L’âge ne confère plus aucun privilège dans le monde d’aujourd’hui. Il en est même un qui, parmi ceux que l’on considère comme faisant partie des plus brillants esprits de notre époque, tel Jacques Attali, estiment qu’il faudra bien un jour songer à euthanasier les vieux qui vivent trop longtemps et qui coûtent bien trop cher à la société…..
Je conçois parfaitement que pour une génération qui s’est forgée dans un culte égoïste, celui de l’individualisme, la génération des »selfies’, celle de l’autocélébration, celle qui a renoncé à savoir d’où elle vient, qui a une conscience aigüe de ses « droits » mais ne s’interroge jamais sur ses devoirs, et qui se nourrit de l’illusion d’avoir inventé un « monde nouveau », il est irritant de sentir le regard « oblique » des anciens qui observent son agitation fébrile à travers le prisme de leur propre vécu.
Il est vrai qu’un monde sépare ma génération et celles qui m’ont suivi.
Il y a celle qui a connu la pauvreté et les tickets de rationnement dans sa jeunesse, l’armée et la guerre, la soif, la peur, la fraternité d’armes, les semaines de 48 heures de travail,,.. et il y a celle qui a reçu en héritage les richesses créées au cours des « trente glorieuses ».
Il y a celle qui a eu plus d’une fois à risquer sa peau en croyant « faire son devoir », et qui s’est élevée dans la hiérarchie sociale par les travail et les sacrifices et celle pour qui l’ascenseur social a bien fonctionné et qui est passée d’un amphi de l’ENA à un fauteuil de banque ou de préfecture, avec, au milieu, le rituel stage de « young leader » aux USA, et qui, en conséquence, s’exprime dans un anglais parfait…..
C’est à cette dernière que je m’adresse, car je sais , par ailleurs qu’il y a au sein de cette jeune génération , ceux qui souffrent, angoissés par la précarité de leur avenir.
« Cela dit, on ne peut reprocher à personne sa date de naissance, ni d’avoir jamais senti passer « le vent du boulet »….( Régis Debray ).
Ces « têtes » là, je les ai toutes connues, et vues à l’œuvre: les meilleures comme les pires d’entre elles.
Il en manque même une qui, dans l’imaginaire de ceux qui lui ont succédé, personnifiait « le monde ancien »: c’est René Coty, dont l’épouse, qui n’avait pas encore accèdé au grade de « Première Dame », était la cible des humoristes « d’avant-garde », car elle personnifiait une gentillesse quasi maternelle, et était adorée par le peuple….
Car si certains se glorifient encore d’avoir « fait Mai 68 », moi, je fais partie de ceux qui ont vécu « Mai 58 » et le célèbre « Je vous ai compris »….Dois-je faire comprendre que ça laisse des traces ???
En creusant un peu plus, dans ma mémoire, me revient le souvenir de la Déclaration de guerre à l’Allemagne par Édouard Daladier ( l’homme des « Accords de Munich » une lâcheté qui aura couté cher à une génération d’européens !!! ) écoutée par mon père, l’oreille collée à sa vieille radio. Je me souviens aussi d’avoir chanté, enfant, à l’école, lors de la levée des couleurs, chaque matin, « Maréchal, nous voilà, devant toi le sauveur de la France »…..
Car il se trouve que j’ai une redoutable mémoire.
Les dures épreuves que j’ai dû affronter durant ma longue existence, m’ont appris à « relativiser » bien des situations, ce qui m’autorise, aujourd’hui, à porter un regard « distancié » sur l’ époque actuelle, en m’interrogeant sur les échecs d’une certaine génération, – la mienne – héritière des Lumières, éduquée dans le latin-grec, convaincue qu’elle pourrait agir sur les événements par l’exercice de la raison critique et construire une société plus juste, fondée sur un ordre républicain aujourd’hui chancelant,
Mais, comme l’écrit fort bien Régis Debray, dans un article publié dans « Le Figaro Vox », »la fabrique de l’opinion a changé d’échelle, et les industries lourdes de l’image-son ont rendu cette ambition pédagogique obsolète ». Et comme le regrette le même Régis Debray, » L’action publique a coupé les ponts avec la pensée. Place aux communicants: sondeurs, animateurs, acteurs, cameramen, photographes, spin doctors… », relayés par des « commentateurs » bavards, incultes et imbus de la fonction médiatique qu’ils remplissent, fort mal, dans une société en plein désarroi.
Je crois, comme le prétend Régis Debray dans le même article, que la mondialisation » crée partout un déficit d’appartenance culturelle, donc un trou d’air où s’engouffre le retour à des sources identitaires plus ou moins fantasmées. La mondialisation heureuse, c’est à l’arrivée une balkanisation furieuse. «
Je ne crois pas un seul instant à la « mondialisation heureuse » que l’on promet à nos enfants. Je pense, au contraire que la mondialisation à marche forcée est vouée à l’échec, car elle ne sert que les intérêts d’un monde de « marchands ».
La machine à broyer les identités ne tardera pas à s’enrayer. Le seul espoir que l’on puisse nourrir à son égard, c’est que son coup d’arrêt ne suscitera pas de désordre, car un vent mauvais souffle sur l’Europe ( c’est Macron qui le dit et je crois qu’il a raison ) et l’on peut craindre des soubresauts tragiques dans un futur qui n’est plus tellement éloigné.
Car jamais l’analphabétisme en Histoire de ceux qui ont entre leurs mains le destin des générations futures n’a été aussi grand. Or, jamais l’Histoire n’a été aussi présente dans l’actualité qu’aujourd’hui et aussi absente de la tête de nos décideurs.
Les énormes erreurs commises dans l’appréciation de l’état du monde et particulièrement du Moyen Orient qui est à nos portes, en témoignent. Nos stratèges auraient dû faire un peu d’histoire et de géographie, et apprendre ce que sont le chiisme et le sunnisme et s’informer auprès des ethnologues ( ils pullulent au CNRS !!! ) avant de se lancer dans des aventures aux lendemains tragiques. Et apprendre ce que fut la menace ottomane pour les pays d’Europe Centrale et des Balkans avant de les montrer du doigt en raison de leur résistance à une politique migratoire dont nul ne sait comment tarir le flux….
Ma génération va s’éteindre. Ce qui se joue aujourd’hui, c’est le sort des générations futures qui risquent de devoir payer au prix fort la superficialité suffisante de ceux qui ont leur destin entre les mains, et qui ont « oublié que l’Histoire est tragique ».
Tiens, curieusement, c’est le reproche que faisait Raymond Aron, un philosophe qui a marqué son époque, – la mienne- à Valéry Giscard d’Estaing, auquel on compare souvent Emmanuel Macron pour « sa classe », « son intelligence brillante » et l’ardeur de son « extrême-centrisme »…..
« 15 ANS DE MAFIA »
15ansdemafia.wordpress.com
Du communisme à l’extrême droite….ou comment les ex-communistes servent la cause de l’extrême droite issue des réseaux nés à la décolonisation. Le livre 15 ans de mafia, est le résultat de l’infiltration d’un réseau corse en Asie du Sud-est s’appuyant sur d’anciens communistes français dont des pigistes qui travaillaient avant 2000 pour le journal de l’humanité. De quoi voir le monde et la France sous un autre angle.
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