13/12/2007 N°1839 Le Point . Lu dans l’excellent numéro de cet hebdomadaire d’information.
« Jacques Marseille – La France doit exiger des « excuses de l’Italie
« A l’heure où le gouvernement algérien exige des « excuses » de la France pour les crimes imputés à « la colonisation, il est temps que la France se libère enfin du poids qui l’étouffe depuis plus de deux mille « ans… et exige à son tour de l’Italie des excuses pour les crimes perpétrés par César et ses légions contre « nos ancêtres les Gaulois.
« En effet, si la conquête romaine, comme la conquête française de l’Algérie, a fait bénéficier notre pays de « certains bienfaits, elle l’a fait au prix de massacres et d’asservissements dont il n’est pas illégitime de « rappeler les manifestations les plus cruelles.
« Il faut tout d’abord souligner que la Gaule était au moment de l’agression italienne un pays de cocagne. « Loin d’être un ensemble de villages repliés sur eux-mêmes-contrairement à ce que veut montrer Astérix-, « les campagnes de la Gaule étaient densément peuplées. Loin d’être de féroces éleveurs de troupeaux « habitant dans de misérables huttes au milieu des forêts, nos ancêtres étaient les acteurs éclairés d’une « économie en plein développement qui a permis une expansion démographique sans précédent. A la veille « de sa conquête par les colonisateurs italiens, la Gaule comptait sans doute 8 millions d’habitants. « Techniciens habiles et artisans réputés, les Gaulois produisaient en série le verre plat utilisé pour les « fenêtres, les vases à boire, les bouteilles trapues, les gobelets, les vases à parfum, les gallicæ (grosses « galoches à semelles épaisses) et les chariots qui s’exportaient dans l’ensemble du monde méditerranéen. « Exploité activement dans le Limousin, l’or excitait l’imagination et la convoitise des étrangers. Dans les « villes qui se multipliaient, les techniques ne différaient pas de celles utilisées dans ce qu’on appelait alors « le monde « civilisé ».
« C’est ce pays prospère à la culture originale que va conquérir le colonisateur italien (c’est-à-dire « romain) au prix de méthodes qui sont autant de violations des droits de l’homme. Pour s’emparer de sa « proie, au mépris des conventions internationales, Jules César multiplie des campagnes terroristes qui en « font, plus que Napoléon ou le père Bugeaud, celui dont Hitler a certainement dû s’inspirer. Outre les 600 « 000 ou 700 000 tués-soit le dixième de la population que comptait alors la Gaule indépendante !-, César « s’est livré à de véritables opérations d’extermination, comme celles dont furent victimes, en 53 avant J.-C., « les Eburons. Ces « ancêtres » des Belges s’étant révoltés, César voulut, écrit-il lui-même, « anéantir leur « race et leur nom même », une définition avouée de ce qu’on nomme aujourd’hui un génocide. En-52, « excédé par la résistance des habitants d’Avaricum (Bourges), il se livre à un carnage qui témoigne d’une « véritable folie meurtrière. Seuls 800 habitants sur 40 000 en réchappèrent. En-46, lorsqu’il fait étrangler « Vercingétorix à Rome, il bafoue sans vergogne la future convention de Genève de 1929 sur le traitement « des prisonniers de guerre. Enfin, en imposant à la Gaule leur langue, leur religion et leur culture, les « Italiens se livrent à un véritable génocide culturel. Imaginons ce que serait aujourd’hui une France celtisée « où la langue anglaise et le tempérament irlandais s’allieraient pour faire de notre pays un des champions « de la mondialisation. C’est tout ce potentiel de croissance que les Romains ont brisé et dont les Italiens « devraient s’excuser lors de la prochaine visite officielle de leur président du Conseil en France.
« Ridicule et grotesque, pensez-vous ? Evidemment ! Comme l’est l’exigence du gouvernement « algérien. Comme le grand historien Marc Bloch le rappelait, la compréhension du présent repose sur la « connaissance du passé et non pas sur son instrumentalisation. Comprendre le passé, c’est se demander « pourquoi, de Victor Hugo à Zola et de Jaurès à Maupassant, personne ou presque n’a remis en question les « principes de la colonisation française. Qui condamnerait Jaurès d’avoir osé proclamer en 1903 à la « Chambre des députés : « […] la France a d’autant le droit de prolonger au Maroc son action économique et « morale qu’en dehors de toute entreprise, de toute violence militaire, la civilisation qu’elle représente en « Afrique auprès des indigènes est certainement supérieure à l’état présent du régime marocain » ?
« On le voit, Nicolas Sarkozy a fait beaucoup et peut-être trop pour « excuser » les méfaits du « système colonial français en Algérie. En fait, si les Algériens voulaient trouver des réponses à leur mal-« développement, ils devraient surtout exiger des excuses de ceux qui les gouvernent depuis « l’indépendance. Si l’Algérie est aujourd’hui un pays riche peuplé par des pauvres, elle le doit surtout aux « gaspillages, aux erreurs de gestion et à la corruption qui gangrènent sa classe politique. En 1962, le PIB « par habitant était en Algérie de 1 433 dollars (de 1990). En Tunisie, autre pays soumis au système colonial « français, il s’élevait à 1 379 dollars. Quarante ans plus tard, il est de 2 813 dollars en Algérie et de 4 710 « dollars en Tunisie, qui ne possède pourtant ni gaz ni pétrole. Est-ce la colonisation qui est responsable « d’un tel décalage ?
J’adore l’humour de Jacques Marseille !!!! Sarkozy devrait envoyer la facture à Berlusconi….