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Il en est résulté pour ceux-ci un droit moral — celui de veiller à l’accomplissement de cette promesse, et une obligation, — celle d’insister pour que les insurgés et les réfugiés secondent cette oeuvre d’apaisement en cessant la lutte et en rentrant dans leur foyers.
Cependant ce programme de pacificatioi, bien qu’accepté en prin cipe par toutes les parties, a rencontré un double écueil.
Les insurgés ont déclaré, que l’expérience du passé leur défendait de se fier aux promesses de la Porte, à moint d’une garantie matérielle positive de l’Europe.
La Porte a déclaré de son côté, qu’aussi longtemps que les insurgés parcouraient le pays en armes et que les réfugiés ne se repatriaient pas, il lui était matériellement impossible de procéder à la nouvelle orga nisation du pays.
En attendant les hostilités ont repris leur cours. L’agitation entre tenue par cette lutte de 8 mois s’est étendue à d’autres parties de la Turquie. Les populations musulmanes ont dû en conclure que la Porte n’avait déféré qu’en apparence à l'action diplomatique de l’Europe, et qu’au fond elle n’avait pas l’intention d’appliquer sérieusement les ré formes promises. De là un réveil de passions religieuses et politiques, qui a contribué à amener les déplorables événements de Salonique et la surexcitation menaçante qui se manifeste sur d’autres points de l’Empire Ottoman.
Il n'est pas douteux non plus, qu’à son tour cette explosion du fanatisme réagit sur la situation des esprits en Bosnie et en Herzégovine, comme dans les Principautés voisines.
Car les chrétiens de ces contrées ont dû être vivemeut impressionés par le fait du massacre de consuls européns, en plein jour, dans une ville paisible, sous les yeux des autorités impuissantes, alors qu’on les engage à confier au bon vouloir des turcs irrités par une lutte longue et acharnée.
Si cette situation se prolongeait on risquerait ainsii de voir s’allu mer l’incendie général que la médiation des Grandes Puissances avait précisément en vue de conjurer.
Il est done de toute nécessité d’établir certaines garanties de nature à mettre hors de doute l’application loyale et complète des mesures arrêtées entre les Puissances et la Porte. Plus que jamais il est urgent de peser sur le Gouv* du Sultan pour le décider à se mettre sérieusement à l’oeuvre afin de remplir les engagements contractés par lui enver l’Europe.
Comme premier pas à faire dans cette voie, les 3 Cours Imples proposent d’insister auprès de la Porte, avec toute l’énergie que doit avoir la voix unie des Grandes Puissances, afin de l’amener à une sus pension d’armes pour le terme de deux mois.
Ce délai permettrait d’agir à la fois sur les insurgés et les réfugiés, pour leur donner confiance dans la sollicitude vigilante de l’Europe, sur les Principautés voisines, pour les exhorter à ne pas entraver cette tentative de conciliation, et enfin sur le Gouv1 Ottoman, pour le mettre en demeure d’accomplir ses promesses. On pourrait ainsi ouvrir la voie à des pourparlers directs entre la Porte et les délégués Bosniaques et Herzégoviniens, sur la base des voeux que ceux-ci ont formulés et qui ont été jugés aptes à servir de points de départ à une discussion.
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