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 Mon Prince,
Le Gouvernement Austro-Hongrois continue à être très bienveillant pour les Monténégrins et l’expérience de ces derniers jours prouverait que c’est la meilleure politique pour empêcher ici le oi-devant enthou­ siasme pour la cause slave de se maintenir sur le même diapason comme lors de l’insurrection.
Tant que cet enthousiasme voulait dire opposition, tant que l’af­ faire ne sortait pas du domaine des problèmes (sic!) platoniques de la diplomatie, — les Bosniaques et les Herzégoviniens excitaient les senti­ ments et l’intelligence des dalmates, qui s’agitaient de leur faveur, fai­ saient des démonstrations, comme lors de l’arestation (sic!) de Lubibradié, leur fabriquaient des proclamations, des protestations et des projets politiques. ’
Les choses semblent devoir prendre une autre tournure depuis que le Gouvernement ne donne aucun lieu à l’excitation de l’opposition et surtout depuis que moralement et ostensiblement l’Herzegovine s’est adjugé au Pce Nicolas.
Ceci n’entrait précisément pas dans les calculs des slavophiles d'ici. Ils flattaient le Monténégro, ils tâchaient de tirer les marrons du feu avec les mains des Monténégrins, mais ils supposaient, je crois, qu’en Herzégovine, ainsi qu’à Vienne, le Monténégro trouverait toujours assez d’opposition ou d’incertitude pour contester au Pce Nicolas sa légitime influence dans ces pays.
Les dames de Raguse qui se pressaient d’une manière si touchante autour de blessés dans les mêmes défilés de Klek, au mois de Janvier, bien que parmi ces blessés les neuf dixièmes aient été aussi des Monté­ négrins, restent aujourd’hui très froides à l’égard du nouveau contingent des blessés de la même nation.
Aussi depuis la guerre il n’y a plus un seul volontaire croate ou serbe qui ait traversé la frontière de l’Herzégovine, de ces volontaires qui naguère constituaient la reclame, la partie théâtrale de l’insurrection en contribuant d’égarer et l’opinion publique et peut-être les cabinets eux-mêmes dans les appréciations sur la partie ou les causes des événe­ ments. Au contraire tous les jours il m’en arrive qui décampent de l’Her- zégovine en me demandant des frais de voyage pour aller combattre sous les drapeaux du Pcc Milan. Je refuse certainement ces secours.
J'ose croire que si le Gouvernement Hongrois adoptait en Slavonie l’attitude que les autorités Cisleitanes adoptent ici, ils ne tarderaient peut-être pas à y constater le même effet calmant. Il n’y a pas de slaves sujets de Sa Majesté François (sic!) Joseph qui veuillent se séparer de l’union autrichienne.
La résurrection de la liberté chez les Serbes du voisinage, le plus probablement, aurait au contraire pour effet de resserer plus étroite­ ment encore ces slaves autour du trône des Habsbourgs — tout est ici différent: moeurs, traditions, religions.
Les Slaves même de Batchka et de Srem ne pensent pas sérieuse­ ment ce qu’ils disent. Leurs tendances ultroslaves (sic!) ne sont pour eux très souvent qu’un argument pour faire de l’opposition, pour exciter les
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