Service Public…


A lire AB-SO-LU-MENT, car c’est un témoignage désopilant, qui tranche avec la litanie des revendications de la fonction publique, tous secteurs confondus, réclamant toujours plus de personnel, plus de moyens, plus de…. A se tordre de rire. Au point d’espérer ( naïvement ???) qu’il n’en est pas ainsi dans toute la fonction publique !!!!!



Auteur : Zoé Shepard

Dur, dur d’être fonctionnaire !

Embauchée après huit ans d’études supérieures dans une mairie de province, Zoé Shepard a vite déchanté. Plongée dans un univers où incompétence rime avec flagornerie, ses journées sont rythmées par des réunions où aucune décision n’est jamais prise, de rapports qu’elle doit rédiger en dix jours (quand deux heures suffisent), de pots de bienvenue, de départ, d’anniversaire.

Sans oublier les séminaires « de formation », les heures à potiner à la cantine et à la machine à café, les chefs « débordés » par les jeux en ligne et les préoccupantes interrogations de tous sur les destinations de vacances et autres RTT…

 

Chargée de mission dans un service fourre-tout, truqueuse patentée de notes administratives, G.O. pour délégations étrangères et hocheuse de tête en réunions, Zoé Shepard raconte avec un humour mordant ses tribulations de fonctionnaire désespérée dans un univers bien pire que tout ce que vous pouviez imaginer.

Petit extrait pour vous mettre l’eau à la bouche :

« J’ai longtemps cru que mon gène de la paresse était récessif. Puis j’ai intégré la fonction publique territoriale et ai constaté que, dans un environnement favorable, il pouvait pleinement s’exprimer, même après avoir été en latence durant mes années d’études passées à ne pas apprendre grand-chose sinon à être sélectionnée. Sélection qui s’avère être une véritable anti-bande-annonce de ce qui sera demandé à l’heureux lauréat lorsqu’il atterrira dans une collectivité territoriale. Les efforts requis pour intégrer l’école sont inversement proportionnels à ceux qu’il doit – ou ne doit pas – déployer une fois en poste.

« Comme Coconne me l’avait promis, je trouve un énorme dossier estampillé d’un Post-it, sur lequel elle a sobrement indiqué : «Faire des camemberts». J’ouvre le dossier et récupère les deux tableaux récapitulatifs des années précédentes. «Faire des camemberts», en coconnien, signifie présenter une poignée de graphiques secteurs Excel pour comparer l’évolution des différents postes budgétaires du service sur deux ans, ce qui devrait me prendre une vingtaine de minutes et m’assurer la reconnaissance éternelle du très impressionnable directeur général de l’AIE (Affaires internationales et européennes, ndlr), Bertrand Dupuy-Camet, incapable de trouver le programme pour additionner deux et deux sur son ordinateur.

« Si l’on y ajoute les quatre rapports parlementaires que je dois synthétiser et les deux réunions auxquelles je dois faire acte de présence, j’évalue mon travail de la semaine à huit heures. Soit une grosse semaine de travail dans ce monde professionnel pour le moins déroutant. La première fois, ça m’a semblé tellement ahurissant que j’ai eu envie d’en rire.

« Les cinq premières minutes.

« Avoir fait autant d’études pour ça me semblait fou.

« Huit ans dont deux d’esclavage en prépa, deux à Sciences-Po et dix-huit mois à l’ETA. Pas l’organisation terroriste basque, mais l’Ecole territoriale d’administration, formant les administrateurs territoriaux.

« Huit ans pour ça. Ça, c’était une cinquantaine de pages de documents que « The Boss » avait déposées sur mon bureau, le jour de mon arrivée, avec un air gêné :

– Pourriez-vous me faire une synthèse de ce dossier relatif à l’utilisation des fonds européens ? Vous avez la semaine, ça ira ? a-t-il demandé, le visage déformé par l’inquiétude d’être pris pour un esclavagiste.

« – C’est une plaisanterie ? ai-je demandé, incrédule.

« – Je sais, a-t-il rajouté, c’est… comment dire ?…

« Ahurissant de penser qu’il me faudra cinq jours de travail pour une note que j’aurai fini de rédiger dans deux heures, pause incluse ?… Un gros travail.

« – Ecoutez, vous pouvez me le rendre en milieu de semaine prochaine si vous n’avez pas fini. Il n’y a aucun problème, a-t-il achevé avant de quitter mon bureau, me laissant pour le moins songeuse.

« Une heure et demie plus tard, l’imprimante crachotait ma note et je me demandais vraiment où j’avais atterri.

(Sharon Dominick/Getty Images)
(Sharon Dominick/Getty Images)

« Aujourd’hui, en me connectant au réseau du service, je sais précisément où j’ai touché terre : un univers absurde où les gens qui en font le moins se déclarent dé-bor-dés et où les 35 heures ne se font pas en une semaine…… »

On comprend mieux pourquoi les deux tiers des jeunes qui font des études aimeraient faire carrière …. dans « la fonction publique » !!!!