Le Testament de Tristan II et le sort particulier de Mélagues
" Au nom de Notre Seigneur, ainsi soit-il !
L'An de la Nativité du Christ, mille quatre Cent Nonente Sept et le Samedy, pénultième jour du mois de Septembre
C'est pourquoy l'Excelant et magnifique, puissant seigneur Tristan Guilhem de Clermont, chevalier, seigneur des lieux de Clermont de Lodève, de Diane (Dio?) et de Boussagues - diocéze de Béziers - ; de St Gervais et de Castanet - diocéze de Castres - deMélage (Mélagues), d'Arnaque (Arnac), de Lausiaco (sans doute lire Tauriac), de Brusque, de Peusio (Peux), de Proenque (Prohencoux), et de Villefrède (Fréjeville) - diocéze de Vabres - et vicomte de Nebozan, sain d'esprit et d'entendement
Il a, à la vérité, assigné aux dits frères prêcheurs ( du couvent de Clermont) et à leur couvent pour estre par eux parées et par eux exigées et levées annuelement et chacune année, tant sur la susd. nouvelle acquisition, par le.d testateur (comme il a été dit) faitte sur le d.four de la ville de Clermont, que sur les herbages ou pâturages du lieu et juridiction de Mélages, dioceze de Vabres, lesquels, led. Seigneur testateur a depuis peu acquis des habitants desd. lieux et juridiction, au moyen de l'instrument public pris et reçu en notte, par moy notaire soubz escript soubz l'année et pour y contenus, led. Instrument, sur ce passé, entre led. seigneur testateur, ses procureurs et les sindics et particuliers habitans desd. lieu et juridiction de Mélages " ( 82 )L'ancien château de la Devèze près Fayet
Plus loin dans le même testament, " Item, aussi le dit seigneur testateur a lègué et laissé outre et par dessus les dits cinq cens livres tournois à la dite dame Catherine son espouze..................les lieux et juridictions haute,moyenne et basse avec la mère et mixte impaire de Brusque, de Mélagues, de Lauriac, et d'Aurnac, ensemble avec tous et chacun les revenus, droitz, rentes et émoluements, provenant des dits lieux et juridictions, comme aussi le château de Faiet, dit communément La Devéze et ses apartenances, laquelle borie a autrefois acquize de noble Bringuier Rulhenc, seigneur de Montgalion avec toutes les uttensiles et meubles quy sont dans le château dudit Faiet " ( 82 ).Cette clause du testament confirme qu'il existait à Fayet une seigneurie (voir annexeIV - année 1410), et un château, mais son emplacement et l'origine du titulaire restent encore à déterminer.
Les Moulines à Fer
On a vu précédemment, que les représentants du Brusquès jouissaient d'un certain poids, dans les délibérations de l'administration de la Haute Marche, traitant de sujets d'ordre commercial ou économique .
Cette influence pouvait être dûe à la proximité du Haut et du Bas-Languedoc, qui devait favoriser la fréquentation de la foire de la St François, d'une durée de trois jours (cf ci-dessus) et la notoriété des marchands qui y étaient installés.L'exploitation des mines de Prat-Mansel et de l'Adreg del Vivier contribuait certainement aussi à entretenir des échanges fructueux.
On pense surtout, bien qu'on n'ait guère de documentation sur leur développement avant le XVIIème siècle, aux activités textiles de Fayet et de Brusque.Mais un article de Monsieur Jean Delmas, paru dans la Revue du Rouergue ( 83 ), nous révèle une activité propre à notre Communauté et moins bien connue jusque là : celle de la métallurgie du fer.
Celle-ci s'exerçait, d'après l'acte analysé de 1508 ( 84 ), à Cambias.Cette installation, dirigée par Dardé Barrau permettait la fabrication de 120 quintaux de fer par an et nécessitait un personnel de treize hommes (neuf pour la production et l'acheminement du charbon de bois venant principalement d'Arnac et de Mélagues, et quatre pour la forge de Cambias, utilisant la force hydraulique, grace au barrage sur le Dourdou).
Il s'agissait donc d'une entreprise artisanale, importante pour l'époque, dont la production s'écoulait de préférence sur le Languedoc (l'article nous révèle le nom d'un acheteur : Benoit Mouchet, négociant de Montpellier) .On possède moins de renseignements sur la mouline-ferrière de Pradel à Arnac et encore moins sur celle de Mélagues, peut-être plus tardive.
Un Sénéchal du Rouergue issu de notre terroir ?
Les archives du château de l'Hermitage, connues sous le nom de " Fonds Thézan ", conservent un contrat de mariage passé le 28-8-1525, entre Anthoine de Thézan, seigneur de Saint-Geniez (en Languedoc) et Louise de Baderon, fille d'Antoine de Baderon, seigneur de Maussac et de Saint-Saturnin, sénéchal du Rouergue et de Claire de Montredon < href="#note85">( 85 ).
Ce titre de sénéchal du Rouergue, attribué à Antoine de Baderon de Maussac est assez troublant, car il ne figure pas dans la nomenclature des sénéchaux, établie par Henri Affre, qu'il présente lui-même, il est vrai, comme " encore incomplète " ( 86 ) ; c'est ce même Anthoine de Baderon, dont le testament atteste l'existence d'une église de Maussac.On doit préciser toutefois, que les titres d'Anthoine de Baderon et l'authenticité de son testament sont contestés et sont présentés comme résultant d'une confusion avec un Antoine de Baudière, seigneur de Massals ( 87 ).
Quelques années plus tard : le 2 Avril 1540, c'est Pierre Baderon, qui procède à un dénombrement de ses fiefs : il reconnaît tenir le fief de Maussac, en commun avec M. de Montalègre et exercer, dans Maussac, la moyenne et la basse justice.
Maussac aurait donc été, à cette époque, une co-seigneurie vassale de Brusque
La Maison-forte de la Mouline d'Arnac
Si le seigneur tenait du roi de France, la possession et notamment les droits de haute justice, sur l'ensemble des terres de la Communauté de Brusque, on vient de voir que, pour le fief de Maussac , il avait délégué à un vassal une partie de ses pouvoirs. Il en était, sans doute, de même pour les terres d'Arnac où l'on retrouve en 1525 : noble Dominique Pradel, seigneur de la Mouline d'Arnac ( 88 ).
Avec cette information et l'indice que constitue un nom de lieu-dit proche du Dourdou : " L'Ort del Castel ", il est possible d'identifier l'emplacement et les vestiges de la maison-forte, ou du repaire ( du latin riparius = établi sur les rives ayant pour fonction la protection et surveillance de la mouline à fer, de ses installations hydrauliques et du gué.
Il s'agit du dernier bâtiment du hameau en descendant vers la rivière : une ancienne laiterie, transformée maintenant en résidence secondaire, aménagée sur un rez de chaussée sombre, utilisé naguère pour la réception du lait, dont les murs, du coté de l'eau, ont environ un mètre d'épaisseur, faiblement éclairé à hauteur d'homme par des " avérous ", hauts et étroits à l'extérieur, mais dont les parois s'évasent vers l'intérieur.
Ce type d'ouvertures, très utilisé pour l'aération des granges rouergates, ici, ne pouvait avoir cette fonction, elles conservent encore les restes d'un grillage destiné à la protection de la laiterie contre les rongeurs, et ne peut s'expliquer, pour une pièce où l'on a plutôt besoin de lumière pour travailler, mais correspondre à une adaptation approximative de meurtrières, dont elles ont les dimensions, ou, du moins, à des vues de surveillance en direction des installations de la mouline à fer toute proche.
Contribution de Brusque à la défense de Millau
Millau étant menacé, en 1528, par le vicomte de Narbonne, maître de Compeyre, ses consuls firent appel aux villes voisines pour renforcer sa défense.
Lodève envoya 13 archers, Brusque 4, Pousthomy et ses environs 10, ceux-ci étaient commandés par le seigneur de Murasson : Jean de Montjuif ( 89 ).
Notes bibliographiques
( 82 ) Testament de Tristan de Clermont 1497
( 83 ) et ( 84 ) Jean Delmas, dans Revue du Rouergue num 135
( 85 ) Marquis de Thézan, Le Fonds Thézan, titre 58 p. 121
( 86 ) H. Affre, Dictionnaire des institutions, moeurs et coutumes du Rouergue, p. 412
( 87 ) J.D. Bergasse, Hommage à Fabre de Morlhon p. 90
( 88 ) Jean Delmas, AD Aveyron E1742
( 89 ) Archives municipales de Millau, 1528