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 des six Grandes Puissances et que la Porte ne fût appelée à se prononcer que sur l’issue de leurs délibérations.
Le Cte Andrâssy auquel je transmis la teneur de ce télégramme en accompagna la lecture des considérations suivantes:
Il avait, me dit-il, accepté sans réserve l’exigence de l’armistice pur et simple, telle qu’elle avait été formulée par notre télégramme du 21. courant, et en cas de refus du Gouv* Turc, le Cab* de Vienne était prêt à rappeler son Représentant de Constantinople, si nous prenions l’initiative d’une mesure analogue. Mais, il lui serait impossible d’étendre l’application de cette même menace au projet Anglais de la Conférence. Il n'objectait pas à l’exclusion de la Porte proposée par nous, mais il ne pourrait pas légitimer devant les Délégations d’avoir fait un cas de rupture diplomatique du refus éventuel des Turcs d’accepter une Confé­ rence dont ils auraient été exclus dans leur propre Capitale. Par contre le rappel des Ambassadeurs serait pleinement justifié si la Porte per­ sistait à refuser l’armistice pur et simple, cette dernière demande étant à la fois une question d’humanité et de dignité pour les Puissances.
Le Cte Andrâssy me pzria d’en faire part à Votre Altesse par voie télégraphique et de Lui exprimer le voeu que les questions d’armistice et de Conférence fussent traitées séparément.
Somme toute le Ministre des Affaires Etrangères d’Autriche n’ob­ jecte pas à la Conférence, mais avant d’y adhérer, il tient à voir clair dans la situation. Les soubresauts de la politique anglaise ne sont pas de nature à lui inspirer de la confiance. D’une part Lord Derby repousse la démonstration navale et suggère au Cte de Wolkenstein la nécessité de ménager la susceptibilité de la Porte. D’autre part Sir H. Elliot paraît avoir menacé les Turcs de l’éventualité de son départ et il y a des indices qui feraient croire que l’Angleterre se désintéresserait des futures desti­ nées de l’Empire Ottoman. Mais une série d'expériences a prouvé à Vienne que les Anglais échappent au moment où on croit les tenir.
Il pouvait en être de même de leur projet de Conférence. D’après quelques données qu’on possède ici, le Gouv1 Britannique ne serait pas éloigné d'admettre que les Représentants des Puissances Chrétiennes réunis à Constantinople eussent à communiquer aux Turcs le résultat de leurs pourparlers sous la forme de propositions. Le Cte Andrâssy sup­ pose justement que le Cabinet Impérial ne s’arrangerait guère d’une pareille interprétation des pouvoirs de la Conférence laquelle aurait, au contraire, à élaborer des décisions. Or, un refus de la Porte d’accepter celles-ci serait grave en ce qu’il impliquerait un défi à la dignité de l’Europe, tandis que de simples propositions peuvent être déclinés par les Turcs sans atteinte à cette dignité!
Mais, dans cette dernière hypothèse, le Comte Andrâssy se demande à quoi servirait l’apparat d’une convocation de la Conférence? Les Repré­ sentants des Puissances à Constantinople n’ont-ils pas déjà la faculté de se réunir entr’eux sans le concours de la Porte et sans qu'elle songe à y mettre obstacle, pour échanger leurs idées et en faire surgir des projets?
Jusqu’à ce moment les attributions de la Conférence méditée à Londres n’ont pas été définitivement éclaircies vis-à-vis du Cab* de Vienne.
АВПР, K-127. Novikow 615


























































































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