Comptes consulaires- Fiscalité
Une des premières mentions relatives aux fonctions comptables du Consulat se trouve dans les actes de 1464 ( 150 )
" Item l'an desus et lo segon jorn del mes de jul, forem exequtatz per las tailhas per thomas Avinho sirven de Sant-Affrica, et lo tailhayre Guihem Nazon non sey era que era anat aquel jorn portar l'argen a Sant-Affrica. Bayliey ly de voluntat de mos companhos II gr
La despensa ly fes mon frayre Huget "
Guillem Nazon est , cette année là, celui des élus du Consulat, qui a la responsabilité des comptes .J'ai relevé plus haut (se reporter à ce paragraphe), qu'initialement la Communauté de Brusque était rattachée du point de vue fiscal, comme 99 de ses voisines de la Haute Marche, à la juridiction de Roquecezière.
A l'orée du XVIIème siècle, notre consulat, qui a côté de son propre budget, a la mission de collecter les deniers royaux, sur son territoire, reçoit les directives pour " l'organisation de la cottize sur ordre du Seigneur de Roquelaure, seneschal et gouverneur du Rouergue ".
A ce terme de cottize qui, par la suite désigne plutôt les contributions individuelles, sera substitué celui de " mande " et ces mêmes mandes proviennent dès leur création de la Généralité de Guyenne.Le qualificatif ancien " tailhayre " désigne le consul-boursier, qu'on appelera plus tard " exacteur ", " collecteur " et plus familièrement " coletou ", avec une connotation péjorative, car ,outre la tenue des comptes de la Communauté, il est le percepteur des " deniers royaux ", dont le plus redoutable est " la tailhe ".
" La taille était réelle ou prédiale dans la Généralité de Montauban et le reste de la Guyenne, c'est à dire qu'elle était payée par les fonds d'héritages, de telle sorte que les nobles y participaient pour les biens roturiers qu'ils possédaient et les roturiers - ou ignobles - également pour les biens nobles leur appartenant. Chaque communauté ou mandement taillable avait son cadastre ou compois " ( 151 ).
La fonction de consul-boursier n'avait rien d'attrayant, malgré les remises sur encaissements qu'elle rapportait, car le titulaire devait répondre sur ses biens propres de la recette finale, instruire les demandes d'exemption de tailhe pour catastrophes naturelles et les cas d'insolvabilité, diriger les porteurs de contrainte. Ainsi, on note en 1664, le " séjour de La Fontaine, brigadier-porteur de contrainte, avec six cavaliers ".
Cependant une instruction de Claude Pelot, intendant de Guyenne, prescrivait que " les recouvrements d'impositions ne devaient pas s'accompagner obligatoirement d'envoi de gens de guerre ".
Il n'empêche qu'un acte de 1678 relate l'envoi par " P.Masméjean de Bouat, exacteur, d'un porteur de contrainte accompagné de cinq archers ".
Ou bien ailleurs " la difficulté de trouver un exacteur ",
" le délaissement de la masure de La Desoubre par JeanVézian,surchargé de taille ",
" Mr de Roquairol qui fait retirer les meules de son moulin, dit de Bonnet, pour atténuer la cotization "L'expression " deniers royaux " paraît partiellement inadaptée, si l'on en croit un acte consulaire daté du 12 Avril 1655, qui a trait " à la part des tailles revenant à Monseigneur le Duc " ( Jean V d'Arpajon), mais comme il s'agit de la seule allusion rencontrée, dans ces archives, à la part seigneuriale, je me limite à la signaler, laissant l'étude de cette procèdure, aux spécialistes de la fiscalité d'ancien régime.
Généralement, la collecte suffit à répondre aux exigences de la mande, quitte à faire admettre les cas d'insolvabilité ; on peut cependant relever un épisode, où les consuls ont dû recourir à l'emprunt : " Le 22 Janvier 1704, P. Masméjean de Bouat, 1er consul, Anthoine Regimbaud et Jean Critofoul contractent un emprunt de 4.500 £ ", sans que le motif n'apparaisse clairement, serait-ce à rapprocher de : " la demande d'exemption de taille,en raison,d'une gelée extraordinaire,enregistrée l'année suivante par le greffier Cornuti ? "
En ne tenant compte que des mandes annuelles initiales, (c'est à dire sans les rectificatifs adressés en cours de mandature), voici ce que l'on peut relever, dans les archives consulaires les mieux conservées
Année Communauté entière dont 3 baillages Mélagues Tauriac Arnac 1614 3.136 £ 13 s 595 £ 13 s 1618 3.394 £ 14 s 2 d 695 £ 20 s 1621 2.900 £ 725 £ 1637 6.514 £ 7 s 1640 10.265 £ 8 s 10 d 1737 £ 16s10 1644 14.653 £ 8 s 2 d 2958 £ 10s 8d 1654 5.469 £ 3 s 13d 1272 £ 1655 8.257 £ 1662 9.042 £ 13 s 8d 1671 9.758 £ 8 s 1679 10.356 £ 5 s. 1685 9.099 £ 1691 9.851 £ 17 s 5d 1712 10.643 £ 1714 15.676 £ 4 d 3.454 £ 7 s 4 d 1.619 £ 7 s 2 d 894 £ 3 s 8 d 1727 15.285 £ 3 d 3.106 £ 15 s 14 d 1.411 £ 18 d 804 £ 17 s 12 d 1728 13.686 £ 1739 14.251 £ 16 s 3.073 £ 19 s 1.397 £ 6 s 10 d 796 £ 8 s 6 d Ce tableau permet de constater la variabilité des appels fiscaux, dans un mouvement général de croissance et leur répartition entre les différentes composantes de la Communauté .
C'est aussi au consulat qu'incombent les frais d'établissement des compois (parfois appelés cadastres ou terriers), servant de bases à l'établissement des rôles d'imposition sur les biens fonciers, grâce aux description, classement et arpentage des parcelles .Les actes consulaires des XVII et XVIII°éme siècles font mention d'un premier établissement de compois débuté en 1625 par les experts " MM. de Barthélemy et de Podio " .
Ce premier compois est visible aux Archives départementales sous la côte 2E 35-16 mais il est en mauvais état et ce qu'il en reste concerne seulement la plus grande partie de la paroisse de Brusque, les villages de Fayet et de La Roque, sans leurs écarts, plus les hameaux de Maussac, Labiras, et Méjanel.Les travaux du second débutent en 1668, pour Brusque et Tauriac où les agrimenseurs sont logés, aux frais de la communauté " chez Jean Caylar, hoste de Tauriac ", les travaux dureront jusqu'en 1672 " sous la réquisition de Me François Béral, notaire royal et Guilhaume Rudelle, bourgeois de Combret, pour la faction du compois en présence de Laurent Séguier 2è consul et de Dardé Audibert 1er consul, et remise d'une copie pour le syndic de Mélagues : Jean Bascou de Las Planquettes , et qui recoivent un acompte de 440£ " ; il nécessitera des retouches dès 1674 avec l'intervention " de Jaques Fusier de Gissac qui perçoit 39 £ ". Les extraits originaux de ce travail sont conservés, en bon état, aux Archives départementales, sous les côtes
2 E 35-17 ( feuillets 109 à 379 ) pour Brusque, 2 E 280-2 ( 92 feuillets) pour le bailhage de Tauriac, 2 E 155-3 ( 145 feuillets) pour le bailhage de Mélagues, Les autres contributions levées par la Communauté étaient :
La Capitation, citée pour la première fois " en Mai 1701 qui nécessitera un emprunt à propos de la paroisse de La Roque " ; Sur cet impôt personnel, aux bases particulièrement arbitraires, j'emprunte à Henri Affre ( 151* ), ce quatrain ironique en patois rouergat :
" Ma maïre toutjour me disio
Qu'après lo taillo me maridorio
Lo taillo e lo capitatiou
Toutjour demoron et otal faou iou " Le Commun de paix : Cet impôt ancien est peu souvent évoqué dans nos archives il était " encore perçu, en 1606, sur la réquisition de la juridiction de Roquecezière " Le Dixième des biens nobles. Il semble d'un bien maigre rapport et varie entre 1712 et 1753 de 10 à 30 £, pour l'ensemble de la Communauté . La Gabelle : la très impopulaire taxe sur le sel n'est évoquée qu'une seule fois, dans un acte de 1612, pour commenter " la contrebande à laquelle elle donne lieu " Le droit sur les huiles est cité une seule fois aussi, dans les comptes consulaires " 1724 abonnement des droits sur les huiles : 29 £ 14 sols "
(M'étant antérieurement intéressé à la naissance de l'artisanat textile dans le Brusquès et aux besoins particuliers en huile d'ensimage qu'il a provoqués, je suppose que cet abonnement de la communauté à un droit d'importation des huiles d'olives du Languedoc a correspondu à une période de dépendance vis à vis des régions productrices - Languedoc - , assez rapidement compensée par des plantations locales très abondantes de noyers .) Albergue : cette fois, il s'agit d'un droit seigneurial, manifestement pris en charge par le consulat, en ce qui concerne le seul village d'Arnac et cité à deux reprises: " En Janvier 1650 Restes de l'Albergue 4 £ à Mr de Clermont " " En Août 1742 :30 £ d'aubergue des abitants d'Arnac à Monseigneur le Duc d'Arpajon "Reddition des comptes. On ne peut être que surpris par les délais qui accompagnent la reddition des comptes consulaires.
Si les exacteurs reçoivent de l'Election de Millau un récépissé, dès la remise de la collecte des différents impôts, ils doivent attendre au mieux deux ans ,au pire 23 ou 19 ans pour être définitivement déchargés, par la Cour des Aydes, comme le décrit un acte du 20 Janvier 1692 faisant état " de la reddition des comptes du Sr Jean Biou de 1669 " ou celui du 18 Mars 1630 " reddition des comptes de 1611 par Audibert "Les archives consulaires recèlent " un extrait du registre du Conseil d'Etat qui transforme la fonction de collecteur en office royal le 27 Juillet 1694 "
Dès lors, les comptes antérieurs sont entérinés par fournée " le 28 Avril 1700 : reddition des comptes anciens : 1677, 1682, 1686/7, 1687, 1688, 1691/2, 1693, 1694/5, 1696 ".
Notes bibliographiques
( 150 ) Jean Delmas, dans Al Canton Camarès page 52
( 151 ) Jean Delmas, dans Al Canton Camarès page 50
( 151* ) H. Affre, Dictionnaire des Moeurs, institutions et coutumes du Rouergue