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Le P“ de Bismarck me fit ensuite des interrogations sur les motifs de l’arrivée du Cte Andrâssy à Berlin et sur questions qui seraient éven tuellement soulevées dans cette entreuve. Je me suis tenu dans une stricte réserve, ainsi que cela m’a été prescrit par Votre Altesse et me suis borné, ne pouvant garder un silence absolu, à constater les pré occupations que continuaient à nous inspirer d'une part l’inaction de la Porte et son impuissance à réaliser les engagemens (sic!) qu’elle avait pris, de l’autre la recrudescence de l’insurrection et le caractère de fana tisme que prendrait, sans nul doute, la lutte qui venait de recommencer.
Comme je ne sortais point de ces thèses générales, le P“ de Bis marck me dit en souriant: »Vous ne voulez pas, me parait-il, parler po litique, mais cela ne m’empêche pas de Vous en parler«, et le Chancelier se mit à me développer sa manière de voir dans la situation »nouvelle« (sic!) que créent selon lui les conditions posées par les insurgés au Bon de Rodich et auxquelles ils consentiraient à déposer les armes.
Je porte l’attention de Votre Altesse sur le fait que cet exposé du Chancelier a précédé l’arrivée de la dépêche mentionnant les menaces contre le Monténégro.
J’ai trouvé le Prince au fait de la mauvaise impression produite à S' Pétersbourg par la démarche du Pcc Wrede à Belgrade au nom de l’Autriche et de la Russie, ainsi que du mécontentement du Cabinet Im périal quant à la déclaration du Cte Andrâssy à Constantinople relative ment aux nouvelles demandes des insurgés. Le Prince m’a dit tenir ces renseignemens (sic!) de S* Pétersbourg.
Le Prince croit que la Porte opposera dans l’état présent des choses un refus formel à l’acceptation de tout ce qui irait au delà des points contenus dans la note Andrâssy. Ses nouvelles portent que l’on devient intraitable à Constantinople et il pense qu’il faudrait des succès rem portés par les Slaves sur les armes turques pour rendre la Porte plus maniable. Il croit ces succès possibles et même probables à l’heure qu’il est, mais suppose que dans quelque mois d’ici les chances devien draient plus favorables à la Turquie qui serait à même, malgré ses em barras financiers d’augmenter ses forces de 100/m. h environ et de les engager dans la lutte. Il s’agirait donc de laisser faire les Chrétiens en ce moment et de ne point retenir le Monténégro et la Serbie. Le Prince me réitéra que quelques succès signalés des Chrétiens pèseraient favo rablement dans la balance et assureraient la réussite des négociations ultérieures. »Ne communiquez pas cela à Pétersbourg«, me dit-il, »je crains que l'on n’envisage cela comme des conseils que je donne, tandis que l’on ne me les demande pas, et je voudrais me borner à appuyer ce qui sera décidé entre vous et Vienne, ou plutôt ce que voudra l’Empe- reur Alexandre«.
Ainsi que je le dis plus haut, le Chancellier envisage les dernières conditions posées par les insurgés comme une phase nouvelle de la question. Puisque les insurgés eux-mêmes ont déclaré qu’ils déposeraient les armes au cas où ces nouvelles garanties leur seraient accordées, il n’y a pas lieu, selon lui, de traiter actuellement sur d’autres bases. Ce que les insurgés demandent parait au Prince non seulement raisonnable et pratique, mais il est étonné de la modération de leurs exigences. Il ne voit pas même de difficulté à leur accorder un tiers de la terre; pareils
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