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Sire,
Le Ministre des Affaires Etrangères d’Autriche s’est rendu à Bude le 5/17 Mai pour la session des Délégations.
L’Empereur François-Joseph attendait ici son retour de Berlin pour apprendre un moment plus tôt le détail de ce qui s’y était passé dans les Conférences. Déjà vivement satisfaite des communications télégra phiques qu’Elle avait reçues à ce sujet. Sa Majesté Impériale et Royale a accueilli avec un redoublement d’intérêt les explications que le Comte Andrâssy, heureux lui-même du résultat obtenu, a été dans le cas de Lui exposer de vive voix.
Absorbé par les préliminaires du travail qui l’attendait à Pesth, le Ministre des Affaires Etrangères n’a pu me donner qu’un instant d’entretien, mais le hasard a voulu que j’entrasse chez lui immédiate ment après l’Ambassadeur d’Angleterre; j’ai donc pu constater toute fraîche l’impression que venait de produire sur l'esprit du Comte An drâssy le refus du Cabinet de Londres d’adhérer aux résolutions de Berlin.
Sir A. Buchanan s’était borné à lui communiquer la teneur d’un télégramme de Lord Derby portant textuellement que »le Gouvernement de S. M. Britannique avait de graves objections à faire valoir contre le plan mis en avant par les trois Puissances et qu’on n’était pas préparé à peser sur la Porte pour le lui faire adopter«.
Cette communication avait été précédée par un télégramme de l’Ambassadeur d'Autriche-Hongrie à Londres énumérant en détail les objections que Mr Disraeli et Lord Derby avaient formulées contre le projet de Berlin.
Le Comte Andrâssy a bien voulu m’en donner lecture.
Mr de Beust y débutait par un grief personnel. Il était, disait-il, le seul Représentant des trois Cours qui n'eût pas encore été mis par son Gouvernement en possession du mémorandum, mais cette fois-ci il n’avait pas lieu de se plaindre de son ignorance, attendu que ses Collè- gue§ de Russie et d’Allemagne avaient dû essuyer le premier feu des Ministres anglais. Le Principal Secrétaire d’Etat serait même allé jusqu’à leur faire entendre qu’en assignant à l'Angleterre un terme pour obtenir sa réponse, on avait l’air de la placer sur le même pied que le Monté négro.
Pour ce qui est de l’armistice, Lord Derby avait fait observer qu’il serait respecté non seulement par les insurgés, mais encore par les Ser bes et surtout par les Monténégrins.
Passant en revue les cinq points concernant la Bosnie et l’Herzé- govine, le Ministre anglais avait objecté:
Contre le premier — que les ressources financières de la Porte ne suffiraient pas à subvenir à la subsistance et à la réinstallation des insur gés et qu’il n’était pas juste de lui imposer un pareil sacrifice, puisque ce n’était pas les musulmans seuls qui avaient brûlé et dévasté les vil lages Chrétiens, mais que, de leur côté, les insurgés avaient usé de repré sailles.
contre le 3ème et le 4ème — qu’il semblait dangereux de masser des troupes turques sur quelques points convenus, car étant donné que les
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