Trotsky trotte encore…


Trotsky

… dans les allées du Pouvoir.

On ne peut pas comprendre ce qui mine la République, de l’intérieur, sans ouvrir les yeux sur ce phénomène discret, sournois, actif et redoutablement efficace qu’est la présence trotskyste dans tous les rouages de l’Etat.

Ce n’est pas la première fois que j’évoque ce sujet que l’on aurait tort de considérer avec légèreté, comme s’il s’agissait d’un pur fantasme, une sorte d’obsession maladive de quelques maniaques de l’occultisme en politique.

Il y a déjà quelques années, je l’évoquais déjà dans un article, sur ce blog, qui m’avait valu une avalanche de commentaires et de mails de toutes opinions, les plus nombreux et les plus virulents émanant de Communistes ou d’anciens staliniens exprimant leur haine de ces trotskystes considérés comme des traîtres à leur cause.

Ce n’est pas pour rien que Staline poursuivit Trotsky de sa haine personnelle, jusqu’à la mort de ce concurrent redoutable qu’il fit assassiner au fin fond de l’Amérique latine !!!!

https://berdepas.wordpress.com/2010/07/18/trotski-nest-pas-mort-il-bouge-encore/

Dans cet article, très documenté, je levais un coin de voile sur les activités de ce qui est bien plus qu’un « groupuscule », présent dans toutes les allées du pouvoir républicain….

Le pouvoir ne se conçoit pas sans la maîtrise de réseaux discrets. Les réseaux maçonniques font les « marronniers » de la Presse hebdomadaire qui régulièrement, publie des articles dont les « révélations » sont destinées à exciter la curiosité du lecteur, et plus souvent encore, à l’enfumer…

Mais il est rare qu’un hebdomadaire de grande diffusion consacre à un sujet considéré à plus ou moins juste titre comme un sujet « sulfureux », un article aussi complet que celui que publie « Le Point » de cette semaine, et qui montre que les « trotskystes », aujourd’hui, sont partout, dans les allées du pouvoir, dans les médias, dans le show-business, et notamment dans les lieux où ils peuvent avoir une influence sur l’opinion.

http://www.lepoint.fr/politique/dray-jospin-cambadelis-leurs-annees-trotski-14-05-2015-1928400_20.php

Cet article mérite d’être lu, car, c’est en grande partie à ces anciens militants, – dont quelques noms célèbres, mais méconnus du grand public, nous sont « révélés » par « Le Point » -, que nous devons la substance de ce qui est devenu, chez nous, le « prêt-à-penser » contemporain.

racism-trotsky

Certes, chez la plupart d’entre eux, l’ardeur révolutionnaire a laissé sa place à un désir de conquête des « bonnes places » dans la République, celles où, précisément, on peut jouir de tous les bienfaits de cette « société bourgeoise » qu’on a rêvé, dans sa jeunesse, d’abattre par la révolution silencieuse…

Mais ils sont là. Parmi les « zélites » de la République… Ils se reconnaissent, se soutiennent, et sont, – pour la plupart d’entre eux -, restés idéologiquement fidèles à leur jeunesse romantique.

Le Parti Communiste recrute traditionnellement dans la clientèle des ouvriers, alors que le Trotskysme s’adresse plutôt aux « zintellectuels » dont il se sert, comme des « idiots utiles », pour faire passer son message.

On a pu dire que la France était traversée ( coupée en deux ???) par deux courants d’idées opposés : le  » trotskisme culturel « , qui, avec le « péguysme », son opposé, aurait contribué à structurer la vie démocratique française.

On ne peut pas comprendre certains discours, certaines postures, certaines réactions des médias, certains blocages, certaines haines qui de temps à autres parcourent, comme un frisson, une République sortie des « Lumières » pour mieux aveugler le peuple, ce peuple dont elle craint les éclairs subits de lucidité, et que l’on tente de maintenir à un certain niveau d’ignorance, pour mieux le « gouverner ».

PS: Pour ceux de mes lecteurs qui en auront la curiosité, ou qui souhaitent en savoir plus sur le personnage « romantico-révolutionnaire » de Trotski, et qui seraient intéressés par la présence, les objectifs et l’action des trotskistes en France, je recommande l’écoute ou la lecture du texte de la remarquable communication de l’Historien  et Politologue André Lazar, devant l’Académie des Sciences Morales et Politiques, au cours d’une séance présidée par l’Historien Leroy-Ladurie.

http://www.canalacademie.com/ida125-Trotsky-les-Trotskistes-et-la.html

Passionnant !!!!

L’Algérie et Tocqueville, un soir….


Dans la soirée, le ciel a retrouvé son manteau bleu de nuit , constellé d’étoiles. Il est bientôt minuit. Après être sorti pour respirer l’air embaumé par la pluie de ces derniers jours, l’odeur de terre mouillée, et les effluves de thym, de jasmin, et de « galan de noche », je vais pouvoir rentrer et me consacrer, comme chaque nuit, à la lecture.

C’est un moment de paix que m’offre le calme, enfin revenu, de la nuit. Une paix favorable à la concentration et à la réflexion.

Je termine le dernier chapitre de  « Sur l’Algérie » de Tocqueville. Un auteur dont la lecture semble passée de mode. Et pourtant, cet esprit éclairé a probablement inspiré les idées de son temps, bien plus que d’autres penseurs auquel la tradition historique a donné une plus grande place que celle qu’il occupe dans la mémoire collective des Français.

Lorsque Tocqueville se rend pour la première fois en Algérie, en 1841, la France s’est engagée dans un processus de conquête vigoureusement contesté par la Droite qui exige le retrait des troupes françaises une fois accomplie la mission qui consistait à neutraliser Alger, devenue le foyer principal de la piraterie qui sévissait depuis trois siècles et demi en Méditerranée.

Mais il existe également d’autres courants d’opinion, divisés entre le souhait de s’en tenir à une occupation limitée, destinée à prévenir le retour des « barbaresques », et celui de poursuivre la conquête jusqu’à la domination totale et la colonisation, au nom de « la mission civilisatrice de la France ».

Tocqueville qui avait acquis une notoriété qui dépassait les frontières de notre pays, grâce à son oeuvre d’historien et de « sociologue » ( le mot n’existait pas encore à l’époque ), et à ses recherches sur l’origine des Institutions Politiques, est nommé membre d’une Commission d’enquête destinée à « éclairer » le débat politique sur l’Algérie. Il parcourt ce pays pendant cinq ans, de 1841 à 1846.

L’ouvrage « Sur l’Algérie » est en quelque sorte le résultat de cette enquête très fouillée et très documentée.

Il est révélateur des hésitations et des tâtonnements de la politique française. La « conquête » de l’Algérie doit évidemment, être replacée dans le contexte de son époque, ce que ne font pas nos « historiens de pacotille » contemporains, sans doute pour des raisons idéologiques, mais aussi par paresse intellectuelle.

On oublie volontiers aujourd’hui, pour accabler la France, que l’époque à laquelle Tocqueville s’intéresse est celle de la rivalité entre les « grandes nations »européennes, comme l’Angleterre, la France, l’Allemagne, l’Italie, mais aussi américaines, car les Etats-Unis ont été très actifs en tant que nation colonisatrice, même s’ils ont eu au XXème siècle, l’habileté de prendre la tête du combat pour la « décolonisation », notamment en Afrique.

On oublie volontiers que certaines nations indiennes d’Amérique du Nord, tels les Creeks, les Cheyennes, les Séminoles, ont été déportées ou exterminées, on estime à 4 millions le nombre d’Indiens directement victimes de la phase d’expansion coloniale des États-Unis de la côte est à la côte ouest au cours des XVIIIe et XIXe siècles.

On oublie volontiers, également, le sort réservé aux aborigènes d’Australie, de même que celui infligé aux noirs, en Afrique du Sud, à la même époque.

L’ouvrage de Tocqueville met en relief les atermoiements de la politique coloniale de la France, qui semble avoir été entraînée dans une guerre de conquête sans fin, hésitant constamment entre condamner les Algériens à la soumission, ou les amener à accepter la domination française, par les mêmes méthodes que celles qui avaient permis aux Turcs de se maintenir en maîtres de ces territoires pendant trois cents ans. Je le cite:

 » Depuis trois cents ans que les Arabes qui habitent l’Algérie étaient soumis aux Turcs, ils avaient entièrement perdu l’habitude de se gouverner eux-mêmes; ( page 47 ).

« Les Turcs avaient éloigné l’aristocratie religieuse des Arabes des l’usage des armes et de la direction des affaires publiques. » ( page 48 ).

 » Le Gouvernement turc détruit, sans que rien le remplaçât, le pays, qui ne pouvait pas encore se diriger lui-même, tomba dans une effroyable anarchie. Toutes les tribus se précipitèrent les unes contre les autres dans une immense confusion, le brigandage s’organisa de toutes parts. L’ombre même de la Justice disparut et chacun eût recours à la force »(ibid.).

Et plus loin,

 » On ne fait point impunément du nouveau en fait de coutumes politiques. Nous sommes plus éclairés que les Arabes, c’est à nous de plier, jusqu’à un certain point à leurs habitudes et à leurs préjugés. En Algérie comme ailleurs, la grande affaire d’un gouvernement nouveau n’est pas de créer ce qui n’existe point mais d’utiliser ce qui est.

Les Arabes vivaient en tribus il y a deux mille ans dans le Yemen; ils ont traversé l’Afrique et ont envahi l’Espagne en tribus, ils vivent encore de la même manière de nos jours. L’organisation par tribus, qui est la plus tenace de toutes les institutions humaines, ne saurait donc leur être enlevée d’ici à longtemps sans bouleverser tous leurs sentiments et toutes leurs idées. Les Arabes nomment eux-mêmes leurs chefs, il faut leur conserver ce privilège. Ils ont une aristocratie militaire et religieuse, il ne faut point chercher à la détruire, mais à s’en emparer et à en prendre une partie à notre solde ainsi que le faisaient les Turcs.

Non seulement il est utile de tirer parti des coutumes politiques des Arabes, mais il est nécessaire de ne modifier que peu à peu les règles de leur droit civil. Car vous saurez, Monsieur, que la plupart de ces règles sont tracées dans le Coran, de telle sorte que chez les Musulmans, la loi civile et le loi religieuse se confondent sans cesse. »(Pages 55 et 56 ).

Plus loin, Tocqueville met en évidence « l’excessive centralisation des pouvoirs de décision à Paris, pour tout ce qui concernait les « affaires algériennes ». Il note ( page 210 ) « qu’on ne saurait acheter ni louer un mètre du sol algérien, sans une longue instruction , qui ne se termine qu’après avoir abouti à M. le Ministre de la Guerre ».

Auparavant, il avait observé, ( page 73 ) que « les fonctionnaires civils placés entre les coups d’état du pouvoir militaire et l’arbitraire mille fois plus écrasant de l’autorité centrale, ne se sentent en rien, n’ont aucun lien commun, ne songent à rien qu’à rentrer au plus vite en France ».

Le rapport de Tocqueville foisonne d’observations pertinentes, sur les relations avec les populations arabes, sur les erreurs de l’Administration française, à l’aube d’un période coloniale qui allait durer cent trente ans.

Sa lecture intéresserait certainement les Algériens d’aujourd’hui, qui connaissent si peu leur histoire, ainsi que les premières pages de notre histoire commune.

L’objectivité de Tocqueville, sa clairvoyance, ses recommandations empreintes d’un humanisme éclairé ont été bien trop négligées par la France. Cette ignorance des réalités algériennes allait devenir, très vite, la source d’un malentendu tragique entre deux peuples qui n’ont pas pu, ou su, réciproquement, s’apprécier pour pouvoir continuer à vivre ensemble.

Tocqueville. « Lettre sur l’Algérie ». Editions Flammarion. 2003.

Alger, la « nostalgérie » 2.


Algérie revenezDessin de l’humoriste algérien Diem
« Je n’ai jamais pu renoncer à la lumière, au bonheur d’être, à la vie libre où j’ai grandi. Mais bien que cette nostalgie explique beaucoup de mes erreurs et de mes fautes, elle m’a aidé sans doute à mieux comprendre mon métier, elle m’aide encore à me tenir, aveuglément, auprès de tous ces hommes silencieux qui ne supportent plus dans le monde la vie qui leur est faite que par le souvenir ou le retour de brefs et libres bonheurs.«   Albert Camus, Prix Nobel de littérature. 1957.

La nostalgie est un état dont on ne guérit pas. Elle vous poursuit, pour resurgir dans les circonstances et les moments les plus inattendus. Il suffit d’un mot, d’une image, de quelques notes de musique pour que s’entre-ouvre la porte de vos souvenirs, même ceux que vous avez réussi à chasser ou à enfouir sous les décombres de votre passé.
 
L’Algérie, c’est trente ans de ma vie. Des souvenirs par milliers que les circonstances et l’exil m’ont incité à refouler, pour tourner la page.
Au soir de ma vie, il m’arrive d’y repenser. De plus en plus souvent. Je n’ai plus de raison, aujourd’hui, de refouler ce passé. Bien au contraire, je reprends plaisir à renouer avec lui, en retrouvant , dans la Presse francophone algérienne, des noms de lieux familiers. Je m’intéresse à l’actualité de ce pays que je n’ai jamais pu considérer, malgré les évènements tragiques que j’y ai vécu, comme un pays étranger.
Comment le pourrais-je alors que sur cette terre reposent trois générations de mes ancêtres ???
 
Mes souvenirs de jeunesse, je les ai évoqués – en partie – dans de nombreux billets sur ce blog. Des billets que j’ai regroupés sous le titre de « Algérie. O tempora. O mores » ( autre temps, autres moeurs). Ce sont les souvenirs d’une jeunesse pauvre mais heureuse.
 
Et pourtant, de l’Algérie qui hante mes souvenirs, je ne parle que très rarement autour de moi. A quoi bon ??? Entre la réalité telle que je l’ai vécue , et la perception qu’en auraient mes interlocuteurs, faussée par des années de contre-vérités répandues de chaque côté de la Méditerranée,  il y a un tel fossé….
Alors, je m’impose le silence. Car je ne me sens pas capable de rendre compte de la complexité des rapports qui existaient entre Arabes et « Européens », avant que les deux communautés ne se déchirent et soient séparées par la méfiance, avant de sombrer dans le ressentiment suscité par un terrorisme aveugle et par la répression qu’il a engendrée.
Mais, la « nostalgérie » n’est pas un sentiment réservé à ceux qui, comme moi, ont « refait leur vie ailleurs »en tournant le dos à leurs racines.
Il m’arrive, de plus en plus fréquemment, de trouver, dans la littérature francophone algérienne, des traces d’une même nostalgie de l’autre côté de la Méditerranée, et curieusement parmi la jeunesse de ce pays. La Presse algérienne s’en fait l’écho, de temps à autres.
J’avais évoqué dans un précédent billet, un texte paru dans un journal d’Alger qui traduit les sentiments d’un Algérien, de retour dans un Alger qu’il ne reconnaît plus:
Il est fréquent de rencontrer sur internet des sites où de jeunes Algériens s’efforcent de reconstituer un passé au mieux dénaturé, au pire occulté par le pouvoir en place. Il y a chez les nouvelles générations de ce pays une touchante curiosité à l’égard de ce qu’était l’Algérie « du temps des Français ». Cela peut surprendre, mais cela montre aussi qu’avec le recul, l’Histoire, – la vraie -, retrouve sa place dans la mémoire des hommes, dépouillée des scories que tant d’historiens de pacotille y ont introduit, pour assouvir leurs fureurs idéologiques….Rendez-vous sur cette adresse et cliquez sur « Photos », et surtout, attardez-vos à parcourir les « Commentaires »:
Vous serez surpris par le ton de certains commentaires, et par la nostalgie de ceux qui collectionnent les images « d’Alger autrefois »….
Dans un numéro récent d’El Watan, quotidien francophone algérien que je lis régulièrement on peut lire ceci:
Je cite ( extrait ):  » ….. Or, une partie de la génération des Algériens de l’époque coloniale n’est plus et l’autre partie n’a pas accès au Net. Cet engouement est dû, à mon avis, au fait que pour les Algériens le passé colonial et lié tout de suite avec les images de la guerre de libération. Beaucoup ignorent que notre passé ne se limite pas à la Révolution de 1954 avec les images de la guerre. Il y avait autre chose aussi. Les gens vivaient, fêtaient des mariages, allaient au cinéma, à la plage ou au théâtre. Il y avait une vie culturelle, sportive et artistique. Mahieddine Bachtarzi, Maâlma Yamna, El Anka, Hadj M’rizek avait bien un public. C’est ce côté de l’histoire de notre pays dont les médias lourds (TV et radio) ont complètement occulté que je voulais montrer.» Hassene Zerkine, grand collectionneur de cartes postales anciennes, dont la fille gère une page sur Facebook, souligne qu’à l’origine sa collection visait à préserver les traces iconographiques de l’Algérie.
«Lorsque j’ai commencé la collection il y a quarante ans, je n’avais pas d’autres préjugés et j’étais loin des questions que se posent maintenant les jeunes Algériens», explique-t-il. Et de poursuivre : «A lire les commentaires des internautes, nous retenons la classique nostalgie du passé avec, pour nous, l’intervention de la situation dégradée de l’environnement et de l’insalubrité qui règne dans l’Algérie indépendante. La nostalgie serait celle de l’ordre et de la propreté coloniaux imprégnés de mythes et de la propagande de l’époque qui rendait Wahran ‘‘Bahia’’ et Annaba ‘‘Coquette’’.»
Hassene Zerkine s’étonne du fait que les jeunes Algériens en viennent à «idéaliser» la période coloniale dépassant le but des photographes de la colonisation qui avaient pour objectif de mettre en avant le progrès et la civilisation apportés par la France. ( Fin de citation ).
Les Commentaires sur cet article sont tout aussi intéressants.
Comment ne pas le percevoir dans certaines de ces réactions : les Algériens ne sont pas heureux dans l’Algérie d’aujourd’hui.
S’ils l’étaient, comment expliquer leur désir de quitter, par tous les moyens, un si beau pays, parfois au péril de leur vie ??? Et comment expliquer que malgré les souvenirs d’une guerre qui fut atroce, ils soient si nombreux à se tourner vers la France, qu’ils voient comme un « eldorado »??? On dit qu’à Alger, il y a ceux dont les paraboles sont tournées vers l’Orient pour écouter les prêches des Imams du Golfe, et ceux qui, avec une ingéniosité surprenante, parviennent à capter le programmes de la télévision française et les chaines de Canal Sat.
L’Histoire triomphera. Mais la « grande Histoire », pas celle revue et corrigée par quelques historiens « trotskystes » qui avaient rêvé, une fois la France chassée de ce pays où mes ancêtres ont laissé tant de sueurs et de souffrances, « ils » pourraient, enfin, installer la « Démocratie Populaire » de leurs rêves. On sait où les illusions du « socialisme démocratique » ont conduit ce pays.
La légende veut que Boumédiene, dans un lapsus devenu célèbre ait prononcé ces mots:  » La colonisation avait conduit l’Algérie au bord du gouffre. Avec l’Indépendance nous avons fait un bond en avant »…..
De chaque côté de la Méditerranée, on a les « héros »que l’on mérite, que la légende fabrique, et que de pseudo-historiens entretiennent….
Pour mémoire:

Commémoration.


Aux mortsCette année, on « commémore ». On « commémore » même beaucoup. Histoire, peut-être, de ne pas oublier complètement notre Histoire, si mal traitée dans les Lycées et les Collèges…..

De mon temps – (voilà que je m’exprime comme ma Grand mère. Pardonnez-moi, mais c’est l’âge…) – on entretenait la mémoire de la jeunesse en lui parlant, avec amour, de l’Histoire de France. On lui enseignait le respect de ceux qui avaient fait don de leur vie à la France.

Et pour entretenir notre mémoire on nous faisait apprendre, par coeur, de beaux textes dont certains se sont imprimés dans la mienne. Le texte qui suit, je me souviens l’avoir récité, en coeur, à l’unisson, avec toute la classe, debout, comme dans une prière, le 11 Novembre 1945… J’avais douze ans.

Je suis encore capable de réciter, de mémoire, les deux premières strophes de ce superbe poème de Victor Hugo, que je dédie, en ce jour de commémoration, à tous ceux qui sont « Morts pour la Patrie ».

Ceux qui pieusement sont morts pour la patrie
Ont droit qu’à leur cercueil la foule vienne et prie.
Entre les plus beaux noms leur nom est le plus beau.
Toute gloire près d’eux passe et tombe éphémère ;
Et, comme ferait une mère,
La voix d’un peuple entier les berce en leur tombeau !

Gloire à notre France éternelle !
Gloire à ceux qui sont morts pour elle !
Aux martyrs ! aux vaillants ! aux forts !
À ceux qu’enflamme leur exemple,
Qui veulent place dans le temple,
Et qui mourront comme ils sont morts !

C’est pour ces morts, dont l’ombre est ici bienvenue,
Que le haut Panthéon élève dans la nue,
Au-dessus de Paris, la ville aux mille tours,
La reine de nos Tyrs et de nos Babylones,
Cette couronne de colonnes
Que le soleil levant redore tous les jours !

Gloire à notre France éternelle !
Gloire à ceux qui sont morts pour elle !
Aux martyrs ! aux vaillants ! aux forts !
À ceux qu’enflamme leur exemple,
Qui veulent place dans le temple,
Et qui mourront comme ils sont morts !

Ainsi, quand de tels morts sont couchés dans la tombe,
En vain l’oubli, nuit sombre où va tout ce qui tombe,
Passe sur leur sépulcre où nous nous inclinons ;
Chaque jour, pour eux seuls se levant plus fidèle,
La gloire, aube toujours nouvelle,
Fait luire leur mémoire et redore leurs noms !

Gloire à notre France éternelle !
Gloire à ceux qui sont morts pour elle !
Aux martyrs ! aux vaillants ! aux forts !
A ceux qu’enflamme leur exemple,
Qui veulent place dans le temple,
Et qui mourront comme ils sont morts !

(Victor Hugo. Le Chant du Crépuscule. Hymne )

Ce texte est bien plus beau que tous les discours politiciens. J’espère qu’on l’enseigne encore à la jeunesse d’aujourd’hui… A moins que les strophes qui rendent hommage à la « France éternelle » soient devenus nauséabonds à cause de leur connotation bien trop patriotique et « identitaire »….

C’était de Gaulle (1)…..aussi !!!


de GauleJe ne suis pas « gaulliste » et je n’ai pas besoin de vous faire un dessin pour m’en expliquer.

« Vous m’avez compris » !!!!.

Mais, j’ai une bonne mémoire, et mes 81 ans font qu’elle remonte loin dans le temps.

Elle remonte à une époque que les générations actuelles n’ont pas vécue…. Et ma mémoire se souvient, malgré les efforts de tous ceux qui, accrochés à l’image du « personnage providentiel » que fut de Gaulle, tentent de gommer tout ce qui pourrait ternir la légende du personnage.

J’ai de bonnes raisons, partagées avec beaucoup de mes compatriotes , pour ne pas céder à la fascination inconditionnelle qu’exerce, plus que jamais aujourd’hui, ce personnage qui appartient, je l’admets tout de même, à notre Histoire.

Certes, je suis, comme la plupart des Français, d’accord pour mettre à son actif l’appel à la résistance du 18 Juin, et le combat qu’il a mené pour redonner à la France une place de premier plan dans les affaires du monde. Je lui reconnais le rôle qui a été le sien dans le redressement du pays, dans l’après-guerre. De même que je lui reconnais le mérite d’avoir doté la France des solides institutions qui lui permettent, aujourd’hui encore, de rester à flots, malgré la médiocrité de ceux qui sont à la barre du navire.

Je ne lui conteste donc pas la place qu’il occupe dans notre Histoire et qui se justifie par ses qualités de visionnaire et son obsession de la « grandeur », dès lors qu’il s’agissait de la France.

Sur le chapitre de la « décolonisation », mon jugement est plus nuancé. Je comprends toutefois que l’on puisse ne pas le partager.

La décolonisation a été un courant mondial, puissant, contre lequel il était difficile de lutter. Il l’avait compris et c’est à mettre à son actif. De même qu’il faut mettre à son actif sa lucidité à l’égard du risque que représentait l’irruption dans notre société d’une immigration débridée si l’affaire algérienne s’était conclue par l’intégration de cette terre et de ses habitants à la France.

L’indépendance de l’Algérie était probablement inéluctable pour de multiples raisons trop longues à énumérer ici: la légitimité des aspirations du peuple algérien à redevenir maître de son destin est devenue peu contestable. Mais comment faire admettre à ceux qui étaient nés là-bas, qui vivaient là-bas, travaillaient là-bas, depuis deux, trois ou quatre générations, qu’en quelques années, ils devenaient des étrangers sur cette terre qu’ils aimaient, et dont la France avait fait trois de ses plus beaux départements ???

Aurions-nous pu faire l’économie d’une guerre atroce qui a marqué profondément ma jeunesse et la génération à laquelle j’appartiens ??? Je ne sais.

Ce dont je suis sûr c’est que tout cela aurait pu se terminer autrement.

Je ne « lui » pardonne pas son « double langage », qui a poussé tant de nos officiers, parmi les plus brillants, sur le chemin de la révolte.

Je ne « lui »pardonne pas, et je ne « lui » pardonnerai jamais, le mépris avec lequel « il » a traité le peuple des Pieds-Noirs, puis l’indifférence cynique avec laquelle « il » a consenti au massacre des Harkis. Le résultat en a été « la valise » pour les Pieds-Noirs et « le cercueil »pour les malheureux Harkis qui n’ont pu être « rapatriés »en France, à cause des ordres donnés par le pouvoir gaulliste. J’ai eu des « Harkis » sous mes ordres, et je souffre encore aujourd’hui d’avoir dû les abandonner à leur sort tragique.

Je ne « lui » pardonne pas d’avoir « laissé faire », quand les Accords d’Evian sont devenus, du fait, unilatéral, des Algériens, un « torchon de papier », ce qui a fait de « l’Indépendance » de l’Algérie, une mascarade tragique.

Mes sentiments mitigés à l’égard de de Gaulle, m’autorisent à des propos que d’aucuns, parmi ses adorateurs, jugeraient « irrévérencieux »et même marqués au sceau de l’ingratitude.

Surtout lorsque ces propos consistent en de douloureux rappels à la mémoire, pour des déclarations, pour des décisions, pour des actes, que l’Histoire, avec le recul, ne manquera pas de lui imputer.

J’ai l’outrecuidance d’en évoquer un florilège ( très incomplet ), à un moment où, la France, en plein désarroi, aurait la tentation de tendre l’oreille vers ceux qui se prévalent d’une prétendue fidélité gaulliste qui inspirerait leur action.

1- Naissance (???) de la guerre d’Algérie.

De nombreux historiens considèrent que « les évènements de Sétif » ont ét le point de départ d’un mouvement de rébellion qui deviendra, dix ans plus tard, la Guerre d’Algérie.

Or c’est sous le Gouvernement Provisoire de la République, présidé par de Gaulle, que se produisit, du 8 au 13 mai 1945, la répression sanglante des émeutes de Sétif, en Algérie. Une répression qui fit de 8 000 à 13 000 morts selon les historiens.

Or, c’est de Gaulle qui a donné carte blanche aux autorités, le 12 juin, pour que cette  répression soit impitoyable.

Jamais la Marine et son artillerie, appuyée par l’aviation (le Ministre de l’Air était le communiste Charles Tillon !!! ) n’aurait pu bombarder la population des douars dans le bled sans un ordre express du Général.

Les Communistes présents dans ce Gouvernement Provisoire, sont toujours restés silencieux sur cet épisode tragique de notre Histoire. On dit que les historiens n’ont jamais pu retrouver les traces des documents officiels qui évoquent les conditions dans les quelles ces décisions ont été prises. Curieux, non ??? En tout cas, dans ses Mémoires de Guerre (1955), le Général éluda la question en ne consacrant aux évènements de Sétif qu’une demi-phrase.

« L’omerta » a fait le reste…..

2.- de Gaulle et les Arabes.

L’indépendance octroyée à l’Algérie a permis à de Gaulle de se bâtir une stature prestigieuse dans le monde arabe, et a été le point de départ d’une « nouvelle Politique Arabe » de la France.

Et pourtant, il suffit de se reporter aux oeuvres de celui qui est devenu en quelque sorte son « mémorialiste »pour mesurer l’écart entre son « image » et sa « pensée » à propos des Arabes.

Même si on ne peut « en appeler aux morts »pour juger d’un présent qu’ils n’ont pas vécu, on est en droit de s’interroger sur ce que serait la position du Général de Gaulle, aujourd’hui, sur la « politique arabe » de la France…..

Citations:

 » Essayez d’intégrer de l’huile et du vinaigre. Agitez la bouteille. Au bout d’un moment, ils se sépareront de nouveau. Les Arabes sont les Arabes, les Français sont les Français. Vous croyez que le corps français peut absorber dix millions de musulmans qui demain seront vingt millions et après-demain quarante ?  » (Cité par A. Peyrefitte. C’était de Gaulle. Éditions Gallimard, 2000. Propos tenus le 5 mars 1959).

« Si nous faisons l’intégration, si tous les Arabes et Berbères d’Algérie étaient considérés comme Français, comment les empêcherait-on de venir s’installer en métropole, alors que le niveau de vie y est tellement plus élevé? Mon village ne s’appellerait plus Colombey-les-Deux-Églises, mais Colombey-les-Deux-Mosquées ! »

  « L’intégration, c’est une entourloupe pour permettre que les musulmans qui sont majoritaires en Algérie à dix contre un, se retrouvent minoritaires dans la République française à un contre cinq. C’est un tour de passe-passe puéril ! On s’imagine qu’on pourra prendre les Algériens avec cet attrape-couillons ? Avez-vous songé que les Arabes se multiplieront par cinq, puis par dix, pendant que la population française restera presque stationnaire ? Il Y aurait deux cents, puis quatre cents députés arabes à Paris ? Vous voyez un président arabe à l’Élysée ? » (Charles de Gaulle, rapporté par Alain Peyrefitte).

Prémonitoire quand on sait ce qu’est devenue « l’intégration » chère à quelques beaux esprits, dans notre pays.

 » Qu’est-ce que les Arabes ? Les Arabes sont un peuple qui, depuis les jours de Mahomet, n’ont jamais réussi à constituer un État… Avez-vous vu une digue construite par les Arabes ? Nulle part. Cela n’existe pas. Les Arabes disent qu’ils ont inventé l’algèbre et construit d’énormes mosquées. Mais ce fut entièrement l’œuvre des esclaves chrétiens qu’ils avaient capturés… Ce ne furent pas les Arabes eux-mêmes… Ils ne peuvent rien faire seuls. » (Cité par Cyrus Sulzberger, Les derniers des géants, Éditions Albin Michel, 1972) »

3.- de Gaulle et le racisme.

Les déclarations d’un de Gaulle tomberaient aujourd’hui sous le coup de la Loi. Et l’on imagine les vociférations du MRAP et de SOS Racisme si ces mots étaient prononcés aujourd’hui:

« C’est très bien qu’il y ait des Français jaunes, des Français noirs, des Français bruns. Ils montrent que la France est ouverte à toutes les races et qu’elle a une vocation universelle. Mais à condition qu’ils restent une petite minorité. Sinon, la France ne serait plus la France.

Nous sommes quand même avant tout un peuple européen de race blanche, de culture grecque et latine et de religion chrétienne. Qu’on ne se raconte pas d’histoires ! Les musulmans, vous êtes allés les voir ? Vous les avez regardés avec leurs turbans et leur djellabas ? Vous voyez bien que ce ne sont pas des Français !

Ceux qui prônent l’intégration ont une cervelle de colibri, même s’ils sont très savants. Essayez d’intégrer de l’huile et du vinaigre. Agitez la bouteille. Au bout d’un moment, ils se sépareront de nouveau. Les Arabes sont des Arabes, les Français sont des Français. Vous croyez que le corps français peut absorber dix millions de musulmans, qui demain seront vingt millions et après-demain quarante ? Si nous faisions l’intégration, si tous les Arabes et Berbères d’Algérie étaient considérés comme Français, comment les empêcherait-on de venir s’installer en métropole, alors que le niveau de vie y est tellement plus élevé ? Mon village ne s’appellerait plus Colombey-les-Deux-Églises, mais Colombey-les-Deux-Mosquées !
Conversation entre De Gaulle et Alain Peyrefitte le 5 mars 1959 suite aux événements d’Algérie
C’était de Gaulle, tome 1, Alain Peyrefitte, éd. éditions de Fallois/Fayard, 1994 (ISBN 9782213028323), p. 52.

On imagine ce que serait, aujourd’hui, le discours d’un de Gaulle, sur le « port du voile », sur « la viande hallal », et sur bien d’autre aspect de ce « multiculturalisme » qui fait tant frétiller « le bobo », et tant de « gogos »aux « cervelles de colibri » qui tiennent le haut du pavé médiatique en France. Et sous de Gaulle, le « Djihadisme » n’existait pas encore, même si, dans la Guerre d’Algérie on trouve quelques signes et prémisses d’un combat religieux…..

********

En conclusion, vous allez me poser la question de savoir pourquoi j’évoque ces textes connus de tous les Historiens, à un tournant de notre histoire politique. La réponse est simple.

Il s’agit, pour moi, de rafraîchir quelques mémoires, au moment où certains se préparent à se prévaloir d’un « gaullisme » dont ils se prétendent les « héritiers », pour se démarquer, avec dédain, des thèses de leurs concurrents dans la course à l’Elysée, au prétexte qu’elles sont « extrémistes », qu’elles véhiculent des opinions « racistes », et qu’elles portent atteinte  à « l’identité de la France » et à son image universelle de Nation généreuse et ouverte à tous les opprimés ( on dirait aujourd’hui « à toute la misère du monde »…), à ceux qui sont convaincus que la nation française a vocation à être le produit d’un « métissage » qui la ferait ressembler au Brésil…..(Je n’ai rien contre le Brésil, bien au contraire. Mais le Brésil est le Brésil, et la France est la France !!!).

A tous ceux qui sont dotés de « cervelles de colibri », j’ai jugé qu’il n’était pas inutile de rafraîchir la mémoire, et de nourrir celle des plus jeunes de nos concitoyens. Afin qu’ils n’utilisent la « référence gaulliste »qu’avec une extrême circonspection….

A la face de ces « néo-gaullistes », j’ai envie de dire : de Gaulle, reviens, « ils sont devenus fous » !!!.

(1).- « C’était de Gaulle ». Titre d’un ouvrage d’Alain Peyrefitte. Tout au long de sa carrière politique, Alain Peyrefitte fut un proche du général de Gaulle. Il publie ainsi C’était de Gaulle, recueil de propos du général de Gaulle paru en trois tomes de manière posthume, le premier en 1994 et le dernier en 2000 qui fait aujourd’hui autorité. (Wikipedia).

Portrait volé…..


DSC_0216L’instant a été très court. Quelques minutes, tout au plus.

J’attendais mon épouse, assis sur le petit muret qui borde le paséo et qui surplombe la mer. J’écoutais le bruit familier des vagues qui viennent du large, se briser sur les rochers. En contre-bas, un pêcheur à la ligne, optimiste, attendait patiemment que « ça morde ». Pendant ce temps, des enfants, entre huit et douze ans, cherchaient, dans les crevasses des rochers quelque petit crabe égaré en poussant des cris de joie dès qu’un de ces crustacés montrait le bout de ses pinces….

Soudain « elle » m’est apparue. De loin, sa silhouette mince et fragile, au pas hésitant a attiré mon attention.

Baras( Non !!! Ce n’est pas ma Grand-mère dans sa jeunesse. Dommage pour elle. C’est la belle Sarah Barras, chorégraphe et sublime danseuse de Flamenco ).

En une fraction de secondes s’est réveillé en moi, le souvenir de ma grand -mère espagnole. Au fur et à mesure qu’elle approchait je retrouvais l’image de sa raideur et de son port de tête altier, presque hautain, cette allure particulière qui faisait que, enfant j’imaginais ma grand-mère jeune, en superbe danseuse de flamenco….

L’imagination enfantine, toute neuve, embellit tout ce qu’elle effleure….

« Elle » s’est assise sur un banc, à quelques mètres de moi, face à la mer. Silhouette noire, immobile, le regard lointain, elle semblait rêver en regardant les petits nuages s’accumuler au large, et les vagues qui sous une petite brise vespérale, commençaient à « moutonner ». A quoi pouvait-elle penser ?

Puis « elle » a tourné son regard vers la plage où, au soleil couchant, toute une jeunesse, bruyante et gaie, s’attarde pour s’amuser encore un peu, les uns en courant le long de la plage désertée, les autres en jouant dans l’eau à qui ferait couler l’autre, pendant que le reste de la troupe s’affronte dans d’interminables parties de volley-ball.

Alors, je l’ai vue, de face, et j’ai observé son visage ridé, ses yeux noirs au regard mi-sévère, mi-triste, semblant porter un deuil, ses lèves minces, légèrement pincées qui lui donnait cet air hautain qu’avait ma grand-mère, qui pourtant était une femme d’une grande douceur…..

A ce moment-là, un groupe de jeunes filles est passé devant elle, interrompant sans doute sa courte rêverie, et je l’ai vue soudain, plisser son oeil et , le regard amusé, suivre les filles des yeux, pendant qu’elles s’éloignaient.

Les filles, encore à l’âge où la beauté du diable resplendit, étaient en maillot de bain mouillé. Elles riaient aux éclats, dans un gazouillis de mots échangés, parlant toutes en même temps, très vite, à la manière espagnole, sans que je puisse comprendre ce qui les faisait tant rire.

Alors, j’ai surpris sur le visage de cette vieille femme, un sourire qui s’esquissait.

Mon imagination m’a suggéré qu’elle se revoyait, autrefois jeune et belle. Comme toutes les Espagnoles, elle adorait sans doute la « playa »et ces moments où, après une journée passée à se baigner sous le soleil de plomb, les filles se groupent en cercle, à la fraîcheur du soir, sur le sable encore humide, pour bavarder, échanger quelques confidences, agrémentées de commentaires coquins sur les garçons, qui un peu plus loin jouent au foot sur le sable…..

Puis « elle » s’est levée, et passant devant moi, sans me voir,  elle est repartie de son pas, toujours aussi hésitant, mais toujours avec cette fière allure qu’ont parfois les femmes espagnoles. Entièrement vêtue de noir, comme ma grand-mère, il ne lui manquait plus que cette fleur blanche que mon aïeule plantait toujours dans ses cheveux….

J’ai failli me lever pour lui parler. Mais pour lui dire quoi ??? Cette femme pouvait avoir soixante-dix ans, un âge que ma grand-mère, hélas, n’a pu atteindre. Elle semblait vouloir faire, comme dans un rituel solitaire, la promenade sur le paséo, qu’elle a dû faire cent fois, avant d’être veuve, avec celui qui avait accompagné sa vie. Je n’ai pas osé .

« Elle » s’est éloignée, dans le soleil couchant, et je l’ai suivie des yeux . De son pas lent, elle s’est fondue dans la foule des promeneurs, et j’ai vu sa silhouette digne mais fragile disparaître….

A ce moment, mon épouse est venue me rejoindre pour notre marche quotidienne, le long de la mer, où nous faisons notre provision d’air frais et remplissons nos poumons du parfum des embruns mélangé à celui des algues humides….

A notre tour, nous nous sommes fondus dans la foule des promeneurs du soir, en marchant d’un pas rythmé, alors que, dans ma tête se bousculaient des souvenirs de jeunesse dans les quels ma grand-mère était encore présente : elle avait déjà ce regard lointain de la vieille dame, quand elle nous regardait jouer au ballon sur la plage…..

De retour à la maison, les souvenirs ont continué à m’envahir, par vagues successives .

Je me suis souvenu du temps où, lorsque j’étais enfant, ma grand-mère nous amenait, mon frère et moi, à la plage au Deux-Moulins, tout près d’Alger. Assise sur le sable elle nous regardait barboter entre deux petites vagues au bord de l’eau. de temps à autres, elle nous appelait, pour nous sécher dans une de ce serviettes blanches que l’on ne trouve plus aujourd’hui dans le commerce: des « nids d’abeilles », si ma mémoire est bonne.

Puis elle sortait de son panier – son « couffin » disait-elle – enveloppées dans un torchon, des madeleines qu’elle confectionnait avec amour. Des madeleines !!! Les mêmes que celles que je trempais dans mon café au lait, au retour de l’école….

Cela m’a évidemment ramené vers Proust, qui sait si bien évoquer, avec une riche palette de mots ces souvenirs enfouis qui surgissent du fond de notre mémoire où on les croyait enfouis à jamais…. Et dans le silence de la nuit, pendant que sur la terrasse les parfums de jasmin, de « galan de noche », de thym, de romarin fraîchement arrosé envahissaient l’espace, j’ai rouvert Proust, à la page de « la madeleine », pour relire le passage si souvent évoqué….. Je cite:

« Ce goût, c’était celui du petit morceau de madeleine que le dimanche matin à Combray (parce que ce jour-là je ne sortais pas avant l’heure de la messe), quand j’allais lui dire bonjour dans sa chambre, ma tante Léonie m’offrait après l’avoir trempé dans son infusion de thé ou de tilleul. La vue de la petite madeleine ne m’avait rien rappelé avant que je n’y eusse goûté ; peut-être parce que, en ayant souvent aperçu depuis, sans en manger, sur les tablettes des pâtissiers, leur image avait quitté ces jours de Combray pour se lier à d’autres plus récents ; peut-être parce que, de ces souvenirs abandonnés si longtemps hors de la mémoire, rien ne survivait, tout s’était désagrégé ; les formes – et celle aussi du petit coquillage de pâtisserie, si grassement sensuel sous son plissage sévère et dévot – s’étaient abolies, ou, ensommeillées, avaient perdu la force d’expansion qui leur eût permis de rejoindre la conscience. » ( Fin de citation ).
Proust. « Du côté de chez Swann ».

Réflexions sur la nuit du 4 Août…


Allongé sur ma terrasse, je regarde le ciel d’une belle nuit  étoilée. Toutes sortes de pensées traversent mon esprit: à 81 ans, combien de nuits étoilées pourrai-je encore contempler ???

Misère de la condition humaine, condamnée à ne vivre qu’un court instant de l’Histoire de ce vaste Univers… Les « Pensées de Pascal » affleurent à ma mémoire. Que sommes nous face à l’infini ???

Le même sentiment m’avait traversé l’esprit, au fond du désert Libyen, dans l’Akkakous, alors que je m’étais égaré en m’éloignant de notre campement, à la tombée du soir. J’avais gravi, péniblement, une dune pour tenter d’apercevoir la lumière du feu de camp allumé par nos guides touaregs. C’était également par une de ces nuits étoilées que seuls les déserts peuvent nous offrir, car dans le désert, le silence est absolu et la nuit est totale. Seules brillent les étoiles.

Tout à coup, un sentiment d’angoisse m’a envahi: et si je ne retrouvais pas le chemin du campement ??? Que suis-je, seul, dans ce désert minéral ??? Un grain de sable dans la main de Dieu, que le moindre souffle du vent balaie à jamais ??? Qu’est-ce qu’un grain de sable, en haut de cette dune immense ??? puis-je encore susciter l’intérêt de Dieu, si Dieu existe ???

Fort heureusement, ma rêverie s’est interrompue, et j’ai été ramené aux réalités de l’instant par les cris de mes camarades partis à ma recherche, et par la lumière de leurs lampes frontales scrutant l’obscurité….De telles expériences enseignent la modestie….et la prudence.

Mes pensées poursuivant leur chevauchée sur « le temps qui passe »- ce n’est pas un hasard si mon blog s’intitule « Tempus Fugit » – je songe à la vanité des agitations humaines, dont l’absurde a été si bien évoqué par Albert Camus….

Nous sommes au début de la nuit du 4 Août 2014.

Et soudain me revient en mémoire un chapitre du livre que je suis en train de terminer. Il s’agit du « Dictionnaire critique de la Révolution Française » de François FURET et Mona OUZOUF. Le chapitre consacré à la Nuit du 4 Août 1789, la nuit de « l’Abolition des Privilèges », illustre, ô combien, la vanité de l’agitation révolutionnaire, et pardessus tout, l’absurdité de décisions gravissimes, prises pour faire face à des situations purement conjoncturelles.

FuretJe cite l’introduction à ce chapitre essentiel de notre Histoire:

 » La nuit du mardi 4 Août 1789 est la date la plus fameuse de notre histoire parlementaire: elle marque le moment où un ordre juridique et social façonné par les siècles, composé d’une hiérarchie d’ordres, de corps et de communautés séparées, et définis par des privilèges, s’est en quelque sorte évanoui, pour laisser la place à un univers social repensé comme un ensemble d’individus libres et égaux, soumis chacun à l’autorité universelle de la Loi.

Le débat du 4 Août 1789 au soir est en effet lié au sentiment très vif, chez tous les députés, d’un crépuscule et d’une aurore »

Et, plus loin:  » Encore cette comparaison classique ne fait-elle pas pleinement justice à l’émotion des acteurs de cette célèbre séance, qui se sentirent tous, l’espace de quelques heures, comme les machinistes presque divins de ce formidable spectacle. Ce crépuscule et cette aurore étaient leur oeuvre ».( Fin de citation ).

Les « révolutionnaires » sont toujours convaincus qu’ils agissent sous l’empire d’une inspiration qui les éleve au rang des Dieux ( Deus ex-machina )…D’où le sentiment, que dis-je, la conviction qui les anime, persuadés d’avoir droit de vie ou de mort sur ceux qui ne partagent pas leurs idées….

En fait on apprend en lisant la suite de ce chapitre passionnant que cette « décision historique » a été « une réponse parlementaire improvisée, grâce à un changement d’ordre du jour, à des circonstances pressantes ».

Car « depuis la deuxième quinzaine de Juillet, le mécontentement des campagnes, latent depuis le printemps, a pris l’allure d’un soulèvement ».( Fin de citation )

En fait cette improvisation, qui allait transformer profondément la France, n’était qu’une mesure purement démagogique, prise sous la pression d’évènements que nos révolutionnaires ne maîtrisaient plus, et destinée à éviter un soulèvement des campagnes…

Je me suis surpris, dans mes rêveries, à imaginer le retour « sur terre » , de ces « Parlementaires », si fiers d’avoir été capables, – usant d’une sorte de pouvoir « divin » -, « d’abolir des privilèges » séculaires pour façonner un monde nouveau fondé sur l’Egalité et la Liberté….

Que penseraient-ils de notre République où jamais, les privilèges n’ont été si solidement établis et protégés ???

Laissant mes pensées s’égarer, je me suis souvenu d’avoir lu, le matin même, dans « Le Point » que le « Grand Président » de notre République, élu démocratiquement, au Suffrage Universel, passant ses vacances à « la Lanterne » était peu motivé pour « commémorer » l’abolition des privilèges, lui qui commémore tant, par ces temps d’agitations et de désordres….

Et la musique d’un chant révolutionnaire célèbre a traversé mon esprit, en pleine divagation: « Ah !!! ça ira, ça ira, ça ira !!! Les Aristocrates à la Lanterne, Ah !!! ça ira, ça ira, ça ira !!! Les Aristocrates on les pendra……

C’est en fredonnant cet air célèbre, que je suis parti me coucher, au côtés de mon épouse qui dormait profondément. Le sommeil du juste.

Buonaparte.


Bonaparte

Je suis plongé depuis plusieurs jours dans la lecture passionnante d’une volumineuse biographie ( 683 pages ) de « Bonaparte » de Patrice Gueniffey ( nrf Gallimard ). Une de plus. Car les biographies de ce personnage de légende n’ont pas manqué depuis la fin du règne de Napoléon….

Ce livre retrace l’histoire du jeune Bonaparte, avant qu’il ne devienne L’Empereur Napoléon. Une histoire qui partant de la période peu connue, car rarement évoquée, des années d’enfance corse, jusqu’à la proclamation du Consulat à vie, en 1802, où, avant de s’arroger le titre d’Empereur, il rétablit à son profit une forme nouvelle de monarchie héréditaire.

Toute la trame du Livre repose sur la recherche, par l’auteur, des ressorts profonds de la mutation du personnage de Bonaparte, avant qu’il ne devienne Napoléon.

On est frappé, tout au long de cet ouvrage, par la vulnérabilité sentimentale de ce personnage, amoureux fou de celle qui va accompagner son ascension, et la servir. Et l’ascension de Bonaparte a été bien plus laborieuse que ne nous l’ont enseigné nos professeurs d’Histoire !!!Il a dû affronter les railleries de ceux qui, à Paris, trouvaient son accent corse ridicule, se moquaient de sa petite taille, de son manque d’élégance vestimentaire, et pardessus tout lui reprochaient ses origines corses, venant d’une île fraîchement rattachée à la France, après s’être battue pour son indépendance.

Il a dû ruser, intriguer, se servant de ses amitiés parmi lesquelles, Robespierre, puis négocier avec les membres du Directoire, éliminer des concurrents en jouant des coudes pour obtenir le commandement des Armées pendant la campagne d’Italie où il révélera au Directoire, impressionné par ses victoires, ses qualités de stratège hors-pair, mais aussi son art de gouverner, tel un élève de Machiavel, qui faisait merveille dans les Etats nouvellement conquis sur le front italien.

En fait cet ouvrage s’attarde plus sur l’aventure du Bonaparte Premier Consul que sur le chef de guerre.

Devenu Premier Consul, il s’appliquera à relever les ruines héritées de la Révolution, » avec une intelligence, une énergie et une efficacité incomparables ».

Car au passage, l’auteur évoque le terreau sur lequel l’arbre napoléonien va planter ses racines. La terreur, l’hystérie des révolutionnaires, les batailles livrées contre les monarchies européennes horrifiées par ce qui se passe en France, ont laissé une France exsangue, épuisée, privée d’une partie de ses élites qui ont dû émigrer pour fuir la guillotine.

La France est surtout un pays divisé, car il est faux de laisser croire, selon la Légende répandue depuis la IIIème République, que l’euphorie révolutionnaire est partagée par tout le pays.

Dans le tréfond de l’âme populaire subsiste une réticence à l’égard de ceux qui ont tué, volé, pillé partout où se trouvaient des richesses accumulées au cours des siècles par la grande et la petite noblesse. De même que le peuple perçoit, confusément que, à l’arbitraire de la Justice royale, se substitue une Justice révolutionnaire tout aussi suspecte par son sectarisme. De même, également, que la volonté de quelques illuminés de supprimer,- au nom des Lumières (!!!!)- toute trace du culte catholique consacré à l’amour du Christ, au nom d’un Dieu tout Puissant, pour le remplacer par le culte fumeux de « l’Etre Suprême » se heurte à un scepticisme répandu….

C’est sans doute de cette époque que datent les symptômes d’une profonde division des Français, en deux camps, le camp vainqueur, celui des insurgés, ne concevant l’achèvement de son oeuvre qu’après avoir détruit l’autre camp, le tout au nom de valeurs et d’un discours qui tranchent avec la réalité historique. Combien d’innocents auront péri, sous la Terreur, pour avoir été dénoncés par des libelles circulant en sous-main, pour des crimes qu’ils n’avaient pas commis…..

C’est de cette époque que date la difficulté, pour les Français, d’accéder à un dialogue social apaisé: la « Révolution » a profondément marqué la culture de ce pays, éternellement partagé en deux camps s’affrontant dans un rapport de force qui doit nécessairement faire plier l’autre ou le détruire, ce qui exclue toute perspective de compromis, le terme de « compromis » lui même étant entaché de suspicion de trahison….

Bonaparte a parfaitement analysé la situation du pays. Il sait que pour accomplir son destin de conquérant, il a besoin d’un France rassemblée, car la France n’est jamais aussi forte que quand elle est rassemblée. Pour cela, la France a besoin de transcender ses divisions dans une sorte de fuite en avant, à la recherche de la gloire,et du prestige de la Victoire. Les Français, pour rester unis, ont besoin d’un ciment, et ce ciment, c’est la fierté que leur inspire leur pays au quel ils attribuent une vocation à servir d’exemple Universel.

Il a compris également que la Révolution n’avait pas réussi à anéantir l’attachement des Français au prestige monarchique ; c’est cela qui le conduira sur la pente du pouvoir personnel. Et c’est sur cet attachement que Bonaparte s’appuiera pour légitimer son couronnement.

L’éditeur nous annonce que ce « Bonaparte » sera suivi d’un « Napoléon » du même auteur.

Je dois à la franchise de dire que j’ai toujours trouvé le personnage de Bonaparte intéressant, sinon attachant, alors que celui de Napoléon, Empereur des Français m’est apparu, au fil du temps, beaucoup moins sympathique. Je le rends responsable, à son tour de l’affaiblissement de la France qui, pour servir ses ambitions et son orgueil, a sacrifié les meilleurs et les plus courageux,  de ses hommes.

Mais Bonaparte reste, dans l’imaginaire des Français, comme le modèle de « l’homme providentiel », qui surgit à un moment de leur Histoire, pour accomplir un destin d’exception, et empêcher le pays de sombrer dans l’irrémédiable déclin où l’entraînent des « illuminés », qui, après s’être emparés du « message des Lumières » pour en détourner le sens à leur profit, ont l’étrange conviction d’être, seuls, au service du Bien….

Révolte contre Révolution.


guillotine

Cliquez sur l’image pour agrandir le cliché.

Pendant mes jeunes années, alors que j’étais encore élève du Lycée Bugeaud d’Alger, il m’est arrivé plus d’une fois, d’être celui qui, en classe d’Histoire, était le « vilain petit canard », « stigmatisé »(!), pour avoir, en de nombreuses circonstances exprimé son désaccord, voir sa révolte, à propos de certains épisodes de la Révolution Française.

J’exprimais, à ma manière, mon scepticisme sur la façon dont on nous racontait alors le « roman national », en réécrivant les pages de la période « révolutionnaire », et en leur conférant les caractères d’une « Légende glorieuse », qui ne souffrait aucune contestation possible, alors que sur le fond, elle ne pouvait être exonérée de graves critiques, ne serait-ce qu’en raison du gâchis humain qui l’a accompagnée, et surtout, des aventures belliqueuses dans lesquelles elle a été entraînée, qui portaient en germe l’affaiblissement de la grande puissance qu’était la France.

Certes, je ne remettais pas en question les acquis de la Révolution, en termes de « Liberté, d’Egalité et de Fraternité », ainsi que l’héritage de valeurs que nous ont légué « les Lumières ».

Mais je prétendais que d’autres pays, en Europe, et aux Amériques, avaient pu accéder aux mêmes résultats, sans avoir à faire couler autant de sang, pour accéder à un peu plus de justice et d’égalité devant les Lois.

Mon point de vue de modeste lycéen n’était manifestement pas dans l’air du temps.

Il heurtait sans aucun doute, les convictions de mes professeurs qui étaient pourtant,- j’en conviens aujourd’hui-, de valeureux hussards de la République, mais qui étaient imprégnés de la pensée marxiste qui dominait alors les milieux intellectuels de l’après-guerre. C’est bien plus tard que j’ai appris que les marxistes manipulaient l’Histoire pour l’instrumentaliser à des fins idéologiques qui à cette époque de ma vie, m’échappaient.

A part les profs de Mathématiques et de Physique-Chimie, la plupart des autres profs affichaient leurs opinions communistes, et parmi eux, les profs de Littérature et d’Histoire-Géographie.

J’ai raconté, il y a déjà quelques temps, dans un de mes billets, la « mésaventure » que m’avait valu, en classe de Littérature, la défense dans une dissertation, de Voltaire face à Jean-Jacques Rousseau.

(https://berdepas.wordpress.com/2008/05/04/voltairien/)

Toutes ces prises de position m’ont valu bien des sarcasmes qui ont contribué à forger mon caractère, et à faire de moi le « réactionnaire impénitent » que je suis, par la suite, devenu…

J’ai affronté le sectarisme de ceux pour qui les « idées reçues »ne souffraient aucune contestation, ainsi que l’ironie de ceux de mes camarades que je considérais comme des « fayots »et qui se croyaient obligés « d’en rajouter » chaque fois que le prof me tançait et me reléguait au rang des crétins incapables de se hisser au niveau de ceux pour qui la « révolution française » avait contribué à la gloire de notre pays.

Mon « exclusion » atteignit des sommets, à l’occasion de l’évocation de l’exécution de Louis XVI, que personnellement je considérais comme un acte abominable, parmi tant d’autres commis sous l’empire de la Terreur.

Pour couronner (si j’ose dire !!! ) le tout, il se trouve que je porte un nom à particule, comme beaucoup de ceux dont les racines sont latines ou méditerranéennes.

Le « de » en Italie, en Sicile, en Sardaigne, en Corse et à Malte n’a aucune connotation nobiliaire. Il indique simplement une origine, un évènement ou un lieu où le patronyme a pris racine. Mais dans les déchaînements de sarcasmes et de stupidités aux quels je m’exposais par mes prises de position, le « de » devenait le point faible de ma « cuirasse » vers lequel convergeaient toutes les plaisanteries.

J’ai conservé longtemps les traces de ces épisodes de ma vie scolaire.

Jusqu’au jour où, – bien plus tard -, découvrant l’oeuvre littéraire de Camus je tombe sur un passage de « L’Homme Révolté« , qui , dans le style propre à cet auteur longtemps méprisé par les « marxistes », évoque ce terrifiant moment de notre Histoire qu’a été l’exécution de Louis XVI, et me rassure sur le bien-fondé de mes sentiments.

Je le cite:

 « Le 21 janvier, avec le meurtre du Roi-prêtre, s’achève ce qu’on a appelé significativement la passion de Louis XVI. Certes, c’est un répugnant scandale d’avoir présenté, comme un grand moment de notre histoire, l’assassinat public d’un homme faible et bon. Cet échafaud ne marque pas un sommet, il s’en faut. Il reste au moins que, par ses attendus et ses conséquences, le jugement du roi est à la charnière de notre histoire contemporaine. Il symbolise la désacralisation de cette histoire et la désincarnation du Dieu Chrétien. Dieu, jusqu’ici, se mêlait à l’histoire par les Rois. Mais on tue son représentant historique, il n’y a plus de roi. Il n’y a donc plus qu’une apparence de Dieu relégué dans le ciel des principes.

 Les révolutionnaires peuvent se réclamer de l’Evangile. En fait, ils portent au Christianisme un coup terrible, dont il ne s’est pas encore relevé. Il semble vraiment que l’exécution du Roi, suivie, on le sait, de scènes convulsives, de suicides ou de folie, s’est déroulée tout entière dans la conscience de ce qui s’accomplissait. Louis XVI semble avoir, parfois, douté de son droit divin, quoiqu’il ait refusé systématiquement tous les projets de loi qui portaient atteinte à sa foi. Mais à partir du moment où il soupçonne ou connaît son sort, il semble s’identifier, son langage le montre, à sa mission divine, pour qu’il soit bien dit que l’attentat contre sa personne vise le Roi-Christ, l’incarnation divine, et non la chair effrayée de l’homme. Son livre de chevet, au Temple, est l’Imitation de Jésus-Christ. La douceur, la perfection que cet homme, de sensibilité pourtant moyenne, apporte à ses derniers moments, ses remarques indifférentes sur tout ce qui est du monde extérieur et, pour finir, sa brève défaillance sur l’échafaud solitaire, devant ce terrible tambour qui couvrait sa voix, si loin de ce peuple dont il espérait se faire entendre, tout cela laisse imaginer que ce n’est pas Capet qui meurt mais Louis de droit divin, et avec lui, d’une certaine manière, la Chrétienté temporelle. Pour mieux affirmer encore ce lien sacré, son confesseur le soutient dans sa défaillance, en lui rappelant sa « ressemblance » avec le Dieu de douleur. Et Louis XVI alors se reprend, en reprenant le langage de ce Dieu : « Je boirai, dit-il, le calice jusqu’à la lie ». Puis il se laisse aller, frémissant, aux mains ignoblesdu bourreau. » (Fin de citation).

(Albert Camus, L’homme révolté.)

La beauté de ce texte, indépendamment de sa qualité littéraire, réside dans la profondeur de l’analyse d’un mal dont la France ne s’est jamais remise.

Les sentiments qu’exprime alors Camus, sont ceux qu’en toute naïveté je ressentais d’instinct, en classe d’Histoire.

Comment avait-on pu « couper la tête » à un Roi, qui était le contraire d’un tyran, que l’on accusait à tort d’avoir rempli la Bastille à coups de lettres de cachet, alors que les Historiens ont établi qu’au moment de « sa prise », la Bastille ne contenait que six ou sept prisonniers, tous (sauf un, je crois ) étaient des délinquants ou des faussaires ???

Si on en croit Wikipedia, ( je cite) : « Le règne de Louis XVI est marqué par des réformes importantes concernant le droit des personnes : abolition de la torture en 1781 et 1788, abolition du servage dans le domaine royal en 1779, abolition du péage corporel des juifs d’Alsace en 1784, édit de tolérance des protestants en 1787. Il est aussi marqué par quatre tentatives de réformes profondes du royaume (17741776, 1781, 1787 par deux fois) passant par l’instauration d’un impôt direct égalitaire (en remplacement de la taille inégalitaire) et d’assemblées provinciales élues destinées à contrôler cet impôt. Ces dernières réformes butèrent sur l’hostilité des privilégiés, en particulier celle de la noblesse de robe, celle du Parlement de Paris et celle de la Cour de Versailles. Louis XVI tenta alors de passer outre leur opposition en présentant ses réformes devant une assemblée des notables (1787) puis devant les états généraux (1789). » (Fin de citation).

Drôle de parcours, pour un tyran….Et tant d’horreurs, tant de sang versé pour la conquête de quelques symboles…..

Hélas pour moi, « L’Homme Révolté » est une oeuvre postérieure à mes années de lycéen….Je n’aurais donc pas pu m’appuyer sur les arguments d’Albert Camus que je n’ai découvert que bien plus tard, à l’âge adulte.

Tout comme Camus, le jeune homme que j’étais sentait confusément, que dés l’instant où la tête de Louis XVI tomba dans le panier de l’échafaud, au moment où résonna le grondement furieux des tambours, le France venait de se couper de ses racines, et de perdre une partie de son âme.

La République, après bien de vicissitudes, a finit par lui  procurer une âme de rechange.

S’y raccrochent aujourd’hui, ceux qui sentent que les valeurs républicaines sont attaquées de toutes parts : à la religion du Christ à laquelle se référait le Roi face à ses bourreaux, la République a substitué celle de « L’Etre Suprême », et celle de l’Egalité des citoyens, toujours contestée aujourd’hui encore, celle de la Liberté, toujours menacée, et celle de la Fraternité meurtrie sous les coups de l’individualisme et des égoïsmes ordinaires. 

Quand à la Laïcité, devenue « religion d’Etat », elle subit, à son tour, les mêmes attaques que celles que ses défenseurs ont fait subir, dans le passé, à l’Eglise et à son message…

Le Républicain « pur et dur » qu’avec le temps je suis devenu, constate années après années que les Français sont restés vaguement nostalgiques d’une monarchie qui, à distance des courants politiques qui divisent le pays, constituerait le repère, l’entité institutionnelle à travers laquelle la France s’identifie, comme chaque Anglais reconnaît la spécificité du peuple au quel il appartient dans l’Institution monarchique britannique.

Cette nostalgie refait périodiquement surface à l’occasion des grands évènements de la vie monarchique de nos voisins. Nos médias ne manquent jamais de la souligner….

– A l’heure où la France donne le sentiment d’être devenue un coque de noix dans la tempête que traverse le monde, sous l’effet d’une irrésistible mondialisation,

– A l’heure où elle doit se contenter d’un rôle de leader déclinant en Europe,

– A l’heure où les fondements de la République se lézardent sous les effets d’une « diversité dans la citoyenneté » dont il va falloir, par la lâcheté des « élites », s’accommoder,

– A l’heure où la France, de ce fait, est confrontée à une grave crise identitaire dont elle refuse de débattre, sous la pression de ceux qui régentent les domaines qu’il est politiquement incorrect d’aborder,

– A l’heure où un sursaut vital serait nécessaire à ce pays, il n’est plus un seul personnage de la vie politique française qui ait la légitimité nécessaire pour montrer aux Français le chemin de la Révolte contre les « idées reçues » de notre époque, et encore moins leur indiquer le chemin de l’Honneur…..

Mais l’Honneur, fait-il encore partie des « valeurs » de notre époque ???

Habitués à se contenter de peu, dans les périodes où la République tremble sur ses bases, les Français, moroses, se consolent alors, en contemplant les vaines gesticulations du Président Normal que démocratiquement ils se sont offert..

Un « Grand Président »….dont on se demande parfois si, lui, a encore « toute sa tête »….

Mais même avec la tête coupée, il continuerait encore à gesticuler dans tous les sens, car le moteur de l’idéologie, est un moteur simple mais robuste !!!

Hollande radieux

Petite frappe ???


Ou Grosse Frappe ??? That is the question !!!

Les atermoiements des « Occidentaux », dont la France fait partie, face aux décisions à prendre, concernant une intervention en Syrie, montrent que peu à peu, le doute s’installe dans les esprits de ceux-là mêmes qui « anti-militaristes » viscéraux, n’hésitent pas quand l’opportunité s’en présente, à jouer les « va-t-en-guerre », pour tenter de redorer leur blason.

Les exemples ne manquent pas, dans notre Histoire récente, de dirigeants socialistes, qui dans leurs discours militants ne cachent pas leur défiance, pour ne pas parler de détestation, vis à vis de l’Armée, mais qui n’hésitent pas à « s’en servir » dès lors que cela peut « servir » leurs intérêts ou leur « prestige ».

La Droite de Sarkozy, elle aussi, manipulée par quelques « intellectuels » et « philosophes » auto-proclamés a cédé à la tentation de montrer ses muscles sur la scène internationale, au nom de valeurs, certes, respectables, mais au mépris des réalités complexes d’un monde arabe auquel nos « élites » ne comprennent pas grand chose.

Face à l’épouvantable drame que traverse la Syrie, la tentation est de retour, et Normal 1er, dit « Zigounette », brûle d’envie d’en découdre avec celui que l’on considère en Occident comme l’un des dictateurs les plus sanguinaires de notre époque.

Une fois de plus, l’opinion que je voudrais développer dans ce billet, s’inscrira à contre-courant des opinions « médiatiquement », donc politiquement correctes.

On pourra se reporter à mes précédents billets pour constater mes réserves, pour ne pas dire mes objections à propos de « l’enthousiasme » suscité par les « Printemps arabes », dans lesquels nos « zozos » voyaient le signe d’une évolution du monde arabe, en faveur de la Démocratie, telle que nos « intellectuels » occidentaux la conçoivent.

Car nos « penseurs », imbibés d’eurocentrisme, formés à l’école marxiste, sont convaincus que l’Histoire du Monde s’écrira sous la poussée d’une sorte de déterminisme inspiré par les révolutions européennes, – la Française et la Russe (!!!) – et qu’aucune portion de notre planète n’y échappera….Ils sont « formatés » pour raisonner, en toute circonstance, de manière « binaire » ( la bourgeoisie, le peuple, ou les riches, les pauvres, ceux qui ne sont pas pour la révolution sont des traîtres, les progressistes , les réactionnaires, etc…)

Le « déni de réalité » qui, en outre, aveugle nos « élites » contemporaines, masque l’échec de toutes les tentatives d’installer la Démocratie dans des pays habitués à une gouvernance ferme, autoritaire, souvent à l’excès, exercée par un pouvoir personnel fort s’appuyant sur une connaissance profonde et la manipulation des courants qui traversent ces pays, courants issus des différence ethniques, de leur culture tribale, et de la complexité de leur histoire religieuse, même là où existent de réelles aspirations à plus de liberté et de justice.

L’Histoire retiendra qu’en terre musulmane, toutes les interventions militaires occidentales, toutes, sans exception, se sont soldées par des échecs douloureux, que par « pudeur », on évite d’évoquer aujourd’hui.

La mise au pas de Serbes -( qui furent pendant la guerre de 1914-18, nos précieux alliés et que nous avons trahis) -, confrontés à une présence musulmane envahissante, héritée de l’occupation ottomane, vaincus après avoir été écrasés par l’aviation occidentale, a permis la naissance d’un Etat musulman, le Kosovo, qui dès que sa souveraineté a été reconnue, s’est empressé de se livrer à une épuration ethnique sans précédent destinée à éliminer les Serbes d’un territoire sur lequel ces derniers avaient des droits historiques légitimes, avant de sombrer dans une sorte d’anarchie corrompue, et de devenir un des foyers, à nos portes, de l’islamisme européen.

L’omerta médiatique sur le résultat de ce piteux exploit de nos dirigeants,- c’est « Tonton Mitterrand » qui à l’époque, était aux manettes, en France -, a été rompue, il y a déjà quelques temps, par le journaliste d’investigation Pierre Péan, qui dans un ouvrage remarquablement documenté, décrit la réalité du Kosovo, devenu un Etat maffieux,…mais « musulman » !!!

KosovoUn ouvrage assez peu commenté dans nos médias, sans doute peu motivés pour faire l’éloge d’un brûlot qui montre comment, avec de « bons sentiments », on peut faire une guerre « juste », dont le résultat est tragiquement désastreux.

Je n’aurai pas la cruauté de m’étendre sur le résultat des guerres « justes », destinées à installer la « Démocratie », en Afghanistan, en Irak, et plus récemment en Libye…..

S’agissant de la Syrie, je considère que la France a tout à perdre dans cette affaire.

En n’intervenant pas, elle encourt la condamnation des « belles âmes » au nom des valeurs de générosité, et de compassion à l’égard des souffrances réelles d’un peuple martyr. Elle subit, de surcroît la pression de pays arabes amis, qui eux n’enverront jamais un soldat ni un avion au combat, mais qui tirent, par dessous, les ficelles de ce conflit aux multiples dimensions, ethniques, religieuses, tribales, dans un affrontement dans lequel certaines minorités, dont la minorité copte, tout comme en Egypte, jouent leur survie.

En intervenant, elle met le doigt dans un engrenage infernal, car nul n’est capable de prévoir jusqu’où les multiples affrontements qui se produisent en Syrie, conduiront cette région du monde qui est en train de devenir un baril de poudre. Car quelques missiles et quelques « bombinettes » ne suffiront pas à abattre Bachar El Hassad.

Pour comprendre la complexité des forces qui s’affrontent dans toute cette région, il est utile de parcourir un ouvrage que viennent de publier conjointement deux auteurs dont nul ne peut nier leur profonde connaissance du monde arabe.

Deux auteurs que vous verrez rarement sur vos écrans….

Il s’agit d’Alexandre Adler et de Vladimir Fedorovski.

Le premier est un historien et politologue qui entretient des relations anciènnes avec de nombreux chefs d’Etat arabes, et avec de nombreuses personnalités du monde diplomatique international.

Le second a exercé de hautes fonctions diplomatiques sous la Russie soviétique: c’est un « arabisant » qui maîtrise non seulement la langue, mais également la culture du monde arabe. Car, ne l’oublions pas si on veut comprendre l’attitude Russe dans le conflit syrien, la Russie est un grande puissance musulmane, et elle est attentive à tout ce qui peut susciter des vagues de fond dans l’espace politique du Moyen-Orient, dont elle redoute le ressac.

La Russie redoute, pardessus tout, un affrontement dont le risque se profile, entre l’Islam Chiite et l’Islam Sunnite, un affrontement qui embraserait une vaste partie de son territoire, avec à ses portes l’Iran doté d’ici peu, avec le Pakistan, de la force nucléaire.

islam

Cet ouvrage, dans un dialogue passionnant, entre deux « vrais experts »pose la vraie question à laquelle, les générations actuelles vont devoir trouver une réponse.

L’islamisme va-t-il gagner ?

L’actualité en France et dans le monde n’en finit pas de provoquer cette question: Hamas vengeur en Palestine, tensions dangereuses en Egypte et en Libye, crise syrienne, et l’Iran en train de se doter de l’arme nucléaire.

Et peut-être aussi, demain, une nouvelle coalition, une « internationale » islamique, un « croissant » allant de l’Afghanistan et du Pakistan au Maghreb en passant par la Turquie.

Les auteurs ont enquêté auprès de tous les protagonistes, modérés ou extrémistes.
L’ouvrage n’esquive aucune question : les réfugiés du Moyen-Orient, la « rue » et les révolutions islamiques, la guerre des lobbies aux Etats-Unis, le rôle de Barack Obama, le droit international, le poids des théologies, la démographie.

A travers un échange vif et argumenté, Alexandre Adler et Vladimir Fédorovski nous donnent les quelques clefs qui nous manquent pour comprendre de fragiles équilibres actuellement menacés.

Petites frappes, ou grosse frappe en Syrie ???

La question paraît presque dérisoire, face aux enjeux que recèle l’avenir de ce petit Etat qu’est la Syrie. Un « petit » Etat exposé à un conflit qui synthétise toute la complexité d’un Moyen Orient qui ne peut surtout pas être abordé avec des idées simples.

En refermant ce livre, je me suis demandé, si ce n’est pas Poutine qui fait l’analyse la plus juste de l’évolution du monde arabe. Car la prudence, le pragmatisme, le réalisme, en l’occurrence, paraissent mieux adaptés que les rêves ambitieux mais irréalistes des « zozos »….