Cannes et les Hors-la-Loi…..


J’ai parcouru les nombreux articles commentant les réactions suscitées par la présentation de ce film au Festival de Cannes, ainsi que les commentaires des lecteurs s’exprimant sur internet.

 On voit bien, à travers toutes ces réactions, que les Français sont divisés sur la manière de « recevoir » ce film, et que ces divisions sont extrêmement profondes. La lecture de l’Histoire de cette guerre atroce est devenue difficile, en raison des sensibilités  qui sous-tendent les jugements exprimés, sans parler des « manipulations » idéologiques qui polluent les débats.

En vérité, il y a ceux qui ont vécu « l’avant », le « pendant » et « l’après » de cette guerre civile, et parmi eux, ceux qui ont souffert de l’assassinat sauvage, ou la mort au combat, d’un proche ou d’un ami. Leur sensibilité demeure à fleur de peau, ce qui explique la force, et parfois, la violence de leurs réactions dès qu’ils ont le sentiment que s’exprime un déni de leurs souffrances, en même temps qu’une exaltation des souffrances de l’autre camp.

Il y a ceux qui n’ont rien vécu de tout cela. Ce sont ceux qui en parlent avec le plus de légèreté, en justifiant leurs propos par des considérations philosophiques ou morales, le plus souvent superficielles, auxquels les précédents sont insensibles. Leurs jugements sont sévères, et n’expriment aucune commisération pour ceux dont les souffrances leur sont indifférentes, voire étrangères.

En outre, ils donnent le sentiment de s’abriter derrière cette sévérité parce qu’elle leur donne bonne conscience et qu’elle leur permet de s’affranchir d’un héritage historique qui est aussi le leur…Car faut-il rappeler que ce qui est devenu une guerre, après avoir été une opération de maintien de l’ordre, s’est déroulé sous des Gouvernements socialistes, avant que de Gaulle ne s’empare du pouvoir ????

Il est significatif de constater que dans tous les commentaires qu’a suscitée la polémique consécutive à la sortie du film « Hors-la-Loi » à Cannes, personne n’a eu l’imprudence (le courage ???) de rappeler que les « évènements de Sétif » se sont produits alors que de Gaulle était au pouvoir, et que son Gouvernement comptait un nombre important de ministres communistes, que son Ministre de l’intérieur qui était « à la manoeuvre » était un socialiste, qui non seulement sont restés silencieux devant la violence de la riposte française, et n’ont pas quitté le Gouvernement, mais ont approuvé l’action qui a été menée….

 Nul ne peut nier ce que les Algériens ont enduré pendant cette guerre. Nul ne peut nier, non plus qu’ils ont été les principales victimes des méthodes terroristes des « hors-la-loi » de l’époque….Et que le plus grand nombre de ces victimes algériennes a payé de son sang sa proximité avec des Pieds-Noirs. Car nul ne peut nier non plus les liens très forts qui ont existé parfois entre Algériens et Pieds-Noirs, car tous les Pieds-Noirs n’étaient pas des « exploiteurs » et contrairement aux caricatures popularisées après l’Indépendance de l’Algérie, de fortes amitiés existaient , qui se nouaient dès le plus jeune âge, à l’école, au lycée ou dans le sport…..

La nécessité de faire oeuvre de vérité en ce qui concerne les Algériens, ne justifie donc pas pour autant, la négation, par le silence, de ce que les « Européens » ont dû souffrir de leur côté.

Et en tout état de cause, les « Européens », s’ils ont commis de lourdes erreurs sur le plan historique,  ont payé ces erreurs au prix fort, par un exil à nul autre pareil au cours du siècle écoulé, un exil que dans d’autres contextes ont aurait assimilé à un nettoyage ethnique. 

Un exil à nul autre pareil, car leur accueil en France – il n’est pas un seul Pied-Noir qui ne se souviennent des paroles abjectes d’un Gaston Deferre – n’a fait qu’approfondir la douleur de l’exil…… 

Ceci dit, ce qui « énerve » beaucoup de ces « Européens » encore aujourd’hui, c’est que l’on puisse impunément, sans que voix au chapitre soit accordée à leur point de vue, travestir des faits qui appartiennent désormais à l’Histoire, et que de part et d’autre nous devons assumer.

Ainsi, comment peut-on croire qu’ils puissent accepter que l’on aborde le sujet des exactions commises du côté français, en glissant silencieusement sur les horreurs commises par le FLN.

 Tout le monde sait que des prisonniers ont été passés à la « gégène » par les militaires. Mais qui se pose la question de savoir pourquoi et dans quel contexte ???? Qui s’est interrogé sur la question de savoir comment un jeune appelé de vingt ans peut réagir devant le spectacle d’une famille vivant dans une ferme isolée qu’il trouve par un triste matin de novembre, sous la pluie, dispersée autour de sa maison, avec l’envie de vomir devant des cadavres atrocement mutilés, égorgés,ou éventrés, gisant dans la boue….Certains ont pu « péter les plombs » comme on dit vulgairement aujourd’hui….Car à cette époque, les « cellules d’assistance psychologiques » n’existaient pas, et beaucoup de soldats du contingent ont été durablement marqués par ce qu’ils ont vécu. Les exemples de ce genre abondent. Je ne vais pas les multiplier, ce serait trop facile.

Les Algériens, – certains Algériens- surfant sur la vague qui porte la mode de la « victimisation » , souhaitent être considérés comme des victimes et seulement comme des victimes, espérant faire oublier qu’ils ont été eux aussi, des bourreaux.

Le film « Hors-la-Loi »  ne fait pas exception. Montrer les massacres d’Algériens en 1945, à Sétif, en glissant rapidement sur le fait que ces massacres- ( commis sous le Général de Gaulle aujourd’hui encensé comme le « libérateur de l’Algérie », alors que des Ministres Communistes se trouvaient dans son Gouvernement et sont restés silencieux, ce qui devrait inciter la gauche communiste à plus de réserve sur cette page de notre Histoire…) – ont fait suite au massacre injustifié de centaines d’Européens qui manifestaient pour célébrer, le 8 Mai 1945, la victoire contre les Allemands, a été vécu, une fois de plus comme une sorte de déni, par ceux qui ont manifesté lors de la sortie de ce film.

On peut comprendre le ressentiment de beaucoup d’Algériens à l’égard de la France.

Mais ce que l’on a du mal à comprendre c’est qu’ils aient tout fait pour devenir Français au lendemain de l’indépendance de leur pays pour laquelle ils se sont battus.

Ce que l’on a du mal à comprendre, parce que ça ne cadre pas avec ce légitime ressentiment, c’est que la France offre l’asile, héberge, soigne d’anciens dirigeants du FLN, et même d’anciens combattants, un peu comme si des Officiers du 1er REP avaient trouvé refuge en Algérie….

Ce que l’on a du mal à comprendre, c’est que malgré tout ce ressentiment accumulé, et entretenu par les dirigeants de l’Etat algérien, la jeunesse algérienne n’ait qu’une seule ambition : obtenir un visa pour la France et quitter son pays.

On peut comprendre que des Algériens, devenus français, ne se sentent pas à leur aise dans le pays qui les a accueillis.

 Mais ce que l’on a du mal à comprendre c’est que personne n’oblige personne à devenir Français s’il ne le souhaite pas. D’autant que beaucoup d’Algériens,- ce sont souvent ceux-là qui se manifestent le plus – ont conservé la double nationalité, que la France leur a généreusement concédée . Ce qui leur permet de jouer sur les deux tableaux et de manger aux deux rateliers, selon les circonstances et en fonction de leurs intérêts. 

C’est le cas de ce Bouchareb, dont on peut se demander s’il s’exprime en tant qu’Algérien ou en tant que Français, et dont le film, financé à 59% par les contribuables français ne ferait pas l’objet d’une telle polémique s’il n’était pas aussi ambigu !!!! 

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