On croyait que l’énorme bras d’honneur que l’élection de Trump adressait à la classe médiatique française, celle-ci ferait amende honorable, reconnaissant son erreur d’appréciation et son parti pris en donnant à des sondages d’une fiabilité douteuse, une publicité excessive ??? Et bien non.
Contrairement à ce qui se passe dans la Presse américaine (1),il est intéressant d’observer, en France, au lendemain de cet « accident de l’Histoire », les circonvolutions verbales dont les « experts » qui encombrent les débats télévisés font usage pour tenter de faire oublier ce que fut ce gigantesque « complot » pour manipuler une opinion pourtant septique à l’égard des sondages, et trouver des justifications à une bévue qui entame gravement la crédibilité d’un microcosme politico-médiatique déjà bien dégradée….
Et pourtant, « ils » frétillaient déjà, savourant la victoire de celle qui, malgré les énormes casseroles qu’elle trimbale,- sur lesquelles nos médias sont restés relativement discrets comparativement au traitement infligé à son concurrent – et malgré l’antipathie qu’elle suscite dans l’Amérique profonde, allait les libérer du spectre d’un retour de la Droite américaine, mettant fin au règne triomphant d’un camp démocrate baignant dans l’autosatisfaction, et l’ignorance, quand ce n’est pas le mépris, de la colère qui montait dans la majorité silencieuse du peuple américain….
Le Huffington Post expliquait : « Voici pourquoi Hillary Clinton sera élue présidente le 8 novembre 2016. » Comme on voit.
L’Obs, de son côté, affirmait : « Les swing states prêts à faire gagner Hillary Clinton. » Pour swinguer, ces states ont swingué.
France 24, par ailleurs, dépeignait « une femme au seuil de la Maison-Blanche ». Elle y restera.
Libération, enfin, rapportait : « Même la Crystal Ball de Larry Sabato, fondateur du Center for Politics à l’université de Virginie, qui prédit le résultat de toutes les élections présidentielles depuis 2000 […], donne Clinton vainqueur. »
«Hillary va passer, c’est sûr.» Alors même que les électeurs de la côte est des États-Unis se rendaient aux bureaux de vote par milliers, les journalistes des rédactions parisiennes, sûrs de leurs pronostics préparaient déjà leurs éditoriaux du « lendemain », sans se soucier de l’opinion de ceux qui suggéraient que « cela pouvait être serré », que les derniers sondages signalaient une remontée de Trump, malgré la « manip » de dernière minute ayant forcé le FBI à retirer sa plainte contre la candidate du « Parti du Bien »…..
Car, la victoire de Donald Trump, c’est avant tout, la défaite personnelle d’Hillary Clinton…..
Seul, dans « Slate », Jean-Marie Colombani, ex patron du quotidien du soir « Le Monde », esquisse une explication. Je cite : « La leçon: nous savons d’expérience que la peur est un levier électoral efficace pour les démagogues de tout poil. Il faut désormais compter avec la haine. La haine comme ressort d’une campagne victorieuse. Avec sa traduction: une véritable émeute électorale contre le système, contre les élites, contre les autres, contre ce qui n’est pas cette Amérique blanche dont on nous dit qu’elle a voté comme un seul homme ; traduction américaine d’un mot d’ordre bien connu: «On est chez nous »….( Fin de citation )
Le mot qui « monte » dans l’oligarchie politico-médiatique, c’est « la haine » !!!
Un mot qui donna son titre à un film qui montrait la colère des racailles de banlieues contre « le système »…. Il devient le mot qui justifie tout. Celui qui englobe la xénophobie, le racisme, le machisme, l’homophobie, l’égoïsme, la peur de l’Autre, et j’en passe qui permet de culpabiliser tous ceux qui ne partagent pas une vision angélique du monde, et que l’on voudrait réduire au silence.
Et bien non !!! Il n’y a aucune haine chez ceux qui refusent de se plier à une doxa qui s’apparente à un totalitarisme intellectuel comme ceux que l’on a connus sous l’ère du stalinisme triomphant.
Il y a seulement un sentiment de révolte contre « le mépris » hautain dont se pare une certaine bobocratie, convaincue qu’elle ne se trompe jamais de diagnostic, et considère ceux qui ne pensent pas comme elle, comme des analphabètes.
Et pourtant, on ne serait pas en mal de dénombrer les grossières erreurs par lesquelles l’oligarchie dominante s’est signalée au cours de ces dernières années.
Si le « Brexit » ne lui a pas servi de leçon, puisse-t-elle en tirer une de l’élection de Trump, avant qu’il ne soit trop tard…..