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 Mon Prince,
Le télégramme de Votre Altesse du 28. Mars/9. Avril m’a fait con­ naître le langage inconvenant à l’égard de la Russie que certains de nos journaux prétendaient avoir été tenu par le Général Rodich aux chefs insurgés réunis à la Suttorina.
Avant même la réception de ce télégramme j’avais signalé au Mi­ nistre des Affaires Etrangères d’Autriche des propos analogues prêtés au Gouverneur de la Dalmatie par quelques organes de la presse Vien­ noise.
La Cte Andrâssy, désirant en avoir le coeur net, interpella télé­ graphiquement le Bon de Rodich. Celui-ci répondit que la rumeur lui en avait déjà été signalée à Castelnuovo, mais qu’elle était fausse: il se serait borné à conseiller aux insurgés de ne pas trop se fier à la fortune des armes, elle qui avait souvent trahi au moment décisif de plus grandes Puissances. Le Général attribuait les paroles dont on le gratifiait aux in­ sinuations malveillantes des correspondans (sic!) de nos journaux parmi lesquels ses soupçons se portaient plus particulièrement sur un des col­ laborateurs du PyccKiü Mipb.
Mr Wesselitzky que j’ai questionné à ce sujet m’a dit avoir recueilli parmi les insurgés la rumeur d'une image maladroite que le B°n de Ro­ dich aurait appliquée à la Russie, mais il s'est hâté d'ajouter qu'il n'y avait pas assisté lui-même. L’allocution adressée par le Statthalter aux chefs chrétiens et xlont l’analyse plus ou moins sténographiée dans la presse de Vienne porte le cachet de l’authenticité — n’en fait pas mention, et les variantes mêmes qui se sont glissées dans nos journaux paraissent attribuer à cet incident un certain caractère mythique.
Quoi qu’il en soit, un communiqué inséré au journal officieux, Wie­ ner Abendpost, et se rattachant aux déclarations du »Journal de S1 Pé- tersbourg« du 28. Mars/9. Avril a déjà fait justice des prétendues énon­ ciations du Bon Rodich comme »exclusivement dûes à l’humeur fantaisiste de certains reporters«.
Cela n’a pas empêché le Comte Andrâssy de juger sévèrement le discours du Général de Rodich reproduit dans les feuilles Viennoises en ce qu’il se serait obstiné à mettre en avant le nom de l’Empereur d’Au­ triche tandis qu’il ne devait employer que la formule générique des »Puissances européennes.
Le Ministre des Affaires Etrangères m’a communiqué à l’appui le texte même des instructions télégraphiques dont le Gouverneur de la Dalmatie avait été muni en date du 11./23. Mars et qui devaient guider son langage envers les insurgés. J’ai l’honneur d’en placer ci-joint une copie sous les yeux de Votre Altesse et me permets d'appeler Sa haute et bienveillante attention sur la conclusion de cette pièce.
»Vous déclarerez, y est-il dit, que nos exhortations n’ont que la valeur d’un conseil sérieux et qu’en le suivant, les chrétiens nous don­ neraient la possibilité de continuer à agir en leur faveur. Ils sont libres de ne pas s’y conformer et de repousser la pacification; même alors nous ne procéderons pas contre eux d'une manière hostile, mais nous serons obligés de les abandonner au sort qu’ils auraient volontairement choisi«.
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