française des injustices criantes, des situations humiliantes, une administration aveugle, des égoïsmes forcenés.
Il faut cesser d’entretenir le mythe d’une population européenne de « colons » profiteurs, et de feindre d’ignorer que les Pieds-Noirs étaient, dans leur grande majorité des petites gens, dont le niveau de vie, s’il était, en général, supérieur à celui de la masse des musulmans, il était en moyenne, inférieur à celui de la population française.
Il faut admettre que beaucoup d’ Algériens aspiraient à la souveraineté mais qu’ à l’instar de Ferhat Abbas , ils ont longtemps hésité entre le combat pour l’intégration et celui pour l’indépendance. Sans parler de ceux qui redoutaient un départ des Français, et qui ont souvent payé de leur vie, leur attachement à la France…
Il est vrai que l’OAS a commis des crimes. Adversaire de la « culture de l’excuse », je ne cherche pas à les excuser.
Mais si l’OAS a pu exister, c’est que le terreau lui était favorable: amertume des militaires qui se sentaient, une fois de plus, floués par le cynisme des politiques, et désespoir des Pieds Noirs qui se sont sentis abandonnés par une France jugée ingrate, et qui n’a jamais reconnu les sacrifices qu’ils avaient consentis pour elle lors de deux guerres où , en proportion de la population qu’ils représentaient, ils ont eu plus de morts que n’en a connu la population française entière.
Mais les brutalités de l’armée française et les folies de l’OAS ne transforment pas pour autant, les combattants du FLN en « douces colombes ». Il n’y a pas eu comme la légende officielle algérienne a cherché à l’établir, d’un côté des héros et de l’autre des tortionnaires et des assassins.
Le FLN a imposé sa loi par la persuasion, certes, mais aussi par la terreur, liquidant systématiquement, et avec une brutalité inouie, ceux des Algériens qui n’étaient pas dans sa ligne, et pas seulement les partisans de Messali Hadj.
Il a pratiqué un terrorisme aveugle qui a douloureusement atteint et marqué les populations civiles, faisant bien plus de victimes chez les « musulmans », – comme on disait à l’époque -, que chez les « européens ».
Les Algériens savent maintenant, depuis la guerre civile qui les a déchirés, dans « les années du F.I.S », ce qu’est l’horreur de pratiques qui n’ont rien à voir avec des méthodes de guerre…..
Mais le FLN a surtout mis en place le système totalitaire qui allait enserrer l’Algérie indépendante dans un carcan sclérosant, aggravé par une « police de la mémoire collective », au profit d’une caste prédatrice, toujours au pouvoir aujourd’hui, un pouvoir gérontocratrique qui s’appuie sur une police politique et des services secrets d’une redoutable efficacité bâtie sur les méthodes en usage dans « les pays de l’Est » et inspirées du KGB soviétique.
On sait que les mythes fondateurs d’une nation prennent parfois quelques libertés avec la vérité historique. L’Histoire de France en offre de nombreux exemples.
Il serait temps que l’Algérie et la France se débarassent des scories d’une histoire tumultueuse pour se consacrer, enfin, aux choses sérieuses : la construction d’un avenir commun tenant compte d’une réalité incontournable: l’Algérie algérienne appartient désormais aux Algériens, et la France aux Français.
L’Algérie souveraine ne regarde plus seulement en direction de la France. Et la France se tourne résolument vers l’Europe.
Mais cela n’exclue pas le partage d’un riche passé de souvenirs communs, d’un patrimoine commun de culture malgré les efforts commis par ceux qui, en Algérie, ont rêvé d’effacer la langue française de la mémoire des jeunes générations.
Et nous avons en commun un amour sincère de cette terre, sur laquelle nos ancêtres ont laissé leur sueur et leur sang.
Il serait temps que de part et d’autres de la Méditerranée, on puisse se parler franchement, sans haine et dans le respect mutuel.
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