Chapitre IV - La Renaissance

 

Evolution locale des biens nobles

En 1470, Pons de Clermont-Lodève, étant seigneur de Brusque, étend son pouvoir sur les deux seigneuries voisines de Sorgues et de Canals ( 74 ).
Je n'ai pu découvrir les documents qui ont accompagné cette extension, mais celle-ci pourrait être liée à un échange, car quelques années auparavant, le château de Sorgues figurait dans l'apanage de la famille languedocienne de Villepassans, que l'on retrouve à Céras, dans les terres de Brusque en 1458 ( 75 ).

Un testament de 1476 ( 76 ), cite également comme présent au château de Brusque : noble Jean d' André, alias de Fabre, à l'occasion de son mariage avec Sclarmonde, 7ème enfant de noble Jean de Tubières.

Le consulat de Brusque en temps de Peste

La peste, qui avait entrainé le transfert provisoire de la cour du sénéchal de Villefranche à Sauveterre de Rouergue dès 1454, s'était propagée, avec une grande intensité au point d'emporter 4.000 villefranchois ( 77 ).

Dix ans plus tard, elle sévit encore dans le Brusquès et nous retrouvons dans les comptes consulaires tenus par Guilhem Borias, qui cumule les fonctions de notaire royal et de consul ( 78 ), les allusions suivantes aux mesures que la Communauté doit prendre pendant sa mandature :

" Ensec se la meza facha per me Guilhem Borias, notari real, consol del loc de Brusca de l'an MCCCCLXIIII fenit en l'an LXV :
Et primo l'an desus aXVI del mes de jun bayliey a Paul Cathala en debatemen de hun moto que ly donava la viala per la servir se hii ay mes loc après que ac sebelit Bruneu IIgr
Item l'an desus a XXVII deldig mes bayliey mays aldig Paolet loqual se tenia en la balma de Cribas ......II gr.II d
Item l'an desus a XI deldig mes venc lo gran Paul al portal demandar argen. Bayliey ly autres......II gr.
Item l'an desus et las vespras de sant Jacme, bayliey may al gran Paul, quant fonc intrat.......V s
Item l'an desus, de voluntat del conselh, tramezi Dorde Chauzit a Roste per saber del filh de Brunet, le aviam gitat foras de la vila dubtans nos que agues la bossa, en quanhe estat era. Doney ly......VIII d
Item bayliey a Guilhem de Bonaval sirven quant ac inhibit a la molher de Huguet Pepi que salhigues foras de la vila......IIII d "

Le consul décrit, entre les lignes, les mesures d'éloignement du fossoyeur : Paul Cathala dit Paolet ou Gran Paul, qui, pour éviter la propagation de la maladie, qu'il est particulièrement susceptible de contracter, habite la grotte de Cribas (au bord du Sanctus, entre Cribas le Bas et Pressouyre) ou de Dorde Chauzit, que le conseil expédie à Roste, car il est soupçonné d'avoir la " bossa ".

Dix ans plus tard, notre communauté est toujours aux prises avec l'épidémie, comme le décrit le reçu suivant de Peire Roqueti ( 79 ) :

" Sapian totz los que la presen bilheta legiran ny veyran que ieu Peyre Roqueta confesse aver agut he recebut dels messenhors cossols de Brusca lo noble Johan Audric, Peyre Barra, Johan Teysseyre, Dorde Guilhem, coma cossols deldich loc de Brusca,la soma de detz lieuras tornesas en diversas paguas en lasquals detz lieuras losdichs cossols me eran tengutz a causa de pensio de demorar en lodich loc de Brusca per servir a la communitat deldich loc de Brusca, a causa de malautia pestilential en lodich loc renhan, de lasquals detz II tornesas he pensio he tota autra causa en que losdichs cossols me poguesso esse detengutz entroal presen jorn, quite de tot en tot, enclusa en aquesta bilheta una autra bilheta facha per las mas de Mestre Guibbert de Capluc lo jorn de la Magdalena propdanamen passat, testimoni la presen bilheta scricha he senhada de ma propria ma l'an MCCCCLXXIIII° he lo XIII del mes de agost.
Petrus Roqueti ita confiteor fore verum et sic est.
De lasquals X II ne paguet Bernat Cantobre II ll V ss Roqueti. "

Cette épidémie dévastatrice aurait ,peut-être, été à l'origine de l'ouverture de la fosse commune, que l'entreprise Guipal a découverte lorsqu'elle a fait aménager, dans les années 1980, à l'emplacement de l'ancien cimetière Saint-Martin, des bassins de décantation des eaux de lavage du sable de carrière .

Deux siècles de procédure entre le Seigneur et la Communauté

On a vu plus haut (s'y reporter), que l'inféodation du Brusquès à Bérenger IV Guilhem de Clermont, attestée en 1316, avait restreint les libertés octroyées lors de l'institution du Consulat et provoqué, longtemps après, des saisies brutales chez les habitants de Brusque par les représentants locaux de leur seigneur.

Si cette méthode expéditive avait été condamnée par le Sénéchal de Rouergue, la procédure était encore en cours devant le Parlement de Toulouse en 1494 :
Prescriptions diverses concernant les habitants de Brusque en Rouergue et Tristan Guillaume de Clermont, seigneur du dit lieu :

" Ils seront tenus de se conformer à la transaction du dernier février 1480, qui leur défend de vendre des herbages du " Pastoux " de Brusque et d'y mettre du bétail étranger; les officiers rendront la justice, en la place publique, ainsi que d'ancienneté, est accoutumé de faire ( 80 ).
Défense aux habitants de Brusque de pêcher et de chasser dans certaines parties des possessions du sieur de Clermont, seigneur du dit lieu de Brusque "
( 81 ).
(Je n'ai pu déterminer si ce terme de " Pastoux ", qu'on ne rencontre pas ailleurs, désignait l'ensemble des pâturages de la Communauté ou un tènement particulier ?).

 

 

 

Notes bibliographiques
( 74 ) Raymond Noël, Dictionnaire des châteaux de l'Aveyron, t.2 p. 562
( 75 ) Jean Delmas, dans Vivre en Rouergue num 52, p. 44
( 76 ) Comitis notaire, AD Aveyron 2E473 (1476)
( 77 ) Sylvie Mouysset, La Peste en Rouergue, p. 16
( 78 ) Jean Delmas, dans Al Canton - Camarès p. 50 (AD12 2E35)
( 79 ) Jean Delmas, dans Al Canton - Camarès p. 53 (AD12 2E35-10)
( 80 ) AD Haute-Garonne BT1 folio 477 18 avril 1492
( 81 ) AD Haute-Garonne B9 folio 253 14 mars 1494