Page 814 - index
P. 814

 nous eut annoncé l’adhésion de son Gouvernement à la gendarmerie Belge et aux principes des autonomies élaborées par nous, je me suis empressé d’informer Safvet Pacha que nous étions prêts à entrer en Conférence avec les Plénipotentiaires Ottomans. Par déférence pour ces derniers, j’ai évité dans ma lettre de faire allusion à nos réunions pré­ liminaires. Le ministre en a cependant fait mention lui même dans sa réponse placée ci-près, et y a traité les Puissances de Médiatrices, tandis que nous avions eu soin de nous poser à l’égard de la Porte en Garants de l’Empire Ottoman. La lettre de Safvet Pacha ne m’est parvenue que Vendredi après que les Représentants ont fait exiger une solution par leurs Premiers Drogmans.
La séance a été ouverte par la lecture d’un long exposé historique des antécédents de la question, fait au point de vue Turc avec force inexactitudes et exagérations. Les troubles de l’Herzégovine y étaient attribuées aux menées de la révolution cosmopolite et l’encouragement puisé dans l’intervention des Puissances. La note Andrâssy était directe­ ment attaquée par la constatation du fait que »cet essai de pacification« des Puissances avait entièrement échoué. Les pays révoltés et nommé­ ment la Bulgarie, y est-il dit, avaient le plus profité des avantages de l’administration Ottomane depuis 1856. Après avoir fait ressortir la mo­ dération de la Porte et rejeté dans des termes assez convenables d’ail­ leurs, sur les Puissances la responsabilité des évènements (sic!) qui se sont accomplis, le discours de Safvet Pacha a attaqué indirectement les propositions Anglaises et exalté la Constitution nouvelle que le Sultan accordait à ses sujets. En ce moment des coups de canon annoncèrent la proclamation de la Charte.
Cette mise scène naïve était destinée à impressionner les Repré­ sentants. Elle a cependant entièrement manqué son effet. Nous n’avons tenu aucun compte de l’évènement (sic!) du jour. Le Marquis de Salisbury, ainsi qu’il était convenu entre nous, a le premier pris la parole pour répliquer au Ministre des Affaires Etrangères, qu’il ne s’agissait pas de discuter le passé, mais d’assurer l'avenir, que la Constitution nou­ velle n'avait rien de commun avec la tâche des Puissances, que pour l’ap­ pliquer la Turquie avait besoin avant tout de paix, et que c’était cette dernière que les Cabinets venaient offrir à la Porte. Je me suis associé aux paroles de mon Collègue Britannique en ajoutant que si je ne re­ levais pas les nombreuses inexactitudes de l'exposé historique, c’était pour ne point envenimer la discussion dès le début. Enfin le Comte Zichy a réclamé brièvement contre les allusions malveillantes à l’adresse de la note Austro-Hongroise. Les Plénipotentiaires Ottomans ont été dé­ concertés par cet échec du discours d’ouverture et n’ont pas même réussi à se faire adresser des compliments à l'occasion de l’ère nouvelle qu’ils disaient s’ouvrir pour un Empire qui a duré six siècles!
Après cela, ainsi qu’il a été convenu, le Comte de Chaudordy a remis au nom des six Puissances à Savfet Pacha les actes élaborés dans nos réunions préliminaires, en faisant appel à la sagesse et à la modé­ ration des Ministres du Sultan.
Le manière dont nos délibérations plénières ont été inaugurées doit avoir incontestablement convaincu les Turcs de l'accord parfait qui règne en ce moment entre les Plénipotentiaires et les Cabinets qu’ils
812





























































































   812   813   814   815   816