( Suite du billet précédent ).
Il faut restituer la déclaration de Fillon, en présence de son « ami » Vladimir, dans son contexte, ce que ne font évidemment pas les médias français dont toute la « puissance de feu » est concentrée depuis toujours contre Poutine dont il convient d’entretenir la « diabolisation ».
La « diabolisation », c’est une technique, héritée des méthodes pratiquées par le communisme pour éliminer les contestataires. Les « marxistes » n’en ont rien oublié : on utilise, à l’extrême, le moindre écart de langage imprudent de « l’adversaire »pour discréditer tout le reste de son discours, afin d’échapper à un vrai débat, de fond, sur ses idées, et afin de rendre celles-ci inaudibles, le tout, en se pinçant le nez et en se bouchant les oreilles…
Car le but, c’est de l’empêcher de diffuser ses idées considérées, évidemment comme nocives ( « nauséabondes » disent-ils ), car contraires à la pensée « correcte »( « totalitaire », dirons-nous !!!).
Ces méthodes, l’ancien du KGB qu’est Poutine, les connaît parfaitement.
Elles ne l’impressionnent pas. Il les a pratiquées lui-même, dans sa jeunesse…
Elles ne le feront pas dévier d’un pouce la direction qu’il a prise, depuis qu’il a conquis le pouvoir en Russie.
Il se considère, en effet, comme une sorte d’héritier des Tsars de la Grande Russie. Après avoir « liquidé » les derniers vestiges d’un communisme moribond qui s’est effondré sur lui-même, son ambition est de faire de la Russie contemporaine l’un des grands de ce monde multipolaire, et un interlocuteur incontournable parmi les pays émergents: au Moyen-Orient, aujourd’hui, et en Europe, demain.
Dans ce contexte, il n’est pas loin de se considérer comme l’un des derniers défenseurs des valeurs considérées traditionnellement comme sacrées en Occident, jusqu’à ce que « notre » Europe bascule dans la négation de son héritage historique, au nom d’une pseudo-modernité et d’un progressisme qui n’atteint, en Russie, qu’une faible couche de la population, parmi les « zintellectuels », le « show-business » ou des groupuscules contestataires, que nos médias portent, parfois abusivement, aux nues.
Pour promouvoir et défendre ces idées, La Russie organise, régulièrement, un colloque réunissant des philosophes, des économistes, des personnalités du monde politique international.
Une sorte de « Davos », à la russe, mais dont les débats ne sont pas moins intéressants que ceux du fameux « séminaire », même s’ils s’écartent des idées communément répandues dans l’Occident libéral, sur les problèmes sociétaux ou économiques auxquels la mondialisation nous confronte.
« Il y a 10 ans, Valdaï a été mis en place comme une possibilité de rencontre informelle de l’élite intellectuelle russe et occidentale. Mais dernièrement, le Club est devenu un forum unique, regroupant les experts du monde entier. Les spécialistes disent que le Club Valdaï est une réunion d’intellectuels qui,
comme la pratique l’a montré, ne se sont presque jamais trompés dans leurs
prévisions et recommandations ».
(Source:http://french.ruvr.ru/2013_09_18/L-optimisme-regne-dans-le-Club-Valdai-7058/).
Il est intéressant de s’attarder sur le discours prononcé par Poutine devant cet auditoire choisi. Nos médias ne s’intéressent pas à ce que pense et dit Poutine.
Ils ont tort.
Car ils y découvriraient un point de vue étonnant, qui rejoint celui qu’exprime une certaine Droite européenne, sur l’évolution de notre société, sur son laxisme, sur ses dérives. Un point de vue que la Gauche et les adeptes d’une « Droite molle », considèrent comme « nauséabond » .
L’Hebdomadaire « Courrier International » a publié un compte-rendu succint de l’intervention de Poutine devant cet aéropage parmi lesquels se trouvaient de nombreuses personnalités politiques internationales dont Fillon faisait partie.(http://www.courrierinternational.com/breve/2013/09/20/poutine-en-croisade-contre-la-decadence-occidentale).
Je le cite:
« Pour le dixième anniversaire du Club de discussion international baptisé Club Valdaï (du nom de la ville où il se tient, près de Novgorod au nord de la Russie), 250 hommes politiques, intellectuels, opposants, journalistes de 38 pays étaient conviés à échanger – librement, selon l’esprit du Club – sur le thème : « Comment renforcer l’unité de la société, de l’Etat et de la nation ».
Vladimir Poutine est arrivé en guest star pour la séance plénière de clôture, accompagné du pool de presse du Kremlin et de plus de vingt correspondants étrangers,selon le quotidien russe Izvestia.
Le président a parlé de la nécessité de conserver l’identité nationale russe face à la globalisation montante, tout en luttant contre le séparatisme.
Il a critiqué l’excessive « correction politique » de l’Occident et son renoncement aux valeurs traditionnelles, prêchant pour la préservation de la morale chrétienne (et les valeurs propagées par les grandes religions), et contre la tendance des Occidentaux à « bafouer la dignité humaine ». « On [l’Occident] rejette les principes moraux et toute indentité traditionnelle, qu’elle soit nationale, culturelle, religieuse ou même sexuelle… On mène des politiques mettant sur un pied d’égalité les familles nombreuses et les familles homoparentales, la foi en Dieu et la foi en Satan…”, a fustigé le président russe, dont les propos sont rapportés par le quotidien économique RBKdaily.
« Identité nationale », « défense des valeurs chrétiennes », rejet du « politiquement correct » etc… Cela ne vous rappelle rien ???
Etonnant discours au connotations « réactionnaires », selon la doxa à laquelle nos dirigeants nous ont accoutumé, non ???
Un discours qui semble traduire une certaine proximité intellectuelle avec celui d’une partie des Droites françaises et européennes, considérées abusivement comme des « droites dures », parce qu’elles mettent l’accent sur quelques uns des symptômes de la décadence de nos sociétés parmi lesquels la régression de valeurs morales considérées comme ringardes par « l’avant-garde » intellectuelle européenne.
On comprend donc mieux les réactions de la Presse française, relayant celles de la classe politique, à l’égard de Poutine qui a fait interdire en Russie, la « propagande homosexuelle », et qui sanctionne sévèrement les « femen » coupables d’avoir blasphémé dans des lieux de culte orthodoxe….( En France, nos « patriotes » socialistes ont choisi une « femen » comme effigie de « Marianne », symbole de la République sur un timbre poste !!! ).
François Fillon, lui, qui était déjà au centre d’une polémique sur le Front national, provoque de nouveaux remous politiques en France, pour avoir critiqué la stratégie de François Hollande sur la Syrie et salué « le rôle positif » de la Russie dans le conflit, devant un auditoire acquis aux analyses « réactionnaires » d’un Poutine renforcé par les points qu’il vient de marquer dans l’affaire syrienne, prenant une partie de la classe politique française, à contre-pied.
Ajoutons que l’ancien Premier ministre français, était un partisan de longue date, d’un rapprochement entre l’Union européenne et la Russie, perspective qui mériterait d’être envisagée, ne serait-ce que pour ne pas laisser à l’Allemagne seule, le bénéfice de ce rapprochement, et d’équilibrer l’alliance traditionnelle avec les Etats-Unis. Un retour à une conception gaullienne des alliances, en quelque sorte.
Fillon a persisté dans ses propos vendredi, soulignant sur son blog que la réaction « dérisoire » des socialistes ne le ferait pas « taire ».
Cette sortie de Fillon n’est donc pas totalement fortuite.
Ses mots prononcés dans un contexte où la « pensée réactionnaire » était bienvenue, sont vraisemblablement révélateurs d’un cheminement de la pensée de leur auteur, et ne resteront pas sans suite, lors des débats à venir, dans le cadre des primaires de l’UMP, puis de la campagne présidentielle de 2017…
Cela promet de belles empoignades !!!