La revue de Presse du jour est instructive.
Elle reflète les distorsions profondes qui caractérisent les analyses qui sont proposées, quand aux sources de l’émeute qui s’étend désormais bien au-delà des « quartiers sensibles » de l’agglomération londonienne.
Pour la plupart, le point de départ ( le prétexte ???), a été la manifestation d’une grosse colère suscitée par la mort d’un homme tué par des policiers d’une balle dans la poitrine.
Peu de commentateurs s’attardent sur l’énorme disproportion qui existe entre les pillages, les destructions, les violences commises, et le fait initial.
Certes, comme aurait pu dire Jack Lang, « il y a eu mort d’homme »….
Mais la bien-pensance de nos journalistes les incite à insister beaucoup plus lourdement sur le fait que la « victime » de ce tir policier est un « père de famille », que sur ses antécédents de chef de gang et de trafiquant de drogue, rapidement cités dans les premiers articles, et occultés tout aussi rapidement ensuite….( de la difficulté d’être à la fois un chef de gang et un bon père de famille ).
Très vite, le « souci d’informer » les a conduit à souligner que l’expertise balistique avait conclu mardi que rien ne permettait de prouver que l’homme avait ouvert le feu sur les policiers. Aucun ne précise que selon la même expertise rien ne permet de prouver le contraire…..
Sur les « causes profondes » de ces émeutes, les mêmes distorsions existent. D’un côté il y a les tenants de l’origine « sociale » de la colère, « justifiée » par les coupes claires réalisées dans les budgets sociaux afin de réduire le déficit budgétaire. De nombreux émeutiers, viennent souvent, selon les mêmes, de quartiers où le chômage règne.
Peu de commentateurs s’aventurent à poser la question qui fâche: dans ces quartiers où l’économie souterraine a supplanté l’économie réelle, est-on certain que, pour tous, le chômage est synonyme de pauvreté ????
Car certains commentaires télévisés, vite supprimés des reportages en images, laissaient entendre que certains grands magasins ont été dévalisés par des groupes de pillards arrivés en Mercedes décapotable….
D’autres commentateurs évoquent -timidement- « les facteurs ethniques » et osent évoquer le fait que de nombreux émeutiers étaient équipés d’Iphone ou de Blackberry pour se retrouver et se communiquer les « coups » à faire, en signalant, entre autres les magasins non protégés par une présence policière. Vêtus de Jeans Benetton, portant des lunettes Ray-Ban, ils sont chaussés, pour courir plus vite, de Nike haut de gamme…
Dans la Presse française, quelques journaleux ironisent sur le désarroi de nos amis britanniques, rappelant qu’il n’y a pas si longtemps, l’Angleterre était citée en exemple pour la réussite de son » modèle d’intégration ». Comme si nous avions à nous glorifier du nôtre.
La Grande-Bretagne redécouvre simplement le charme discret du multiculturalisme, comme nous lors des émeutes de 2005.
Le fait est que le Royaume-Uni s’interroge : comment arrêter les destructions qui, en trois jours, ont dévasté des quartiers entiers de Londres, de sa banlieue, ainsi que de Birmingham, de Bristol et de Liverpool ? C’est une guérilla urbaine qui est menée sur le territoire du royaume par une nouvelle espèce de hooligans auxquels la police s’est montrée incapable de répliquer.
Totalement dépassée, la Police semble impuissante à endiguer les assauts de hordes en furie saccageant tout sur leur passage.
Et pour cause: elle doit faire face à des agressions de voyous sans scrupules qui n’hésiteraient pas à tuer, répondant ainsi à « l’appel » des rappeurs ( voir mes billets précédents sur ce sujet ), alors que chaque policier sait maintenant que la moindre bavure prendra des proportions judiciaires qui dissuadent toute riposte efficace.
Près de seize mille policiers ont été déployés dans les points névralgiques de la capitale et de sa banlieue, dans la nuit de mardi 9 à mercredi 10 août.
Cela ne suffit pas à rassurer certains habitants de Londres, qui ont décidé de patrouiller dans leur quartier en constituant des « groupes d’autodéfense ».
Selon l’Express, trois de ces « patrouilleurs » volontaires ont été renversés par une voiture. Deux sont morts sur le coup. Le troisième est mort peu après son hospitalisation des suites de ses blessures. Sans doute victimes de courageux émeutiers, qui ont pris la fuite.
La population, exaspérée par l’impuissance des forces de polices à rétablir l’ordre a décidé de participer à l’identification des émeutiers en les dénonçant à la Police: un internaute a créé un blog intitulé « Catch a looter » sur lequel il poste à longueur de journée des photos tirées de diverses sources (journaux, agences de presse, services de police…) et incite les lecteurs qui reconnaîtrait un émeutier à contacter les services de police.
On voit bien ainsi sur quel terrain les britanniques sont entraînés en réponse à cette guérilla urbaine.
Si l’Etat n’est plus en mesure d’assurer convenablement la protection de ses citoyens honnêtes contre les assauts de bandes organisées de voyous, ce sont les citoyens eux mêmes qui suppléeront à la défaillance des Institutions.
Le refus obstiné de voir la dimension ethnique de ces émeutes prend un tour pathétique.
Il est évident que ces violences sont le fait de « minorités visibles » pour qui la pauvreté n’est qu’un alibi.
Ces « jeunes » (selon le terme consacré) jouissent d’un niveau de vie qui aurait paru inouï aux Français pauvres de 1930. Ces derniers ne se croyaient pas obligés de faire des émeutes pour autant.
D’ailleurs dans notre culture judéo-chrétienne, la pauvreté n’a jamais été considérée comme une justification légitime du vol et de la rapine. Cette culture est un sous-produit de valeurs importées de pays où il est difficile de sortir le soir en s’éloignant de son hôtel, sans risquer sa vie pour quelques dollars….
C’est, en outre, un intolérable outrage qui est fait aux pauvres que de les considérer comme des voleurs en puissance. Car nombre sont ceux qui sont issus de familles pauvres, comme moi, et qui ont été éduqués selon des valeurs de probité et de respect des lois, qui sont exaspérés des amalgames effectués à tous propos entre pauvreté, et refus des lois ou malhonnêteté.
On peut être pauvre et digne.
Mais on peut, hélas aussi, être pauvre et être un voyou indigne. C’est tout aussi vrai que chez » les riches »….
Et ce n’est pas forcément parce que l’on fait partie des « indignés », que l’on est honnête…..
Bref, et quand à ceux qui font du capitalisme le bouc émissaire de toutes ces misères, je les invite à méditer la fameuse phrase de Churchill: « The inherent vice of capitalism is the unequal sharing of blessings; the inherent virtue of socialism is the equal sharing of miseries. »