Chapitre II - Les premiers habitants

 

La Préhistoire

Les preuves d'une occupation préhistorique de notre territoire sont rares, mais indiscutables, ainsi à Tauriac et dansle lit de la Nuéjouls furent découvertes et reconnues par le Dr Brunel, dans les années 1940, deux statues menhirs, maintenant exposées au musée Fenaille à Rodez ( 7 )

Ces deux monolithes se rattachent à un sous-groupe, qualifié d'hérétique, ne représentant pas de figuration humaine, mais seulement des objets : outils ou parures !
Retrouvés à l'ouest et en marge du groupe rouergat, dans un secteur particulièrement riche en ressources minières, ils pourraient être l'œuvre d'une tribu aux préoccupations plus matérielles, pour laquelle le travail et ses fruits: extraction de minerais, fabrication de bijoux ou d'outils constituaient le sujet de fierté et d'identification dominant.
Le Dr Brunel fut également appelé à reconnaître une hache en pierre polie trouvée à La Lavagne.
A signaler aussi, la présence d'instruments en forme d'aiguilles, trouvés à côté d'un crâne d'enfant, en dehors de tout autre accompagnement, par l'abbé Vialettes, à St Pierre-des-Cats en 1890, ainsi que des outils tranchants et un poinçon gisant dans une grotte proche du même hameau.
L'Age du Bronze - 2100 av.JC - est doublement représenté par la découverte, lors de travaux de mine à Brusque, de 14 bracelets en mai 1856 [La plupart auraient été envoyés au musée St Raymond de Toulouse, deux exemplaires seraient au musée Fenaille de Rodez].
Puis par l'exploration en 1879, d'une grotte sépulcrale dont l'anthropologue Emile Cartailhac a fait le récit suivant ( 8 ) :

" - La rivière le Dourdou, avant d'entrer dans la plaine permienne de Camarès, forme une vallée profondément encaissée par des terrains fort anciens. A la hauteur du petit village de Brusque, où jadis on avait découvert un lot de bracelets de l'âge du bronze, elle passe au pied de montagnes calcaires qui offrent plusieurs cavernes. L'une d'elles a servi de temple aux protestants persécutés et possède encore des restes de construction. A côté de cette grotte s'ouvre une fissure qui se rétrécit au bout d'une vingtaine de mètres, au point de ne livrer passage à un homme qu'avec difficulté. Le couloir étroit s'allonge et descend, au bout de 10 mètres, l'explorateur se croit arrivé à un cul de sac.
MM. Bouisset, instituteur, et Belugou, étudiant en médecine, ayant aperçu un vide au bas de la paroi, purent s'y glisser en rampant et se trouvèrent bientôt dans une salle assez longue, 20 mètres, au plafond élevé de 4 à 5 mètres, très irrégulier, le sol rendu fort inégal par la chute de blocs énormes, était couvert par du sable grossier mêlé à de nombreuses pierres. L'attention des visiteurs fut éveillée par les ossements humains qui affleuraient un peu partout, l'espoir de trouver quelque trésor leur inspira le désir de faire des fouilles qui naturellement ne donnèrent pas les résultats souhaités.
La découverte fut ébruitée, toute la population du voisinage visita ce caveau funéraire et fit appel en vain aux souvenirs d'autrefois. Je fus prévenu à mon tour et je me rendis à Brusque, où MM. Bouisset, Belugou et leurs concitoyens, me firent le plus gracieux accueil. Les fouilles faites péniblement par moi ou sous mes yeux, m'ayant prouvé que les ossements avaient été brisés, et que les objets étaient rarissimes, j'ai remis à plus tard une exploration plus complète.
Plusieurs squelettes étaient allongés le long des parois ou des blocs, quelquefois séparés par de petites pierres. Ils n'offrent aucune trace d'incinération, mais çà et là on trouve des charbons, à l'entrée de la salle il y a des traces d'un foyer. Les ossements de chèvre ou de mouton, de bœuf, de cerf, se rencontrent isolément. Le mobilier funéraire se compose uniquement d'une perle en forme d'olive et en bronze grisatre ; une perle toute petite en bronze, deux petites plaquettes en bronze, en forme de bouton conique, de moins d'un centimètre de diamètre et perçées de trous pour permettre de les coudre sur des vêtements, par exemple. Une valve d'Unio, une dentale.
Tout cela se rapporte à l'époque des dolmens aveyronnais, ajoutons qu'il y avait d'assez nombreux débris de vases en poterie non tournée et grossière. Il y avait certainement plus de quinze individus d'âge divers, dans cette grotte sépulcrale. "
Emile Cartaillac

L'historien Louis Bousquet ajoute ( 8* ) :

" Aux débuts du 2ème millénaire, à ces néolithiques vinrent se mêler les indo-européens : ibères et ligures, porteurs de menus objets de cuivre ou de bronze sous forme de perles, d'amulettes, de pendeloques, de pointes de flèches ou de petits poignards, modeleurs de céramique à pâte fumigée d'un noir brillant et parfois ornée.Ils ont laissé des traces indélébiles de leur occupation non seulement dans l'apport du cuivre et du bronze, mais dans les noms qu'ils donnèrent aux montagnes, aux rivières, à leurs agglomérations.
Les traits de la géographie physique du Rouergue,dans son fonds le plus ancien sont ibéro-ligures : tandis que les suffixes asco, osco, usco caractéristiques des contrées jadis occupées par ces peuples, se retrouvent dans les noms de Brusque (vicaria Brusca ixème s), de Brasc (ministerium Brascum ixème s), et dans le lieu-dit Maillosque (Cne de La Cresse).
Le contact de ces deux civilisations néolitique et ibéro-ligure paraît s'être opéré sans heurts, du moins sans exclusion et anéantissement de l'une par l'autre, ce fut une infiltration lente d'émigrants parmi les autochtones. "

(Note : L'origine indo-europénne des ibères est aujourd'hui contestée et plutôt rattachée à l'Afrique du Nord.)

 

 

 

Notes bibliographiques
( 7 ) Musée Fenaille, Les Statues-Menhirs du groupe rouergat
( 8 ) E. Cartailhac, Matériaux pour l'histoire de l'Homme T14 p 588
( 8* ) Louis Bousquet, Six leçons d'histoire du Rouergue pp 12-13