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marcateurs tant en Herzégovine que du côté de Scutari. La sdule question touchant le Monténégro, dont nous avions à nous occuper était celle du blocus de Niksitch. Sir Henry Elliot qui arrivait directement de la Porte, s’est fait l’avocat du point de vue Turc dans cette affaire, en demandant qu’elle soit déférée à la Commission de démarcation.
Il nous a remis en même temps le projet de note-verbale ci-joint que la Porte comptait nous adresser et qu'il s'était chargé de nous sou mettre probablement vu le caractère urgent de la question. J’ai cru utile de décliner la proposition de mon Collègue, car, à mon avis, il convenait mieux au Prince Nicolas de s’entendre directement avec la Porte pour la ravitaillement de Niksitch, tandis que la Commission pou vait lui imposer des conditions onéreusese et de nature à faciliter la résistance que cette place serait à même d’opposer après l’expiration de l’armistice. Comme cependant des considérations d'humanité nous impo saient le devoir pressant de donner suite à la demande de la Porte, qui avouait que la population de Niksitch était réduite à la dernière extré mité pendant la durée de l'armistice, je me suis offert de m’interposer auprès du Prince Nicolas pour obtenir de lui qu’il fasse »ce qu’il jugerait possible et équitable«, afin qu'elle puisse recevoir des vivres pour la durée de l’armistice. Mes Collègues ayant accepté ma proposition, j’ai adressé à Son Altesse le télégramme au clair ci-joint, auquel le Prince m’a répondu par le télégraphe également annexé ci-près, que je n’ai pas manqué de communiquer à mes Collègues. Ce qui serait le plus heureux pour le Monténégro, c’est que les habitants Musulmans de cette ville consentissent à se rendre eux-mêmes à Gatzko pour y chercher des pro visions et ne plus rentrer ensuite dans leurs foyers. Cela simplifierait considérablement la question, ainsi que je l’ai fait observer confidentiel lement au Prince Nicolas.
Fatigué des difficultés que lui cause sans cesse la population de Niksitch et de l’obligation d'entreprendre périodiquement des expédi tions pour lui procurer des vivres, le Gouvernement Ottoman voudrait mettre fin à cette situation anormale. Certains indices font croire que la cession de cette place au Monténégro ne rencontrerait pas de difficul tés isurmontables, si la Porte ne considérait pas comme incompatible avec sa dignité d’abandonner les Musulmans de Niksitch qui se distin guent par leur fanatisme et leur bravoure et qui n’ont jamais voulu se soumettre au régime Monténégrin. Safvet Pacha m'a naïvement avoué que dans le cas où les habitants de cette ville consentiraient à la quitter pour aller »vivre plus confortablement ailleurs«, la Porte n’aurait aucune raison de s’opposer plus longtemps à son annexion au Monténégro.
Un télégramme que je viens de recevoir du Colonel Bogolioubow m’informe qu’il est arrivé à Raguse, après avoir terminé, avec M. Albari, les travaux de démarcation en Herzégovine »d’une manière satisfaisante«. Moukhtar Pacha l’aurait cependant informé qu'il ne considérait pas comme »obligatoire« la ligne de démarcation fixée par la Commission. Selon notre délégué, les troupes turques qu’il a eu l’occasion de voir sont dans un état déplorable. La Commission se réunira au complet après demain à Raguse pour rédiger son rapport final.
АВПР, K-33. Ignatiew 791