Pour 76% des Français, il existe bien une identité nationale française (sondage)
Selon « lemonde.fr » (AFP – 5.02.2010.-16h33.

Une écrasante majorité de Français (76%) pensent qu’il existe une « identité nationale française » et 74% se disent « fiers » d’être Français, selon un sondage TNS Sofres pour le ministère de l’Immigration présenté vendredi.
L’enquête reprend les questions posées par le ministère dans le cadre du « grand débat sur l’identité nationale » lancé le 2 novembre par le ministre de l’Immigration Eric Besson. Elle a été présentée lors d’une conférence de presse par Brice Teinturier, directeur chez TNS Sofres, et par M. Besson.
A la question « existe-t-il à vos yeux une identité française? », 33% répondent « oui, tout à fait » et 43% « oui, plutôt ». Ils sont 19% à répondre « non pas vraiment » et 4% « non pas du tout ». 1% n’ont pas d’opinion.
36% des personnes interrogées sont « très fiers » d’être Français », 38% sont « assez fiers », 24% « pas spécialement fiers » et 2% « pas fiers du tout ».
Ils sont aussi 29% à se dire « Français uniquement », 42% « Français et citoyen de l’Union européenne », 18% « citoyen du monde », 5% « à la fois Français et d’un autre pays ».
Pour 65%, l’identité française a tendance à « s’affaiblir » en raison de la perte des valeurs (29%), de l’immigration (25%), pour des raisons politiques (18%), de la diversité culturelle et ethnique (18%) et de la religion (6%).
Les résultats de ce sondage sont significatifs, et rassurants, mais ne sont pas surprenants.
A l’écoute de tout le vacarme organisé autour de ce débat, on pouvait, pourtant, se poser quelques questions.
La première question que je me suis posée est la suivante:
– Pour quelles raisons ce débat a-t-il soulevé une telle levée de boucliers et déchaîné une telle violence verbale ???
La réponse se trouve, en partie dans les résultats de ce sondage. Il fait clairement apparaître qu’il existe, en France, une minorité de Français, représentant environ le quart de la population (19% + 4%) qui considèrent qu’il n’y a pas (ou qu’il n’y a plus ???) d’identité française.
On retrouve la même proportion chez nos compatriotes qui « ne sont pas spécialement fiers d’être Français » et même une infime proportion (2%) qui « ne sont pas fiers du tout ».
Dans une proportion identique, 18% de Français semblent « ne plus se sentir français » et appartenir à la « catégorie » des « citoyens du monde », et 5% se sentent « à la fois Français et citoyens d’un autre pays ».
Pour avoir écouté de nombreux débats à la radio, pour avoir regardé plusieurs émissions de télé consacrées à des débats passionnés sur l’opportunité de ce débat, pour avoir relevé une foule de réactions individuelles, dans la Presse ( Le Monde y a consacré de nombreuses pages ) et sur internet, je comprends mieux, grâce à ce sondage l’angoisse qui a saisi cette fraction minoritaire de la population,- qui a du mal à surmonter une contradiction intérieure troublante -, de se voir exclue , au moins virtuellement, des avantages de la nationalité française, avantages que la République consent , souvent sans exiger de contrepartie, même à ceux de nos concitoyens qui s’en excluent volontairement.
La République ayant pour tradition, l’usage de donner , une large place à l’expression des opinions minoritaires au nom des valeurs démocratiques, cette minorité là s’est emparée de l’opportunité offerte par le « débat sur le débat », pour faire entendre sa voix, le plus souvent à coup de vociférations et d’invectives dont la violence ne fait que trahir la profondeur de l’angoisse.
Car, dans ce pays béni des Dieux, ceux que l’on entend le plus, ce sont ceux qui crient le plus fort, et qui veulent imposer leur point de vue à la majorité silencieuse.
Ainsi, donc, environ un Français sur quatre ne se sent pas profondément enraciné dans une identité qu’il semble rejeter.
Cela pose un vrai problème à la République, et cela suffirait à justifier, ce débat, ne serait-ce que pour comprendre les raisons qui poussent ces Français à demeurer « à la marge », et pour trouver des remèdes afin de les aider à sortir de cette « auto-exclusion ».
– La seconde question que m’ont inspiré les réponses à ce sondage est donc : comment « réintégrer » dans la République ces Français à l’identité mal définie ???
En d’autres termes, comment faire aimer la France, c’est à dire son Histoire, sa Culture, sa Langue, ses valeurs, ses traditions, ses usages, son art de vivre, sa gastronomie, son mode de vie en société, ses paysages, la silhouette de ses villages, à une minorité qui se sent étrangère à tout ce qui constitue le ciment de la Nation ???
Et surtout, cet « apprentissage » des « droits et des devoirs », en même temps que cette connaissance indispensable de ce qu’est la France, dans la profondeur de ses racines, où doit-il s’accomplir, si ce n’est en premier lieu, à l’école, sur les bancs de la République.
Mais cette interrogation en suscite une autre: ceux qui ont en charge de transmettre cette connaissance sont-ils habités par le vrai désir de « faire aimer la France » ??? Et leur parole est-elle en mesure d’être entendue dans le brouhaha de salles de classes dans lesquelles une majorité d’élèves, imprégnée de traditions et de préjugés issus d’un milieu familial, lui-même en mal d’intégration, conteste et même parfois rejette le principe même de cet apprentissage.
Comment imprégner comme nous l’avons été , ces « jeunes » qui se considèrent comme « stigmatisés » dès que l’on aborde l’Histoire à travers Clovis, Bayard ou Charles Martel, et qui considèrent qu’un poème de Lamartine, c’est de la « bouillie pour les chats »….
C’est sans doute parce que les Français sont inquiets de voir se multiplier des signes concordants de refus d’intégration chez de nombreux immigrés, que l’on a assisté à quelques « dérapages » verbaux au cours du débat si souvent incriminé.
Car ce débat a, en quelque sorte, libéré la parole, chez ceux qui depuis longtemps se sentaient enfermés, et prisonniers du silence qui leur était imposé, sous peine de s’entendre traités de toutes sortes de qualificatifs par une minorité qui, pour des raisons obscures, cherche à occulter des réalités qui sautent aux yeux de tous en organisant une opacité hostile autour de tout ce qui touche aux difficultés d’une difficile intégration….
Le débat récurrent sur l’opportunité de développer les outils permettant d’avoir une connaissance statistique des flux d’immigration en même temps que des progrès réalisés en matière d’intégration est tout à fait symbolique de cette attitude de refus de voir, de connaître, et de révéler ces mêmes réalités.
Le voile que l’on tente de jeter sur ces réalités entretient le scepticisme à l’égard des intentions de ceux qui se sont imposés comme les « chantres angéliques des vertus de l’immigration ». Il ouvre la voie à toutes sortes de fantasmes qui nourrissent l’imaginaire de ceux qui, au contraire, pensent que la France est en train de « perdre son âme » en ouvrant ses portes à tout vent, ce dont « profitent » des populations qui viennent chez nous, non « pas pour travailler », mais pour « s’approprier une part des richesses produites » par « ceux qui travaillent ».
Les « dérapages » dénoncés à l’occasion de ce débat ne sont rien d’autre que l’expression d’une angoisse et des doutes de certains de nos compatriotes. Et l’on ne voit pas pourquoi cette angoisse et ces doutes ne seraient pas tout aussi respectables que l’angoisse de ceux qui craignent d’être des exclus de la nation.
En outre, ce qui ressort de ce sondage, c’est que le sentiment d’appartenance à l’Europe, en tant que citoyen, n’a pas tué le sentiment d’appartenance à la Nation française. Ces deux sentiments s’additionnent mais ne s’annulent pas.
Pour vivre éloigné de la France, chez son voisin espagnol, je puis témoigner – et je ne serais pas le seul- du fait que pour les Espagnols, il existe une « identité française » à l’égard de laquelle ils éprouvent des sentiments mêlés. Et pour être entouré de Belges, d’Anglais, d’Allemands et de bien d’autres nationaux, je puis certifier que chez chacun d’eux, il existe un sentiment très prononcé d’appartenance à une identité spécifique.
Mais à la différence des Français, cette affaire d’identité ne fait pas débat chez nos voisins.
Ce qui semblerait signifier que le débat républicain, fait partie de l’identité française, et ce qui fait craindre que l’une des valeurs fondamentales de la République soit menacée, c’est qu’en France, le débat contradictoire a disparu des mœurs politiques, et se trouve remplacé, peu à peu , par l’invective outrancière ou par le mépris.
L’identité française est devenue insondable, car même les sondages qui tentent d’apporter un éclairage sur cette notion abstraite, sont devenus suspects aux yeux de ceux qui redoutent d’avoir à maîtriser leurs réflexes d’agressivité à l’égard de ceux qui n’ont pas la même perception qu’eux, et à vaincre leur difficulté de demeurer sur le terrain de l’affrontement des idées.
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