La famille de Brusque
Avant Adhémar Corvesinus, désigné dans le cartulaire de Béziers, comme vassal des Trencavel (cliquer pour revenir au paragraphe correspondant), le plus influent des résidents du Brusquès, cité dans le cartulaire de Silvanès, paraît être Bernard Begon de Brusque, signalé une première fois en 1133, comme donateur, avec sa femme Maralde, ses frères Gausbert et Augier et ses fils Raymond et Begon, de ce qu'il possède au Mas de Théron, c'est à dire au site précurseur de l'abbaye.
On le retrouve seul, avec l'un ou l'autre de ses frères ou avec tous les deux, quinze fois comme caution ou témoin entre 1133 et 1163, mais, fait plus singulier, dans la charte n°23, de 1144, est nommé "Bernardus Begonis de Sancto Caprasio et Maralda uxor ejus et Bego eorum filiis, Gauzbertus et Augerius fratris Bernardi Begonis". N'en doutons pas, ces cinq personnes situées à Saint-Caprasy sont les mêmes que celles de la donation évoquée onze ans plus tôt, et résidant à Brusque.Ce sont, assurément, les premiers représentants connus de la famille des "Rics omes" de Brusque, possessionnés également de la seigneurie de Saint-Caprasy et de celle de Drulhe.
Les largesses de cette opulente famille ne se limitent pas à Silvanès, elle figure parmi les pourvoyeurs de "l'aumône" des hospitaliers de Saint-Félix en 1164 sous le nom de Bec de Brusque, puis, en 1183, Guillaume-Pierre de Brusque se désaisissant de l'église "Saint-Amans de Blan, au profit de Guiral de Montalègre, maître de l'Hôpital en Rouergue et, en 1204 ,lors d'un échange entre le même Bec de Brusque et Arnaud de Boussagues portant sur deux mas à la Cadenède et Vareilles et le tiers de la seigneurie de Saint-Caprasy. Par contre, en 1166, Bec de Brusque n'est pas le seul maître à Saint-Caprasy, puisqu'à cette date, c'est son oncle Augier qui figure en premier dans la donation d'un mas à Cabrias (près de Silvanés), lui-même n'étant mentionné qu'en second, avec sa femme Sérène ( 24 ).Parmi toutes les personnes, citées à divers titres dans les premières chartes, il n'est pas aisé de distinguer celles pour qui la mention du lieu de résidence n'est que la désignation de leur localisation et celles qui la revendiquent comme un titre féodal.Cette difficulté, qui devait s'estomper avec la généralisation des patronymes, a perduré longtemps pour les familles nobles, titulaires de plusieurs fiefs, si bien qu'il fallut une ordonnance royale de 1629, dite " Code Michaud " ( 25 ), pour prescrire, dans son article 21 : " Enjoignons aux gentilshommes de signer du nom de leur famille et non de celui de leurs seigneuries, en tous actes et contrats qu'ils feront, à peine de nullité des dits actes et contrats ".
Néanmoins, le contexte des donations ou échanges du début de la féodalité permet de distinguer les titulaires de seigneuries entières ou partagées.
Ainsi, pour Brusque, on peut vérifier que Bernard Begon et ses descendants ne sont pas les seuls à se considérer " seigneurs de Brusque ou de Saint-Caprasy " et que , dans les mêmes années (1136 - 1188 ), dans les archives du château de Foix ( 26 ), on découvre que Austor de Brusque est aussi qualifié de Berengier alias Austor de Lunas, dans une sentence, au sujet du château de Brusque et autres lieux , rendue le 18-9-1156. Ou bien que le même, ou plutôt son fils, sous le nom d'Austor de Brusque souscrit avec d'autres un acte d'hommage à Roger Trencavel, vicomte de Béziers, pour le fort d' Avène en Juillet 1193
En 1224, c'est encore un Auctor de Brusque qui fait vente à Guillaume Jourdain de ses droits sur le château de Montalègre , dans la vallée de la Sorgues ( 27 ).A partir des mentions de parenté figurant dans certaines chartes, on peut dresser le tableau généalogique suivant de la ou des familles s'intitulant " de Brusque "
Apanage Brusque, Silvanès, Saint-Caprasy, Drulhe, Blan Brusque, Lunas, Montalègre, Avène, Rocozels, Ceilhes
1129/1163 1164/1175 1183
Bernard-Bégon x Maralde Gausbert Augier | Bégon ou Bec x Sérène Raymond-Ratier | Guillaume-Pierre
Bérengier alias Austor 1166 Austor Roger Guillaume Sans qu'il soit possible de savoir s'il existe un lien de parenté entre Bernard-Bégon et Berengier-Austor, il est établi que tous deux sont vassaux de Trencavel pour Brusque dont ils partagent, avec d'autres, la co-seigneurie.
Ainsi, Bernard-Bégon et Adhémar promettent à Guillerma de ne pas lui enlever le château de Brusque ( 28 ). Cette promesse en dit long sur leur influence sur ce territoire. Quant à Austor, on sait qu'il tenait en fief la moitié de cette même place.Autres sources d'information sur les notables du Brusquès
A peu près dans le même temps, un autre cartulaire, celui de l'Abbaye d'Aniane en Languedoc nous apprend que " Raimondus Seioretus de Brusca " fait donation à ce dernier couvent, d'un mas à Soubras , où demeurait " Petrus Faber ".Le même texte précise que la paroisse de Brusque, en 1155, est à Saint-Martin, c'est à dire à près d'un kilomètre du château, en aval et sur l'autre rive du Dourdou.
C'est vraisemblablement le même personnage dont le nom est orthographié : " Raimond Seiniorel de Brusque ", qui est signalé comme garant (sans doute fermier) de la perception des dîmes de Marseillan, vers 1120 ( 29 ).En 1261, Braïde, veuve de Bernard du Pont, chevalier, tient en fief le mas d'Avizas et de Fobras, (qu'il faut lire, sans doute Sobras) paroisse de Brusque .
Retour de la terre de Brusque dans le domaine des Trencavel.
Les vicomtes de Bruniquel : les frères Arnal (ou Armand ?) et Adhémar, l'un et l'autre sans postérité, vendent en 1156, la part qu'ils avaient sur le château de Brusque et la Bastide de Blanc à Raimond Trencavel pour 6.500 sous melgoriens .Dix huit ans plus tard, son fils devait recevoir hommage pour l'autre part détenue par Brenguier Astor (sans doute le seigneur de Lunas) ( 30 ).
Il faut noter que, bien que vassaux du Comte de Toulouse, les vicomtes de Bruniquel, co-seigneurs de Brusque, rendaient hommage pour cette possession rouergate à Hugues, comte du Rouergue (1135).
Notes bibliographiques
( 24 ) P.A. Verlaguet, le Cartulaire de Silvanès
( 25 ) Code Michaud (1629) art. 21
( 26 ) J.L. Rigal, Archives du château de Foix
( 27 ) H. de Barrau, Documents historiques et généalogiques sur les familles et hommes remarquables du Rouergue, p. 554
( 28 ) Rigal et Verlaguet, Notes pour servir à l'histoire du Rouergue, p. 380
( 29 ) Devic et Vaissetes, Histoire générale du Languedoc, tome V, p. 1314
( 30 ) J.L. Rigal, Archives du château de Foix