Garde des « sots » ???


On sait que l’un des plus beaux titres de gloire de Christiane Taubira, nouvellement nommée Ministre de la Justice par François Hollande, est d’avoir été à l’Assemblée Nationale, la  rapporteuse de la  » loi mémorielle » française concernant la reconnaissance des traites et des esclavages comme crimes contre l’humanité.

Le reproche qui lui a été fait par ses opposants, a toujours été d’avoir eu une mémoire infaillible au sujet des crimes commis, en matière d’esclavage, par les nations « blanches », et d’avoir consciencieusement occulté les mêmes crimes commis, en Afrique, par les Arabes à l’égard des populations noires.

Comme d’habitude, pour moi, la lecture du quotidien algérien « El Watan », est instructive, car ce journal aborde souvent des questions que les médias français se gardent bien d’évoquer, afin de respecter le cadre rigide de ce que l’attitude « politiquement correcte »leur permet de traiter.

Il se trouve qu’El Watan, à ma grande surprise aborde, avec un certain courage journalistique, ce sujet délicat dans un article qui vient de paraître. Il nous apprend, ce que nous savions déjà, que l’esclavagisme qui est une pratique qui n’est pas née en « Occident », a toujours cours, aujourd’hui dans certains pays arabes, dont fait partie la Mauritanie.

On aimerait connaître le point de vue de Madame Taubira sur ces pratiques, point de vue qui , à la lumière de son engagement personnel contre l’esclavage, aurait une portée encore plus significative, depuis qu’elle est devenue Ministre de la Justice de la « Patrie des Droits de l’Homme ».

Je cite « El Watan »:

http://www.elwatan.com/international/les-noirs-de-mauritanie-sont-victimes-d-un-racisme-orchestre-par-l-etat-27-05-2012-172311_112.php

«Les Noirs de Mauritanie sont victimes d’un racisme orchestré par l’Etat»

Biram Ould Dah Abeid, le président de l’IRA, a été arrêté le 1er mai dernier à son domicile. Avec dix autres militants anti-esclavagistes, il est accusé d’avoir brûlé des ouvrages de référence des sciences islamiques, reprochant à leurs auteurs d’avoir justifié la pratique de l’esclavage en Mauritanie au nom de l’islam. Selon eux, l’incinération visait à «débarrasser la Mauritanie d’ouvrages musulmans dépassés qui incarnent et soutiennent la légalité de la pratique de l’esclavage».

-Quelle est actuellement la situation des droits de l’homme en Mauritanie et particulièrement celle de la population noire que vous dites représenter ?

La situation des droits de l’homme en Mauritanie est actuellement très difficile.Le régime dictatorial en Mauritanie ne respecte pas les libertés démocratiques. Il empêche toute forme d’organisation et réprime systématiquement les manifestations pacifiques. Le droit à l’expression est également foulé aux pieds. La situation est intenable.

-Est-il vrai que la pratique de l’esclavage se poursuit en Mauritanie ?

C’est, malheureusement, la triste réalité. Actuellement, l’esclavage bat son plein en Mauritanie. 5% de la population en Mauritanie sont des esclaves domestiques.Ces derniers n’ont pas accès à l’éducation et n’ont pas le droit de posséder des pièces d’état civil. Ce qui fait qu’ils n’ont pas le droit à la propriété et ne peuvent pas voyager.
Il faut ajouter que ces personnes ne bénéficient pas de repos, encore moins d’un salaire. Ils subissent régulièrement des châtiments corporels. Pis encore, ils n’ont aucun droit sur leurs enfants et n’ont pas le droit au mariage. Et je vous informe que le phénomène s’est aggravé.

-Comment expliquez-vous cette aggravation ?

Et bien tout simplement à cause de la réactivation de la filière orientale de trafics d’esclaves de Mauritanie vers les pays du Golfe. La situation des Noirs est actuellement très difficile car ils sont victimes d’un racisme orchestré par l’Etat lui-même.

-Quel est, selon vous, l’objectif visé à travers le traitement infligé à la population noire ?

Le traitement infligé aux Noirs vise avant tout à dénégrifier davantage la Mauritanie. La majorité de la population mauritanienne est noire. Mais il y a une minorité arabo-berbère qui justifie son accaparement du pouvoir par un alibi démographique qui est faux.
C’est cet état de fait qui les pousse à sévir davantage et à rendre la vie impossible aux Noirs.

-Y a-t-il, en ce moment, des militants de votre mouvement en prison ?

Oui, il y en a plusieurs dizaines. Il y a des vagues de prisonniers qui se relayent dans les prisons du régime. Le pouvoir opère régulièrement des rafles. Les gens sont emmenés dans des lieux inconnus. D’autres ont dû fuir pour éviter de subir les exactions du régime.

-Et quel est le nombre de Mauritaniens noirs qui ont fui ?

Il y en a environ 220 000. Ils se répartissent entre le Sénégal et le Mali.

-Y a-t-il des Noirs qui ont été exécutés par le pouvoir ?

Oui. Entre 1986 et 1992, il y en a eu 6700.

-Les Mauritaniens noirs ont-ils le droit de créer des associations de défense des droits de l’homme ?

Pas du tout. Les associations qui ne sont pas parrainées par des arabo-berbères ne sont pas autorisées à activer.

-Quelles sont les principales revendications de l’IRA ?

Le départ de la dictature et la déconstruction totale de la gouvernance raciste et esclavagiste.   

-Vous accusez la Mauritanie d’avoir aidé les Arabo-Berbères (Touareg) du nord du Mali à créer un Etat ? Avez-vous des éléments de ce  que vous avancez ?

Oui, nous avons des éléments. Le MNLA est né à Nouakchott. Ce mouvement s’est armé dans la capitale mauritanienne. Nous connaissons leurs villas et les officiers qui les encadrent sur place. Nous savons aussi que l’Etat et l’armée ont mis à leur disposition des moyens.

-Y a-t-il d’autre pays de la région qui aident le MNLA ?

A ma connaissance non. Je n’ai pas d’autres éléments en ma possession. 

L’entretien a été réalisé à Dakar (Sénégal) le 24 avril 2012.

Une « interview » comme celle qui précède aurait-elle pu être publiée dans un journal français ???

Probablement pas, de peur de réveiller des passions qui couvent autour de la question de l’esclavage en Occident, lourdement culpabilisé par la mémoire d’un passé colonial que certaines minorités entretiennent avec des arrières-pensées « victimaires ».

Un passé que les nations coupables doivent assumer, certes, au nom de leur Histoire, ce qui ne signifie pas que les générations actuelles doivent être considérées comme indéfiniment coupables des actes commis par leurs ancêtres… Si tel était le cas, il est peu de pays au monde dont les générations actuelles seraient exemptées de ce genre de remords… 

En tout état de cause, notre « Garde des Sots » serait bien inspirée de nous livrer son point de vue d’Humaniste militante sur le sujet de l’article évoqué ci-dessus, qui demeure, hélas, dans l’actualité.